• Expositions Gabriel Orozco et Saâdane Afif au Centre Pompidou

    Forte présence de contrôleurs et de membres de la Sécurité Ferroviaire à la gare de Rouen mercredi matin à l’heure où j’attends un train pour Paris, dont le retard est estimé à dix minutes suite à un mystérieux « problème d’acheminement du personnel ».

    Il arrive huit minutes après l’heure prévue. Je m’installe et commence la lecture du Naufrage de la Méduse, le témoignage de deux rescapés, Alexandre Corréard et Jean-Baptiste Savigny, dans l’édition de poche Folio/Gallimard.

    Dans la préface, Alain Jaubert constate que dans cette histoire « colonialisme, esclavage, traite des nègres, naufrage, mutineries, ivresse, délires, suicides, haine, racismes, misogynie, massacre, lutte des classes, sélection des faibles, cannibalisme enfin, cette sarabande de sauvagerie, de folie et de mort nous fascine au-delà du raisonnable. » et s’interroge : « placés nous-mêmes dans de telles situations, savons-nous vraiment comment nous nous comporterions ? »

    A Paris, je fais le tour des librairies habituelles puis à midi je retrouve celle qui étudie l’architecture intérieure. Direction Charonne, le restaurant Chez Sofiane où l’on nous accueille d’un « Bonjour, comment allez-vous ? ». Nous sommes connus ici et reconnus. Bien que nous partageant seulement un demi pichet de vin rouge, nous voici un peu ivres à la fin du repas et pas moyen d’aller prendre un café au Quatre-Vingt-Seize, le bar libertaire semble définitivement fermé.

    Elle retourne à l’Ecole et je reprends mes pérégrinations. Au Centre Pompidou, je visite l’exposition Gabriel Orozco, un pêle-mêle (photos, sculptures en terre cuite, dessins, collages, objets restructurés et peintures) qui ne m’intéresse guère hormis Four Bicycles (There Is Always One Direction), un assemblage de bicyclettes, et surtout La DS, une voiture découpée en trois parties dans le sens de la longueur dont la partie centrale et le moteur ont été ôtés puis les deux parties restantes rassemblées l’une contre l’autre. Je ferai bien mienne cette voiture à place unique devant et derrière. Le pire dans cette exposition, ce sont les deux faux policiers intervenant à coups de sifflet dès qu’un pied franchit l’une des lignes dessinées au sol, complètement grotesque.

    Dans la salle voisine, je vais voir à quoi ressemble Anthologie de l’humour noir de Sâadane Afif, œuvre qui a valu à son auteur le prix Marcel Duchamp deux mille neuf (j’ignore qui a vendu le nom de Duchamp). C’est un grand cercueil de deux mètres de long en forme de Centre Pompidou, entouré de textes muraux en anglais et en français commentant le travail de l’artiste, parmi lesquels un signé Chloé Delaume, tout cela pas intéressant et pas drôle (pauvre Marcel Duchamp, accessoirement pauvre André Breton).

    Je quitte donc Beaubourg assez rapidement et vais terminer l’après-midi chez Book-Off près de l’Opéra. J’y achète, entre autres, les Lettres et carnets de Hans et Sophie Scholl (Tallandier).

    La région Haute-Normandie me ramène à Rouen dans un train trop climatisé. Je lutte contre le sommeil, aidé par la conversation d’un rouspéteur. Quand passent les contrôleurs, il ne loupe pas l’occasion :

    -Alors, vous allez faire grève pour nous ? leur dit-il ironiquement.

    Il se plaint ensuite de trains arrivés en retard et leur demande de noter ses doléances sur un carnet en leur possession.

    Quand les deux agents des chemins de fer se sont éloignés, l’énervé indique à sa voisine qu’il est père de six enfants et que si on veut une bonne retraite, il faut faire comme lui plutôt que la grève.

    *

    Je viens juste de passer le quintette La Truite sur le Gramophone. Ecouter l’andantino, ça me donne envie d’être une truite. Dans ce morceau de Schubert, on sent et on respire vraiment les brises et les senteurs, on entend crier de joie les oiseaux et la création tout entière. Et la répétition du thème au piano, telle l’eau fraîche, pure, étincelante, oh, quel enchantement. écrivait, le dix-sept février mil neuf cent quarante-trois, la très belle Sophie Scholl, vingt et un ans, membre de la Rose blanche, organisation antihitlérienne allemande. Le lendemain, elle était arrêtée. Quatre jours plus tard, décapitée.

    *

    Jeudi matin, j’achète le Libération du jour, en couverture une photo de Larry Clark interdite au moins de dix-huit ans. Les branlotins n’ont pas le droit de voir d’autres branlotins faire la même chose qu’eux. En revanche, les adultes (comme on dit) ont tout loisir de les regarder, cela au nom de la lutte contre la pédophilie. Ainsi raisonne le socialiste Delanoë, élu Maire de Paris une fois de trop.

    *

    Ce même matin, une manifestation immobile de cheveux gris bloque totalement la rue de la Jeanne, ce sont les adhérent(e)s de l’Union Nationale des Retraités Personnes Agées et ça ne donne pas envie.

    *

    Vie rouennaise : de quoi se plaint, auprès de la maire socialiste Valérie Fourneyron, l’écolo municipal Guillaume Grima ? De n’avoir pu organiser un concours de balcons fleuris.

    (Un Vert aux espaces verts, c’était déjà une brimade.)

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