• Lisant Scandales! Scandales! Scandales! d'Hélios Azoulay

    J’ai fait bonne pêche récemment au Rêve de l’Escalier, y trouvant successivement (c’est que j’y passe quasiment chaque jour) la réédition complète en deux volumes de la revue Bizarre de John Willie (Taschen), Nicolas Edme Restif de la Bretonne, tentative de biographie signée Daniel Baruch (Fayard), La Vie et les opinions de Tristram Shandy de Laurence Sterne, dans la nouvelle traduction intégrale de Guy Jouvet (Tristram) et le Journal de Jean-Patrick Manchette (Gallimard). Ce n’est pas tout.

    En vitrine, l’autre jour, j’aperçois Scandales ! Scandales ! Scandales ! d’Hélios Azoulay (Lattès), à qui récemment je disais attendre que son livre soit disponible en cette bouquinerie pour l’acheter et le lire.

    -Bon, ce n’est pas très sympa pour Hélios, dis-je à Michaël Féron, il n’aura pas de droits d’auteur.

    -Si son livre est arrivé ici, me répond-il, c’est que quelqu’un l’avait acheté et donc il les a déjà eus.

    -Oui, c’est ce que je me dis pour me déculpabiliser.

    Feuilletant ce livre, rentré chez moi, j’y trouve trace de ce précédent lecteur. En dernière page, celui-ci a écrit au crayon à papier le numéro de téléphone et l’adresse mail d’Hélios ainsi que ceux d’Eric Biville qui semble travailler aux Editions Jean-Claude Lattès, s’y ajoute le numéro du téléphone portatif de je ne sais qui.

    En le lisant, je découvre, de celui qui m’a précédé, toujours au crayon à papier, quelques annotations dans la marge.

    Page vingt-cinq, il fait suivre d’un point d’interrogation jouxté d’un point d’exclamation la formule azoulienne « l’art, c’est la précision du geste », qu’il doit trouver obscure ou contestable.

    Page vingt-six, il souligne le mot rapport dans l’expression « rapport habituellement entretenu entre le spectateur et l’œuvre », je ne vois pas pourquoi.

    Page quarante et une, il entoure le mot hémistiche et lui adjoint un point d’interrogation dans la citation tirée des Mémoires d’Alexandre Dumas « Vous ne trouvez donc pas cet hémistiche dangereux ? », il ne doit plus se souvenir que l’hémistiche est la moitié du vers, n’y voyant que le trait de césure.

    Page soixante et onze, il trace une flèche qui part du mot arrangement dans « Il (André Jolivet) est censé diriger son arrangement de la musique de Lully, pour la mise en scène de Jean Meyer du Bourgeois Gentilhomme. », flèche qui arrive à un point d’interrogation, cela dépasse mes compétences musicales.

    Page quatre-vingt-douze, il entoure le nom de Ribemont-Dessaignes, que, dans une citation des Entretiens avec André Parinaud, André Breton accole à ceux de Tzara et de Picabia pour les qualifier de seuls vrais Dadas, et le surmonte d’un point d’interrogation, il en doute, il a tort.

    Deux autres annotations sans grande importance suivent pages quatre-vingt-dix-neuf et cent cinq, puis plus rien comme si à la moitié du livre mon prédécesseur avait cessé de lire attentivement ou, pis encore, avait cessé de lire pour courir au Rêve de l’Escalier.

    Partager via Gmail Yahoo!