• Début mai, triste comme chaque année depuis dix-neuf ans

    Trois jolies filles se précipitent vers moi ce jeudi matin premier mai alors que je reviens du Fournil (anciennement la Boulange) de la Croix de Pierre. Elles ont quelque chose à me vendre. Ce brin de muguet que j’offre un peu plus tard à celle venue de Paris pour me voir. Elle en reçoit un autre du patron du Bar des Fleurs où nous buvons une boisson chaude avant d’aller à la maison.

    Le temps est à l’averse. Nous prenons néanmoins l’apéritif sur le banc, dans un jardin plus que jamais laissé à lui-même où prospèrent fleurs fanées et mauvaises herbes. Pour fond sonore, nous avons le bruit des bateaux des Vingt-Quatre Heures Motonautiques. Cette course idiote autour de l’île Lacroix est de moins en moins contestée. Les écolos locaux ne veulent plus sa suppression mais suggèrent son aménagement. « Il faut que l’organisation change de millénaire et décide d’équiper les bateaux de moteurs électriques qui seraient moins bruyants et plus respectueux de l’environnement. », déclarent-ils sur le site 76actu. Ces écologistes d’un nouveau genre semblent ne pas savoir que l’électricité française provient des centrales nucléaires.

    Les gouttes d’eau nous obligent à rentrer. Nous sommes tristes tous les deux qu’entre nous ce ne soit plus ce que c’était. A cette tristesse commune s’ajoute la mienne chaque début de mai, anniversaire de la mort de mon frère Jacques à La Rochelle il y a maintenant dix-neuf ans. Je ne lui en parle pas.

    Tandis qu’elle prépare le repas, je lui demande ce qu’elle veut écouter :

    -Les Frères Jacques, me répond-elle spontanément.

    Ensuite, ce sera Jacques Higelin. Je ne peux m’empêcher de voir un signe à cette double coïncidence. « Ça ne m’a pas effleurée une seconde », m’écrit-elle ce vendredi matin après que je la lui ai fait remarquer.

    *

    De Jacques Perdrial, Chanson Râ, tirée de Poèmes et chansons pour la madone de cuir (Editions Didier-Michel Bidard) :

    nous avions vingt ans

    et pleins d’allégresse

    nous creusions le temps

    à coups de pelles fraîches

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