• Trop jeunes pour mourir de Park Jin-pyo, Road Movie de Kim In-shik et Fantasmes de Jang Sun-woo à l’Agora du Cinéma Coréen de Rouen

    Je l’échappe belle en longeant la Seine jeudi après-midi en direction du cinéma Pathé, une bande de mouettes me survole, qui chient à qui mieux mieux, maculant les quais de taches blanches, m’épargnant heureusement. Propre sur moi, je me présente au guichet de l’Agora du Cinéma Coréen où l’on me donne trois entrées pour les trois films à venir, trois sujets Tabou.

    Trop jeunes pour mourir de Park Jin-pyo (deux mille deux) est déconseillé aux moins de seize ans. On y montre explicitement qu’à soixante-quinze ans en Corée (comme ailleurs), on n’est pas forcément des retraités du sexe et de la vie en général. C’est un film un peu maladroit entre la fiction et le documentaire, que je trouve intéressant et qui est raccord (comme au dit au cinéma) avec ma lecture d’entre deux films : les Carnets d’un vieil amoureux de Marcel Mathiot (lui a quatre-vingt dix ans et ça marche fort).

    Road Movie de Kim In-shik (deux mille deux) est pour tout public et raconte l’errance de deux sans-abri (un ancien traideur quitté par sa femme et un alpiniste homosexuel tombé de sa montagne). On s’y sodomise à peine et on y échappe à tellement de morts possibles que très vite mon intérêt se relâche. Comment croire à une histoire dont l’un des personnages devrait être mort depuis longtemps. Un incident vient relancer mon attention. Le dévédé coince vers la fin au dam des étudiant(e)s qui se précipitent dans la cabine de projection. Pas moyen de le remettre sur la route. Ce Road Movie se termine en impasse, ce qui amène, un peu plus tard, Kyu-young Beaumont à faire un plaidoyer pour ses étudiant(e)s qui travaillent pendant de longs mois notamment à l’élaboration des sous-titrages et qui n’y sont pour rien, la faute à Pathé.

    Fantasmes de Jang Sun-woo (mil neuf cent quatre-vingt-dix neuf) est interdit aux moins de seize ans. On y voit une lycéenne se faire dépuceler à sa demande par un sculpteur quadragénaire (premier trou, deuxième, trou, troisième trou) puis leurs rencontres successives qui laissent de plus en plus de traces cuisantes sur leurs corps, celui d’elle d’abord, celui de lui ensuite, jusqu’à l’envol de la demoiselle ayant un peu grandi. C’est un film à la construction intéressante. Kyu-young Beaumont apparaît pendant le générique de fin et nous dit qu’il ne faut pas compter sur elle pour le commenter. Elle n’a pas pu le voir en entier parce qu’on y trouve des choses dégoûtantes. En revanche, elle a dans son sac une bouteille de soju, cet alcool coréen qui titre dans les vingt degrés, qu’elle nous invite à boire avec elle, Ce que nous faisons dans l’interminable couloir du cinéma Pathé, mangeant aussi quelques makis, puis elle inscrit sur un petit cahier les noms de celles et ceux qui veulent participer à la soirée de clôture.

    Il est presque minuit quand je rentre par les quais en compagnie d’un que je croise souvent et d’une amie à lui. Nous nous séparons en bas du boulevard des Belges et je continue par les rues du centre de la ville. Place Jacques-Lelieur, je découvre un billet de vingt euros. Cet objet trouvé sera pour celle qui travaille dur à Paris pendant que je vais au cinéma et que l’économie européenne avance doucement vers ce qui sera peut-être une catastrophe.

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    Point de blocage de la ville par les camions des forains de la Saint-Romain, il aura suffit cette fois d’une petite manifestation pédestre pour que Madame le Maire de Rouen renonce à son projet d’exiler la fête sur la presqu’île de Waddington.

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