• A Paris, un mercredi de juillet qui tourne à la pluie

    Dans le train Rouen Paris de sept heures cinquante-cinq, ce mercredi, je lis ou plutôt relis Nous aurons encore de mauvais moments de Rafael Sánchez Ferlosio (Rivages Poche). Devant moi, un membre de l’Eduction Nationale oublie que ce sont les vacances en travaillant via son ordinateur à la plaquette de rentrée deux mille quatorze de son collège de La Courneuve. Il s’agit d’impressionner les parents : « Tout le collège est câblé », « Projet littérature : L’écriture à partir du sensible, avec Serge Bianco », etc.

     D’un coup de métro, j’arrive un peu avant dix heures à Ledru-Rollin, juste le temps de boire un café au comptoir du Café du Faubourg avant l’ouverture de Book-Off où les rayonnages sont un peu dépourvus. Tandis que je farfouille, un homme venu pour vendre des livres se fait agresser verbalement par l’une des employées. Elle ne veut plus le voir ici avec ses livres abîmés, sûrement récupérés dans des poubelles. Au prétexte qu’il vient souvent, elle le traite de professionnel, ce qui met cet homme hors de lui. Il lui conseille de ne pas traîner vers chez lui et repart avec ses lourds sacs. Quoi de plus jouissif pour cette fille qui doit gagner le salaire minimum que de s’en prendre à plus pauvre qu’elle. Je ne lui dis pas son fait, lâchement, je vends des livres aussi parfois.

    Après une cuisse de canard confite pommes sarladaises au Péhemmu chinois d’à côté, je rejoins à pied le Centre Pompidou pour y voir le nouvel accrochage de l’étage dédié à l’art contemporain. Il y est question surtout d’Histoire, celle avec sa grande hache comme disait Perec, une sorte de préparation à la Troisième Guerre Mondiale. Je n’accroche pas et passe plus de temps à regarder les visiteuses et visiteurs que les œuvres.

    Tandis que je prends un café à La Mezzanine, la pluie se met à tomber et le reste de ma journée parisienne se passe sous le parapluie.

    *

    À La Mezzanine, une mère à son cinq ans : « Alexandre, si t’es sage, on ira manger une glace après l’exposition, une bonne glace, chez un des meilleurs glaciers de Paris. »

    Alexandre : « Nan, nan, nan. »

    *

    Avions de guerre survolant le bus rue de Rivoli, ce n’est point le début de la Troisième, mais le Quatorze Juillet qui se prépare.

    *

    Contre la pluie, le touriste se vêt d’une bâche (verte, rose, incolore), une tenue qu’il n’accepterait pas dans son village mais qu’à Paris il trouve seyante.

    *

    Parmi les livres rapportés à Rouen : le curieux « roman ? » Le mode interrogatif de Padgett Powell, deux cent trente-deux pages de questions n’ayant souvent rien à voir les unes avec les autres, publié en France par rue fromentin, éditeur inconnu de moi.

    Partager via Gmail Yahoo!