• Hormis celles et ceux qui me connaissent et que je connais ou me croisent suffisamment pour que l’on fasse semblant de se connaître, les seul(e)s qui me disent bonjour espèrent mon argent.

    Ainsi hier matin tous les commerçant(e)s en vêtements du centre de Rouen chez qui je suis entré, grand sourire, bonjour, pour ensuite ressortir sans rien acheter, petit sourire, au revoir, les mendiant(e)s aussi que je croise un peu partout, jamais en retard d’un bonjour, et puis cette fille orange qui quête près de la Fnaque pour le Double Vé Double Vé Effe, (avant c’étaient des bleu(e)s, ou des rouges, ou des vert(e)s, sollicitant également pour leur association de bienfaisance).

    -Tu me dis bonjour parce que tu as besoin de mon argent, lui dis-je. Pas toi mais l’association qui t’emploie. Sinon tu me croiserais dans la rue, tu ne me verrais même pas.

    -Parfois on dit bonjour et les gens ne vous répondent pas, me dit-elle.

    -Ce n’est pas ce que je te dis, on ne dit bonjour aux gens que lorsqu’on a besoin de leur argent, tu ne trouves pas ça dommage ?

    -Si, me répond-elle.

    Et elle ajoute :

    -En même temps, on est à Rouen.

    Elle a raison, complètement raison.

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  • J’apprends par le site d’Europe Un que le Tribunal de Cahors relaxe Philippe Pissier dans l’affaire du sein et de la pince à linge, une histoire que j’ai déjà évoquée plusieurs fois. Je résume : il s’agit de mail-art, la Poste parle de pornographie, le procureur y voit un danger pour les mineur(e)s. D’abord, je me réjouis de cette issue, mais Philippe Pissier m’écrit que ce n’est pas aussi simple, que l’affaire continue.

    Dans le même temps (autre histoire dont j’ai déjà parlé), malgré le non lieu demandé il y a longtemps par le Parquet, les trois responsables de l’exposition Présumés innocents (qui s’est tenue à Bordeaux il y a neuf ans) sont renvoyés devant le Tribunal. Si le procureur de Bordeaux ne fait pas appel, ils devront répondre des délits de « diffusion et représentation d'images et de messages à caractère violent ou pornographique mettant en scène des mineurs ou susceptible d'être vus par ces derniers ». Les trois suspects présumés innocents sont Henry-Claude Cousseau, directeur de l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris, Marie Laure Bernadac, commissaire de la récente exposition Picasso et ses maîtres et Stéphanie Moisdon, professeur d'histoire de l'art.

    Ces atteintes à la liberté peuvent paraître peu de chose si l’on compare la situation française à l’iranienne, en écho à ce qui se passe actuellement au pays des ayatollahs. Il n’empêche que cela marque le constant regain de puritanisme qui caractérise la plupart des sociétés en ce début de siècle.

    A propos de l’Iran, j’ai pris grand plaisir à lire, publié en poche chez Dix/Dix-Huit, Lire Lolita à Téhéran d’Azar Nafisi. L’auteure raconte dans ce livre comment, ayant dû démissionner de l’Université de Téhéran sous la pression des autorités, elle a réuni clandestinement dans son appartement sept de ses étudiantes pendant deux ans autour de grandes œuvres de la littérature occidentale. Parmi celles-ci Lolita qui suscite bien des débats : Mitra prend une pâtisserie et nous avoue qu’elle se pose des questions. Pourquoi des histoires comme celles de Lolita et Madame Bovary, si tristes, et si tragiques, nous rendent-elles heureuses ? N’est-ce pas un péché que d’avoir du plaisir à la lecture de telles horreurs ?

    En ce qui concerne Lolita, je suis certain que le publiant aujourd’hui dans les pays dits de la liberté, Nabokov serait poursuivi pour apologie de la pédophilie, si tant est qu’il ait eu l’audace de l’écrire et un éditeur pour en prendre le risque.

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