•             J’ai bien du mal en ce moment à m’intéresser à ce qui se passe à Rouen, ville où le hasard me fait vivre et où, à chaque changement de municipalité, se rejoue « Prélude au désastre ».

                Je sais toutefois que Rouen n’est plus la capitale mondiale de la jeunesse et des sports qu’elle prétendait être en deux mille quatorze (la peau de l’ours n’est pas une histoire connue ici), le Comité National Olympique et Sportif ayant annoncé que la France est candidate à l’organisation des Jeux Olympiques d’hiver deux mille dix-huit, ce qui entraîne l’abandon du projet Jeux Olympiques de la Jeunesse.

                Que ce Comité ait laissé Fourneyron (Valérie), maire, accrocher sa banderole sur la mairie, fabriquer ses ticheurtes olympiques et faire le voyage de Pékin pour défendre son intention, ne l’informant pas plus tôt que la France serait candidate pour les Jeux d’hiver, je trouve que cela s’apparente à de la cruauté mentale.

                Je sais aussi, vaguement, à quoi va ressembler la médiathèque vendue à la découpe, ce qui aura pour principal inconvénient la multiplication des déplacements en ville. Impossible pour moi d’aller à pied (trop loin, trop pentu) dans le quartier du Châtelet où il y aurait cédéthèque et, au prix du ticket de bus, c’est dans les cent vingt euros par an que me coûterait la fréquentation de ce lieu.

                Le quartier Saint-Sever se verrait gratifié d’une marmothèque. Là, je peux aller à pied, mais qu’on ne compte pas sur moi pour emprunter un marmot. Cela dit, le projet est intéressant. Je comprends que des parents en aient marre de leur progéniture et la confient à la collectivité et il ne manquera pas de femmes sans enfant pour avoir envie d’en emprunter un(e) ou plusieurs, et même des hommes, mais attention aux pédophiles.

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  •             Longue marche à pied avec elle au matin vers le quartier de la Préfecture d’abord puis vers celui dit Jouvenet afin d’explorer les deux vide-greniers dominicaux. Beaucoup d’acheteurs et d’acheteuses potentiel(le)s à Rouen, et vite la fatigue qui s’installe mais quelques trouvailles dans le premier et des moments réjouissants dans les deux

                Quartier Préfecture, j’achète à une demoiselle le coffret des deux volumes consacrés à La Sculpture (de l’Antiquité au Vingtième Siècle) publié chez Taschen, un bien beau cadeau d’anniversaire transformé en paquet de cigarettes, et pour un euro un peu plus loin l’énorme livre de la collection Terre Humaine reprenant les Carnet d’enquêtes d’Emile Zola, toutes les recherches faites par lui et destinées à étayer réalistement ses romans de la série des Rougon-Macquart. Dans ce livre, je découvre une carte de bonne et heureuse année mil neuf cent quatre-vingt-huit à l’entête du Canuet (président du Conseil Général) et du préfet Quyollet et une autre carte indiquant le nom du destinataire, sans doute l’homme vieillissant qui me vend ce livre de toute évidence offert à lui en cadeau par les deux têtes du département de l’époque. Le département fait-il aujourd’hui avec l’argent des contribuables d’aussi beaux cadeaux aux gens qui comptent, je ne sais.

                Un jeune père de famille s’intéresse à la série Drôle de Petites Bêtes (Mireille l’Abeille, Léon le Bourdon et compagnie) de chez  Gallimard Jeunesse. On ne peut se retenir et on lui chante La Ferme, la chanson des Fatals Picards inspirée de cette série et dont l’un des animaux est Le Pen la Hyène. Il ne nous demande pas de la fermer mais nous regarde quand même bizarrement. Je me renseigne auprès de la vendeuse :

                -Vous n’avez pas Sarko le Fat Sot ?

                -Ah non, me dit-elle, il n’est pas encore sorti celui là.

                Quartier Jouvenet, je ne trouve pas le moindre livre à acheter. Ici on est riche, on s’appelle Anne-France, on a un moutard nommé Auguste, mais on ne lit que des âneries et c’est cela que l’on tente de vendre, Paolo Coelho, Marc Lévy, Amélie Nothomb et compagnie. On nous propose aussi un livre pratique dont on n’a pas l’usage Relancez votre couple pour les Nuls.

                Pas grave, c’est une jolie promenade et les petites bourgeoises sont bien mignonnes. Sur le chemin du retour, elle fait des photos de deux maisons enlierrées, rouge d’automne sur fond de ciel bleu. A la main, elle a une poupée garçon en chiffon que lui a donné l’un des vendeurs de Jouvenet.

