• Au Théâtre de la Chapelle Saint-Louis pour les travaux publics du Conservatoire de Rouen (section théâtre)

                -Ce qui me fait rire, c’est que vous êtes toujours le premier devant la porte de la salle, me dit Maurice Attias, le professeur d’art dramatique du Conservatoire de Rouen, ce mercredi soir, jour de l’été.

                Je suis à chaque fois en avance, ce qui me permet de choisir ma place, si possible l’œil du prince, comme on dit dans le métier du théâtre, siège central du quatrième rang où je m’assois un peu plus tard.

                Pour la troisième soirée consécutive, la classe d’art dramatique d’orientation professionnelle présente ses travaux publics. Cette année, ce sont, groupées sous le titre A chacun sa vérité, des scènes extraites des œuvres des Italiens Luigi Pirandello, Edouardo De Filippo, Pier Paolo Pasolini et Fausto Paravidino, ce dernier inconnu de moi,

                Comme chaque année, le public est essentiellement composé des familles, des copains copines et de professionnel(le)s de la profession, dont le jury assis au dernier rang. A ma droite se trouvent deux vieux grands-parents venus applaudir « la P’tite ».

                La première partie (une heure cinquante) commence dans la comédie avec un extrait de La Grande Magie de De Fillipo, passe par le fantastique avec des extraits de La Maladie de la famille M. de Paravidino et de Calderon de Pasolini et se termine dans le tragique avec un extrait de Nature morte dans un fossé de Paravidino. Pour ce dernier, le livret programme indique « Une jeune fille est retrouvée morte ; par fragments successifs, la cruelle vérité éclatera… ». Je ne sais pourquoi dans un premier temps, faisant fi du point virgule, j’avais lu « Une jeune fille est retrouvée morte par fragments successifs… ». Non, elle est entière, jouée par une élève ensanglantée gisant au premier plan, bougeant encore bien que morte, pendant que ses camarades raconte son histoire, faisant fort bien les putes serbes.

                A l’entracte près de moi, on se félicite du jeu de la P’tite, que je finis par repérer lorsqu’elle traverse la salle pour rejoindre le plateau sans venir saluer sa famille, ce dont on se plaint.

                La seconde partie dure une heure et débute dans une ambiance très Abou Ghraib avec l’extrait de Peanuts de Paravidino montrant de jeunes contestataires aux prises avec de violentes forces de l’ordre. Mes voisins encaissent le choc, n’ayant pas idée que les coups de théâtre font moins mal que les coups de la vie. « Ils vont finir par se blesser. » s’inquiète la grand-mère. « Heureusement que la P’tite ne joue pas dans ce truc-là. » soupire le grand-père. Il est vrai que c’est très réaliste, on peut remercier la Police Municipale pour le prêt des costumes de tortionnaires. L’ambiance change pour la suite et fin : Comme tu me veux et Se trouver de Pirandello. Ce dernier extrait invite à la réflexion sur la position de l’acteur, le jeu, la réalité et la vérité, dont chacun à la sienne.

                A l’issue, tout le monde applaudit bien fort les P’tites et les P’tits.

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