• La Traviata de Verdi à l’Opéra de Rouen (un spectacle flingué par la Dispute de France Culture)

    Ce jeudi dix-sept mai deux mille douze, Arnaud Laporte de France Culture, le spécialiste des entretiens énamourés avec les comédiens et les comédiennes, présente La Dispute comme chaque soir de la semaine. Il est en compagnie de Marie-Aude Roux du Monde, d’Emmanuel Dupuy, rédacteur en chef de Diapason, et de Vincent Huguet de Marianne pour parler de La Traviata produite par l’Opéra de Rouen.

    C’est Emmanuel Dupuy qui commence :

    « J’ai pas envie d’être méchant. Si on avait vu cet opéra à Paris ou sur une grande scène internationale, on serait peut-être un peu plus sévère, mais il faut relativiser, remettre les choses dans leur contexte. Rouen, c’est un Opéra qui n’a pas beaucoup de moyens mais est quand même capable de présenter une vraie Traviata sans catastrophe. Les spectateurs qui étaient là ce soir-là, qui sont venus à l’Opéra plutôt que rester devant leur télé à regarder Koh-Lanta, ils ont quand même vu une véritable Traviata. »

    Sur cette gentillesse, les quatre évoquent (dans la confusion) la mise en scène signée Claire Servais « où il ne se passe pas grand-chose » et « impossible à dater », puis Vincent Huguet déclare :

    « Franchement c’est pas la mise en scène le problème, on est allés à Rouen pour assister aux débuts de Nathalie Manfrino dans Violetta. (…/…) La réalité, c’est qu’elle est décevante et dès le début hélas, et on peut pas monter Traviata si Violetta n’est pas à la hauteur. C’est pas une mauvaise chanteuse mais il se passe rien, (…/…). Ça suppose une chanteuse qui exprime quelque chose de très fort. »

    « Elle incarne rien » ajoute Marie-Aude Roux qui règle aussi son compte à celui qui chante Alfredo : « Il est particulièrement calamiteux le ténor ».

    Les quatre sont néanmoins d’accord pour trouver de la vertu (comme ils disent) au Chœur accentus et à l’Orchestre bien dirigé par Luciano Acocella puis posent la question : « Est-ce que des Opéras de province qui ont peu de moyens doivent continuer à s’attaquer à de tels chef-d’œuvres ? »

    Ce dimanche après-midi, je suis assis en fond d’orchestre pour y voir et ouïr cette Traviata. Le sujet de conversation autour de moi n’est pas cette émission de France Cul mais l’état de certains fauteuils dont le dossier se couche sur les genoux de qui est assis derrière quand certains y posent le leur. Mon fauteuil personnel tient le coup et est de belle apparence bien que ce soit le Hi Deux.

    Trois actes et deux entractes plus tard, j’applaudis avec les autres cette Traviata provinciale. Il se produit alors pour la première fois à l’Opéra de Rouen une ovation debout. C’est à croire vraiment que les Rouennais regardent trop la télévision, me dis-je en pestant contre cette innovation. J’en profite pour remettre ma veste, pas déçu par celle qui vient de chanter Violetta, même si ce n’est certes pas une grande comédienne, et file vers la sortie.

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    Illustration numéro un du manque de moyens de l’Opéra de Rouen, je lis quelques jours avant la première sur la page Effe Bé de l’illustre maison : « La construction des balcons métalliques de La Traviata a été assurée par Jean-François, Adriano, Christophe, Nicolas et Willy du Centre de Détention les Vignettes de Val-de-Reuil. »

    Je demande en commentaire : « Pour quel salaire ? » Ma question reste sans réponse.

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    Illustration numéro deux, toujours sur Effe Bé : « Les élèves du BTS Métier de la Mode du Lycée Elisa Lemonnier ont réalisé de magnifiques costumes à partir des maquettes utilisées pour les costumes du chœur de La Traviata. »

    Là, inutile de demander combien ils ont été payés.

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    C’était la dernière de cette Traviata rouennaise mais elle sera de nouveau jouée et chantée à l’Opéra Royal du Château de Versailles les premier, deux et trois juin.

    Ces imbéciles de Versaillais pourront donc en ce début de mois faire autre chose que regarder la télévision.

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