                Après qu’elle est repartie, je repasse par le premier de ces deux vide-greniers avec l’intention d’acheter une cafetière. Je reviens sans, mais avec trois livres de plus, parmi lesquels celui des souvenirs de Violet Trefusis, l’amante de Vita Sackville-West, publié chez Salvy. J’aime particulièrement son titre, tout à fait d’actualité, Prélude au désastre.

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  •             Ménage et rangement, j’ai chaque année cette bonne résolution à la fin de l’été. Septembre s’achève et encore une fois, je n’ai pas réussi à remettre de l’ordre dans ma maison, encore moins d’y faire un ménage approfondi.

                Au début du mois, je ne me suis pas trop mal débrouillé, un bon départ même, et puis ensuite je ne sais pas ce qui s’est passé, plus le temps pour attraper un chiffon et le désordre qui au lieu de reculer se met à reprendre le dessus.

                N’est plus là, hélas, le temps où mes finances me permettaient de faire appel à une ménageuse et je n’ai pas la chance de connaître personnellement Claire Dumay qui, dans le numéro quinze de Supérieur Inconnu, le revue de Sarane Alexandrian, raconte, sous le titre Le Ménage, sa folle addiction au nettoyage et au rangement auxquels elle s’emploie avec opiniâtreté Une énergie dionysiaque à assouvir, pour traquer, débusquer la saleté, quelque chose qui irait jusqu’à la succion, l’absorption.

                Ce ménage, c’est un privilège que je ne céderais à personne, conclut-elle pour mieux me narguer.

                Celle qui me rejoint le ouiquennede, quand fin août je l’ai entretenue de ma bonne résolution, et que cette année c’est sûr j’allais réussir, n’a eu qu’une réaction : un éclat de rire.

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  •             Les ennuis judiciaires du genre qu’expérimente aujourd’hui Philippe Pissier, je connais. J’y ai eu droit moi aussi, il y a quelques années. Pour avoir posé, dans une rue du voisinage, une affichette annonçant qu’à photographier je recherchais de jolies jeunes filles.

                Le procureur de la république en promenade dans le quartier s’inquiète. Ne prendrais-je pas en photo des mineures ? Il décolle l’affichette et diligente une enquête.

                Tout se passe comme pour Philippe Pissier, convocation à l’Hôtel de Police, perquisition de mon domicile, saisie d’un certain nombre de documents (photos de jeunes personnes déshabillées, correspondances et autres), énumération sur un procès-verbal de tout ce que l’on trouve chez moi de nature à me faire passer pour un personnage des plus louches. De cela découlent pas mal d’ennuis, notamment professionnels.

                Ce n’est qu’un an et demi plus tard que la juge d’instruction chargée de mon cas prononce un non-lieu, sans que jamais elle ne m’ait convoqué.

                Le monde judiciaire est ainsi fait. On est suspecté à tort. On a tous les ennuis possibles. Cela dure longtemps. On est finalement blanchi.

                Evidemment, personne ne vous dédommage des frais d’avocat, ni pour ce qu’on appelle le préjudice moral.

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  •             Les Quatre Cents Culs, le sexe blog que publie Agnès Giard via le site de Libération, m’apprend que Philippe Pissier a des ennuis. En juin deux mille huit, invité à participer à une exposition de mail-art érotique en Allemagne, il envoie quatre cartes postales représentant le buste dénudé d’une jolie jeune femme dont chaque sein a le téton agrémenté de pinces à linge.

                « Saisi d’une vertueuse indignation, écrit Agnès Giard, le centre de tri postal porte immédiatement plainte. » et la substitut du procureur de la République de Cahors ordonne une enquête préliminaire.

                Philippe Pissier est convoqué à la gendarmerie et apprend qu’il est passible de trois ans d’emprisonnement et de cent soixante-quinze mille euros d’amende pour trouble à l’ordre public et mise en danger du psychisme des enfants par une oeuvre pornographique.

                Il proteste: « Je suis majeur, les employés du centre de tri postal sont majeurs, le facteur est majeur et le destinataire est majeur. Je ne vois pas où est le problème. »

                Le trois juillet, une perquisition a lieu à son domicile. La brigade de recherche de Cahors emporte son ordinateur et quelques dizaines de ses oeuvres. Depuis, Philippe Pissier, privé de son outil de travail, attend de savoir ce que la justice française lui réserve.

