• Au Centre Pompidou, pour le nouvel accrochage

    Mercredi matin, à la gare de Rouen, le train pour Lille est annoncé supprimé et ma balise humaine n’est pas là sur le quai de celui pour Paris. Il manque beaucoup d’autres honnêtes travailleurs d’un certain âge. Seuls les plus jeunes sont présents. Les vacances de Pâques doivent se prendre à l’ancienneté. Je suis bientôt installé à contresens dans une voiture de milieu de convoi. J’y lis les Carnets du ghetto de Varsovie d’Adam Czerniaków. C’est une voix féminine qui annonce l’arrivée dans la capitale et demande de ne rien oublier dans le train et de faire attention en descendant, accentuant le côté maternage.

    Parmi mes envies du jour, celle de découvrir le nouvel accrochage du Centre Pompidou, section art contemporain, mais ce n’est pas l’heure. Je file vers le faubourg Saint-Antoine pour y explorer Book-Off  et, en attendant dix heures, me balade sur les pavés du quai du port de plaisance de Paris Arsenal. Habiter sur un bateau, ça doit être bien, et puis on doit s’en lasser, me dis-je, en considérant tel qui lave son pont, telle autre qui crie après ses enfants ne voulant pas venir petit-déjeuner.

    Je passe un bon moment chez Book-Off  où l’on écoute les Clash en concert (de quoi me donner envie de trouver le cédé au prochain vide grenier), déjeune chez Délices Traiteur d’un menu vapeur et me dirige à pied vers Beaubourg, m’accordant une longue pause place des Vosges. Rue des Francs-Bourgeois planent un air de rébellion et des banderoles : « Sauvons les Archives Nationales » « Non à la Maison de l’Histoire de France » « Hôtel de Soubise occupé », la faute à la politique nationale sarkoziste.

    Terminé l’accrochage au féminin, le Centre Pompidou est revenu à la mixité pour son étage contemporain. On y voit donc essentiellement des œuvres dues à des mâles. J’y retrouve de vieilles connaissances parmi lesquelles l’homme au canoë rouge de Peter Doig, vu lors de l’exposition à lui consacrée au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, et de récentes acquisitions, dont aucune ne m’excite particulièrement. Je m’abstiens de m’enfermer dans le noir pour les vidéos.

    En ce moment, le Centre Pompidou ne risque pas de choquer les pisse-froid et de voir débouler une bande de cathos tendance facho. Il met en valeur l’art ludique qui plaît aux parents comme aux enfants avec, par exemple, le Champignon triple géant de Carsten Höller et A=P=P=A=R=I=T=I=O=N (titre emprunté à Stéphane Mallarmé) de Cerith Wyn Evans et Throbbing Gristle (groupe de musique expérimentale et bruitiste), un mobile à la Calder diffusant au gré des mouvements du public des sons planants. Je les écoute de loin, sous le champignon géant, quand une fille ronde à lunettes m’aborde :

    -Excusez-moi si je vous dérange, mais j’ai l’impression de vous connaître, vous êtes un dessinateur, non ?

    C’est avec une autre que j’ai rendez-vous de l’autre côté de la Seine.

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