• Marchant sur le quai de la rive droite jusqu’à la zone portuaire internationale de Rouen

    Dimanche matin, avec elle qui me tient la main, après n’avoir rien acheté au marché du Clos Saint-Marc, je rejoins, par un portillon peu visible, le quai bas dévolu aux marcheurs, coureurs et pédaleurs. Un certain temps que nous n’avions pas longé la Seine. Celle-ci est semblable à elle-même, coulant paisiblement et portant sur son dos des bateaux petits et gros.

    Deux d’entre eux attirent nos yeux, un bateau de croisière fluviale immatriculé à Hambourg, dont les baies vitrées des chambres sont une aubaine pour les voyeurs, mais il n’y a que des vieux et des vieilles, et au loin, blanc dans le soleil, un bateau de croisière maritime qui nous fait aller jusqu’à la presqu’île Wellington.

    Pour nous en approcher, nous franchissons plusieurs enclos grillagés dont la porte est restée ouverte et où il est interdit d’entrer. Ce paquebot se nomme le Silver Cloud. Il est immatriculé à Nassau, capitale des Bahamas, paradis fiscal. Nous aimerions voir d’encore plus près l’immeuble flottant dont les appartements ressemblent à ceux des immeubles de Canteleu tels qu’ils apparaissent sur la colline en arrière-fond, aussi visiter les nouveaux bâtiments portuaires devant lequel il est amarré et dont j’ignorais l’existence.

    Une dernière barrière est ouverte. Des panneaux interdissent de franchir en anglais et en français. Nous entrons et sommes arrêtés par deux filles vêtues de noir logées dans une sorte de conteneur vitré.

    L’une nous dit que l’on n’a pas le droit d’entrer.

    -Je sais, lui dis-je, mais j’aurais bien aimé visiter ces bâtiments portuaires payés avec mes impôts.

    -Vous êtes dans une zone portuaire internationale, si vous étiez dans un aéroport vous n’auriez pas le droit d’aller sur les pistes, me répond-elle.

    L’argument est spécieux mais je n’insiste pas. Nous contournons les hauts grillages. Un drapeau américain, planté sur le quai, nous apprend la nationalité des passagers, des vieux et des vieilles. Ce glorieux étendard jouxte le conteneur des sacs poubelles, invisibles du bateau. Je regrette de ne pas avoir mon appareil photo.

    Nous prenons le chemin du retour, apercevant au loin un chien qui fait ses besoins sur la pelouse sans que son attaché à moustache juge utile de ramasser (« Bravo pour la merde du chien » lui crie celle qui m’accompagne) et croisons une bande de coureurs et coureuses à maillots jaunes marqués « Je vais jusqu’au bout de ce que j’entreprends ».

    -C’est aussi vrai pour les assassins, lui fais-je remarquer.

    -Et pour les violeurs d’enfants, me répond-elle.

    En cours de route, il nous vient à l’idée de coller ma photo de l’opération Inside Out de JR sur le socle de la statue de Corneille devant l’Opéra, ce qui à la réflexion n’en est pas forcément une bonne.

    *

    Dimanche soir, elle m’appelle des hauteurs de Rouen pour me dire que le prochain bus est dans quarante-cinq minutes. Elle décide de venir à pied et ne met que quarante minutes pour aller de Châtelet à la Cathédrale. Pas mal, surtout qu’elle s’est arrêtée en chemin pour aider un clochard vautré sur la route à se relever. Les automobilistes se contentaient de le contourner.

    *

    Mouette : variété urbaine de coq. Tous les matins, réveillé par les piaillements de ce volatile.

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