                Philippe Pissier, je le connais par ses très belles Lettres à Lilith, publiées il y a dix ans aux Editions Under-Black-Blockhaus-Résistance, des lettres d’amour écrites après la mort de Diana Orlow, alias Lilith von Sirius, décédée à l’âge de vingt-six ans, le trente mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept à Hambourg. Nous nous sommes écrit à cette époque. L’une de mes lettres figure au sommaire de l’ouvrage intitulé Lettres à Lilith, Courrier.

                Et de Diana Orlow (Lilith von Sirius), je possède dans ma bibliothèque les textes publiés à Rouen par les Editions On @ Faim de Jean-Pierre Levaray (Prêtresse de Babalon, Human Woman with Human Feelings, Courtisane de luxe et Diary 1995) ainsi que Contrat d’esclavage publié à Caen par les Editions Cahiers de Nuit de Serge Féray.

                Ce qui arrive aujourd’hui à Philippe Pissier est lamentable et illustre bien la dégringolade actuelle.

                Sous le titre ironique « Un dangereux artiste démasqué dans le Lot », le journal local L’Echo s’interroge dans son numéro du onze septembre : « Si une telle image mobilise à ce point les forces de l’ordre, à quoi doivent s’attendre les maisons de la presse, kiosques à journaux, galeries de peinture et musées, où la nudité dépasse souvent abondamment la mise en image d’une paire de seins, même ornée de pinces à linge. »

                Agnès Giard suggère à chacun(e) d’envoyer au tribunal de Grande Instance de Cahors une carte postale représentant Gabrielle d’Estrées, ce chef-d’œuvre de l’Ecole de Fontainebleau, montré au Louvre, où l’on voit la belle Gabrielle se faire pincer un téton par sa sœur : « La Poste portera-t-elle plainte contre vous? Les gendarmes viendront-ils perquisitionner à votre domicile? L’enquête prendra-t-elle un an? ou deux? Récupérerez-vous votre ordinateur en état de marche après avoir purgé votre peine? »

                Encore une fois, je constate que plus le désordre est économique et plus l’ordre est moral, et je sais où ça mène.

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  •             Mardi, La Poste est en grève. Il s’agit de protester contre la privatisation rampante, comme ils disent. J’ai quand même du courrier dans ma boîte à lettres et cela fait déjà un moment que ce service public n’en est plus vraiment un, ayant transformé ses usagers en clients. Le client que je suis devenu n’est pas toujours content.

                Je n’oublie pas que le bureau de la Champmeslé m’a raconté n’importe quoi à propos de ma lettre taxée perdue jamais retrouvée et que mon deuxième courrier au directeur départemental de la Poste de Seine-Maritime à ce sujet, ne m’a pas valu la moindre réponse.

                Par ailleurs, je n’apprécie guère au guichet, voulant acheter des timbres, qu’on me propose systématiquement des enveloppes prétimbrées bien plus coûteuses. Ni quand j’envoie un livre ou un cédé au tarif lettre, qu’on me dise qu’il faut utiliser le Colissimo affreusement cher.

                Jusqu’à la semaine dernière, à cette obstruction, je n’avais pour argument que mon péremptoire  « Si je vous dis que c’est une lettre, c’est que c’est une lettre ».

                J’ai désormais en ma possession une copie de la page onze de La Lettre de l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes de septembre/octobre deux mille sept. Il y est écrit que « si le client estime que la prestation lettre satisfait ses besoins, tout en respectant les conditions de format, de poids et de tarifs, ainsi que les obligations en matière de conditionnement, La Poste ne peut lui interdire d’expédier son envoi au tarif lettre ».

                La Poste n’a donc plus d’usagers et le client est toujours roi.

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  •             Il est sept heures dimanche matin, la nuit pas encore levée, elle et moi sommes déjà en train de fouiller dans les premiers cartons rencontrés sur les quais de Rouen où c’est jour de grand déballage de livres d’occasion. Ceux que nous manipulons chez ce premier vendeur ne le sont pas. Il travaille dans l’édition et tout ce qu’il vend est neuf, il n’y a que le prix qui soit d’occase et j’en profite bien.

                Un peu plus loin, c’est elle qui fait une affaire avec un énorme livre consacré à Jean-Pierre Raynaud, l’artiste carreleur, publié au Editions du Regard, vendu pour un prix compatible avec le contenu étique de son porte-monnaie d’étudiante.

                De marchand d’un jour en marchande d’un jour, nous remplissons nos sacs et avons bientôt les mains sciées par le poids. Elle se dévoue pour aller vider tout cela à la maison tandis que je continue à chercher mon bonheur sous un soleil froid.

