• Concert Gounod et Cherubini à l’Opéra de Rouen

    Plusieurs fois que j’obtiens une place au premier rang du premier balcon à l’Opéra de Rouen (ce ne me convient guère pour cause de barre antichute qui empêche de voir) et plusieurs fois que je peux l’échanger pour mieux la veille ou le jour même à la billetterie. Ce qui n’était pas possible il y a peu l’est devenu. Les guichetières ne sont plus les mêmes et désormais souriantes et fort aimables.

    C’est ainsi que jeudi soir je suis à l’orchestre en Bé Douze pour un concert en deux temps. Le chef est Hervé Niquet qui, surpris par une chaise, entre en scène d’une façon un peu acrobatique. Il porte une longue veste de coupe aristocratique taillée dans le cuir d’un vieux fauteuil sur lequel un chat s’est fait les griffes. D’une gestuelle de volatile, il dirige la Symphonie numéro un en ré majeur de Charles Gounod que celui-ci écrivit pour se consoler de l’échec de son opéra La Nonne sanglante. C’est une œuvre vitaminée et fort applaudie.

    L’Opéra est complet ce soir. A l’entracte, impossible d’entendre quoi que ce soit tant le monde se presse contre le monde. Je retourne m’asseoir et lis la vie de Luigi Cherunini. Son amitié avec Marie-Antoinette l’oblige à fuir la Terreur en se réfugiant à la Chartreuse de Gaillon puis au Havre. Il sauve sa tête et écrit en mil huit cent seize une messe de requiem pour le roi décapité.

    L’Orchestre et son chef bien habillé sont rejoints par les choristes d’accentus, placé(e)s face à face, côté jardin les femmes, côté cour les hommes, enfin presque, la vieille dame devant moi se penche vers son mari : « Tu as vu, il y a un homme avec les femmes ». On donne donc ce vingt janvier de Luigi Cherubini la Messe de requiem pour la mort de Louis XVI. Cette messe tombe à point, nous sommes à la veille de l’anniversaire du décapitage et pour faire bonne mesure, elle sera donnée à nouveau le vingt et un par les mêmes dans la Chapelle Royale à Versailles, de quoi pour le chœur accentus mettre un peu de baume au cœur des royalistes après en avoir mis à celui des communistes quand il interprétait des chants bolcheviks.

    Cette messe de requiem est tonique et fort gaie. Elle suscite de vrais applaudissements et même quelques sifflets admiratifs venus des hauteurs. La vieille dame devant moi se penche vers son mari pour lui dire qu’elle n’aime pas ça, les sifflets. Je regrette pour ma part que personne ne crie Vive le Roi.

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    Dans les livrets programmes de l’Opéra, toujours les informations les plus importantes. Ce jeudi : « Hervé Niquet est Chevalier de l’Ordre National du Mérite et Officier des Arts et Lettres. »

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    Ouf, Louis-Ferdinand Céline l’a échappé belle, inscrit qu’il était sur la liste des célébrations nationales pour deux mille onze. Serge Klarsfeld a protesté et le neveu du Mythe Errant, pusillanime Ministre sarkoziste de la Culture, a fait le reste, ôtant son nom de la liste, lui évitant le déshonneur des honneurs officiels.

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