• Au Flying Pig Hostel (downtown) d'Amsterdam

                Emotion forte à l’arrivée au Flying Pig Hostel, dimanche quinze février, ne voilà-t-il pas que le prix de la chambre pour deux, retenue depuis quelques mois par celle que j’accompagne, est erroné. Le montant indiqué sur la fiche de réservation ne doit pas être lu pour deux mais pour un.

                Je fais semblant de ne pas comprendre, c’est assez facile : ici on ne parle qu’anglais, et je l’écoute argumenter, comme elle sait le faire. Le jeune homme de la réception est bien ennuyé, l’erreur vient de l’hostellerie et n’a pas été corrigée par mail. Après consultation de sa voisine, il nous laisse la chambre avec salle de bain privée et petits-déjeuners inclus à la moitié de son prix réel (augmentée de cinquante euros pour la semaine). C’est une aubaine, d’autres paient la même chose pour deux lits dans un dortoir de douze. Le jeune homme nous offre en cadeau de bienvenue une douzaine de jetons donnant droit à des consommations gratuites et ajoute quelques conseils. Je comprends que là-bas dans la bibliothèque, où sont les canapés profonds, c’est le fumoir, tabac, haschisch ou marijuana.

                D’ardus escaliers nous mènent au troisième étage. La carte magnétique ouvre la porte d’une chambre des plus attrayantes, la trois cent un. Elle est idéalement située au bout du couloir, parfaite pour ne pas souffrir du bruit nocturne inhérent à ce genre d’endroit.

                Un lieu enchanteur et enchanté, cette hostellerie du Cochon Volant, nous y passons de bons moments, parmi une jeunesse venue de toute l’Europe.

                Au rez-de-chaussée, nous buvons du genièvre bien glacé tandis qu’elle tente de dessiner droit la quinzaine de lustres serrés les uns contre les autres au-dessus du billard. Une musique de routard diffusée à bon volume tombe des enceintes. Des boules à facettes tournent tranquillement éclairant le cochon volant suspendu au dessus du bar. Une table de didjai est à disposition de qui sait y faire dans ce domaine.

                Au sous-sol, nous petit-déjeunons copieusement dans la musique des années soixante-dix parmi des filles et des garçons débarquant de toutes les nuits possibles en vrac ou d’équerre (comme elle dit).

                Sur la porte de notre chambre, le Flying Pig rappelle à celles et ceux qui resteraient bien ici pour toujours que le séjour est limité à sept nuits, mais qu’il est possible d’y demeurer plus longtemps en y travaillant.

                Peut-être que certain(e)s ne sortent jamais de cet endroit, lui dis-je, ne voyant d’Amsterdam que les images du dévédé diffusé dans l’une des salles du sous-sol. C’est tellement agréable de se laisser glisser dans cette faille temporelle où le monde rêvé des années soixante-dix est réalité depuis tant d’années et, semble-t-il, prêt à le rester pour pas mal de décennies, tant qu’il y aura des filles et des garçons pour écouter Imagine de John Lennon ou Get up, Stand up de Bob Marley.

                Elle fume une dernière cigarette à la fenêtre. Un carillon sonne de l’église que l’on voit derrière les toits. Un immense vol d’oiseaux en vé traverse le ciel. Je lui dis merci, c’est samedi vingt et un, il est temps de partir.

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