                Elle me retrouve sans difficulté dans le flot pas encore trop dense des acheteurs et acheteuses. Nous croisons quelques connaissances et supportons en silence le discours des dames de charité « Vous achetez un livre et en plus vous faites une bonne action ».

                Il n’y a pas que les membres des bonnes œuvres ici, il y a aussi des particuliers prêts à tout pour se débarrasser de leurs livres et des professionnels qui délaissent pour un dimanche le marché du Clos Saint-Marc, jugeant l’endroit plus avantageux.

                -Ah, ça fait du bien de voir des jeunes acheter des livres, s’exclame une vendeuse quinquagénaire qui vend les siens, tous datant des années soixante-dix, et qui ne doit donc plus lire depuis longtemps. Elle parle de celle qui m’accompagne et celle-ci se retient pour ne pas dire à cette ancienne le fond de sa pensée.

                Nos sacs se remplissent à nouveau de livres qu’on ne cherchait pas, sans que l’on trouve ceux que l’on cherche. Quelques bonnes affaires nous échappent de peu, à notre mécontentement. Quand les acheteurs et acheteuses commencent à se presser et à se compresser sur le quai, nous quittons les lieux. Il est onze heures, cela ne fait que quatre heures que l’on est là.

                La liste complète de nos achats serait assurément fastidieuse. On y trouve, rapprochés par un hasard réjouissant : Comment fumer en cachette de Nicolas Kanjounzeff (Hachette) et l’Histoire Raisonnée de la Fellation de Thierry Leguay (Cercle Poche).

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  •             Laure Leforestier n’est plus l’adjointe au Patrimoine de la ville de Rouen mais son idée de Dessous court toujours, un peu assagie hélas, et avec celle qui me tient la main, je cours derrière, ce samedi soir.

                Première halte à la galerie du Pôle Image pour y voir les photos faites par Henri Salesse lors de son enquête sur l’habitat rouennais défectueux en mil neuf cinquante et un. Pas tellement dans l’esprit de la soirée donc, mais mil neuf cent cinquante et un est une bonne année et il y a du vin, du saucisson et même des rillettes.

                Le verre bu, on file à l’église Saint-Maclou où Eric Thielemans présente Aural Spaces Organ- La Ruche, une création sonore avec bruits urbains enregistrés et instruments de musique en direct, tout à fait appréciable.

                On emprunte une rue de la République interdite à la circulation et livrée à Augustin Gimel et Brigitte Perroto pour Syncopes, une création vidéo, lumière rouge et fumigène. Dans une atmosphère de guérilla, des immeubles s’écroulent sur le mur de l’Archevêché. Plus haut dans cette rue de la Rép’, le Mil’pattes, restaurant de nouilles, affiche sa désolation à la Hopper, mais ça, ce n’est pas dans l’installation, c’est comme ça tous les soirs. Elle s’arrête pour en faire une photo.

                Nous entrons dans l’Abbatiale Saint-Ouen où la Compagnie étant-donné donne La structure poétique de la victime « création in situ, performance danse ». Neuf danseuses vêtues d’amples robes rouges évoluent de concert entre les piliers sur une musique d’Hubert Michel. C’est très beau et, comme elle me le fait remarquer, aucun sous-entendu religieux dans cette histoire.

                Etape suivante au Musée des Beaux-Arts pour y voir Vider Paris, une vidéo de Nicolas Moulin, qui présente, en un lent diaporama, des photos de la capitale aux rues entièrement vidées de ses habitant(e)s et de ses voitures. Les rez-de-chaussée des immeubles sont totalement bétonnés, sans portes ni fenêtres. Aux étages nulle fenêtre n’est ouverte. Comme une anticipation, qui fait frémir.

                Assis maintenant sur la place de l’Hôtel de Ville, nous regardons Satu Herrala danser Stabsolo (stick solo) de Will Dorner. Une fille joue avec un long bâton. C’est très lent, plutôt ennuyeux et cela déclenche les quolibets des branlotins qui traînent par là : « C’est bien, tu vas y arriver ».

                 Nouvelle descente de la rue de la République en guerre, on prend une dose de ruche dans l’église Saint-Maclou et on finit à La Gratuité, friche commerciale, pour un petit morceau de RRAUW, Cathedral of Ear, installation sonore d’Eric Thielemans. Elle s’allonge avec moi sous la bulle sur de moelleux coussins blancs, près des quelques-un(e)s déjà là, et nous nous laissons bercer. A l’issue, un enfant dort entre deux tranches de coussins. Elle demande aux parents l’autorisation de le photographier.

                -C’est parce qu’il avait l’air mort, me dit-elle alors que nous regagnons la maison.

