• Exposition Futurisme au Centre Pompidou

                A Paris, ce mercredi, je remplis le questionnaire nécessaire à l’obtention du passe annuel du Centre Pompidou. La jeune femme tourne vers moi une ouaibe cam à long cou afin de me photographier. Je paie le nécessaire. J’ai maintenant en main la carte magique agrémentée de mon horrible photo. J’en use illico en chenillant jusqu’au sixième étage où l’exposition Le Futurisme m’attend, sous-titrée Une avant-garde explosive.

                Cette avant-garde, toute à la célébration de la technique, des machines, de la vitesse, du sport, ne m’excite guère dans ses réalisations picturales. Le discours provocateur me retient davantage. J’écoute Le Manifeste futuriste de Filippo Tommaso Marinetti déclamé par Jean-Michel Noirey, en suivant le texte original sur le vieux Figaro jauni daté du vingt février mil neuf cent neuf :

                Nous voulons glorifier la guerre - seule hygiène du monde -, le militarisme, le patriotisme , le geste destructeur des anarchistes, les belles idées pour lesquelles on meurt et le mépris de la femme.

                Nous voulons détruire les musées, les bibliothèques, les académies de toute sorte et combattre le moralisme, le féminisme et toutes les autres lâchetés opportunistes et utilitaires.

                L’exposition est centrée sur l’exposition parisienne des peintres futuristes italiens en mil neuf cent douze. Elle démarre par le cubisme et passe par les futuristes français et le Manifeste futuriste contre Montmartre : il faut détruire Montmartre (je m’assois un instant sur un grand canapé noir avec vue sur la capitale, près d’une jeune Japonaise qui dessine la basilique blanchie par le soleil), l’hybridation cubisme-futurisme avec ses Joueurs de football d’Albert Gleizes et son Equipe de Cardiff de Robert Delaunay, la Section d’or avec le Nu descendant l’escalier (numéro deux) de Marcel Duchamp, le cubo-futurisme russe de Kasimir Malevitch, le vorticisme anglais inspiré d’Ezra Pound, avant d’aboutir à l’orphisme et au synchronisme. On y trouve aussi Arrangements critiques, une installation audio vidéo contemporaine de Jeff Mills, pionnier de la musique techno, qui sonorise un peu tout ça.

                Décidément, je n’aime pas cette peinture d’angle aigu. Je préfère les textes. Je prends quelques notes « Jeunes peintres, ne vous frappez pas » proclame la Section d’or qui s’en prend à « l’art dégénéré » des piètres héritiers des maîtres impressionnistes, intéressante formule, qui sera reprise par un autre, plus tard. Je n’oublie pas que Marinetti fut, plus tard également, un rallié à Mussolini. Dans Futurisme et Fascisme (mil neuf cent vingt-quatre), il réunit des comptes-rendus de discours à travers lesquels il présente le Futurisme comme partenaire et précurseur du Fascisme. Il n’en est pas question à Beaubourg, qui s’en tient prudemment aux origines de ce mouvement dit d’avant-garde.

                Une que j’aime bien dans la bande, c’est celle qui est qualifiée de poétesse et se nomme Valentine de Saint-Point, auteure, en réponse à Marinetti, du Manifeste futuriste de la Luxure et du Manifeste de la Femme futuriste. Elle écrit des choses comme ça : Que la femme retrouve sa cruauté et sa violence qui font qu’elle s’acharne sur les vaincus parce qu’ils sont vaincus et aussi Femmes redevenez sublimement injustes, comme toutes les forces de la nature.

                Avant de quitter les lieux, je récolte les flayeurs offerts au visiteurs et visiteuses. L’un d’eux dit : Le chef-d’œuvre doit disparaître avec son auteur. L’immortalité en art est une infamie. C’est un propos futuriste anglais. Non suivi d’effet, semble-t-il.

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