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  •             David Lodge est à librairie L’Armitière samedi après-midi. Bien longtemps que je n’ai pas vu un écrivain valant le déplacement passer par là, pas depuis Jim Harrison du temps de l’ancienne direction. Non que je mette Lodge au même niveau qu’Harrison. Lodge est un bon écrivain de littérature récréative, agréable à lire entre deux livres un peu plus nourrissants. Je dis est mais je devrais plutôt écrire était.

                J’aimais bien quand il racontait dans chaque livre une histoire d’universitaires frustré(e)s, comme j’aime de Barbara Pym les histoires de vieilles filles amoureuses du même jeune pasteur. L’humour anglais et tout ça, mais il a changé de sujet dans ses livres récents.

                Le dernier David Lodge que j’ai acheté c’est L’auteur ! L’auteur ! publié comme tous les autres chez Rivage. Ce titre est écrit en petit au bas de la couverture et le nom de l’auteur en énormes lettres capitales en haut. C’est mauvais signe. Je n’ai pas pu en lire une page. Cette biographie romancée d’Henry James ne m’intéresse absolument pas et je trouve ça épouvantablement mal écrit.

                Heureusement, je n’ai payé ce livre valant vingt et un euros qu’un tout petit euro. Malheureusement, aucun bouquiniste de la place de Rouen ne veut me le reprendre.

                Je serais bien allé à L’Armitière, ce samedi, pour  demander à David Lodge pourquoi il n’écrivait plus toujours le même livre. Seulement, le rendez-vous est à quinze heures et quinze heures, c’est l’heure où celle qui revient de Paris sonne à ma porte. Le choix est vite fait.

                Elle me raconte justement, un peu plus tard, qu’elle vient de terminer Pensées secrètes de ce même Lodge, une histoire d’universitaires frustré(e)s, et qu’elle a bien aimé. Je lui dis qu’il était à L’Armitière à quinze heures.

                -Pourquoi n’y es-tu pas allé ? me demande-t-elle.

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  •             Une rentrée sans risque et sans surprise à l’Opéra de Rouen avec le Requiem de Mozart, ce vendredi dix-neuf septembre. Je bénéficie d’une place en loge, ce qui est une première. Pas grand chose à voir avec celles, luxueuses, où l’on nichait les grands-ducs, mais j’y suis bien, assis sur une chaise usée par nombre de fesses, juste derrière la corbeille et bien centré.

                Rien à dire d’autre sur l’exécution de ce Requiem que bravo, évidemment.

                Dans le livret programme, une bienvenue contribution de Joann Elart, musicologue enseignant à l’université de Rouen, remet quelques pendules à l’heure (comme on dit), pendules déréglées par Pouchkine et Milos Forman. Il rappelle que Mozart n’a pas composé le Requiem sur son lit de mort, qu’il ne s’y est pas spécialement intéressé, qu’il ne l’a pas écrit pour lui, que c’était une commande.

                Joann Elart rappelle également que, quelques jours avant sa mort, Mozart chantait les airs joyeux de la Flûte enchantée et qu’il a été enterré sans les derniers sacrements, puisque franc-maçon.

                Une petite surprise musicale quand même ce soir. Avant le Requiem, l’orchestre joue une composition contemporaine signée Christophe Queval et titrée Anastasis : « Méditation sur le Mystère de la descente du Christ aux Enfers avant sa glorieuse Résurrection », une musique paisible et inquiète où dialoguent bellement, à un certain moment, la harpe et le violon solo.

                Je découvre ce soir la musique de Christophe Queval que je connaissais par les textes de programme qu’il rédige parfois pour l’Opéra de Rouen, des textes très personnels emplis d’adjectifs, dont je me suis amusé dans ce Journal de bord, ce qui m’a valu de lui un mail très sympathique.

                Le texte le concernant dans le programme du jour indique qu’« il a renoncé quasi à toute activité salariée pour se consacrer intensément dans l’ombre, la pauvreté et la solitude à la composition, sans parvenir longtemps à intéresser grand monde à sa musique ».

                En outre, m’apprend toujours le livret programme, depuis mil neuf cent quatre-vingt-treize, Christophe Queval travaille en franc-tireur au monumental et utopique projet d’un nouveau Monasticon Gallicanum (Mémorial et Inventaire historique et archéologique des anciennes Abbayes de France), dont l’achèvement est espéré vers les années deux mille quarante. C’est forcément quelqu’un d’intéressant.

                Je le vois se lever deux rangs devant moi, se faufiler entre les fauteuils et monter sur scène. Les applaudissements sont fournis, dont les miens. Il salue bien bas.

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