• Un dimanche complètement japonais

    Deux bons achats de livres cette semaine, d’abord chez Joseph Trotta puis au Rêve de l’Escalier, deux ouvrages qu’après un bon repas dominical, je feuillette attentivement avec celle qui me rejoint le ouiquennede.

    Le premier, publié en mil neuf cent soixante-dix-sept pour la Bibliothèque des Arts de Paris par l’Office du Livre de Fribourg s’intitule Le Chant de l’oreiller et est sous-titré L’Art d’aimer au Japon.

    On y voit tout ce qui a pu se faire en matière d’estampes érotiques et on y lit de larges extraits de la littérature de ce charmant pays, comme ce conte anonyme tiré du recueil Fujikusô :

    Au premier étage, la sœur fait la sieste. Son frère la regarde ; si charmé par le spectacle, il ne peut empêcher son « instrument » de durcir comme du bois. En vain essaie-t-il de l’apaiser ; il ne perd en rien sa vigueur.

    Incapable de se retenir, il monte à califourchon sur sa sœur et, doucement, fait entrer son « instrument ». Le plaisir est si grand qu’il le pousse jusqu’au fond.

    -Le diable t’emporte ! s’écrie la sœur qui se réveille. Sais-tu ce que tu fais ?

    Tout bouleversé, son frère répond :

    -Excuse-moi. Je me retire tout de suite.

    Mais, feignant de ne pas l’entendre, elle lui dit :

    -Le Ciel te punira davantage, si tu te retires.

    Un avertissement précise que la vente de ce livre était interdite aux mineurs de moins de vingt et un ans. Un autre, bien réjouissant, ajoute que : « Cet ouvrage est destiné exclusivement aux lecteurs intéressés pour des raisons scientifiques ou artistiques et connus comme tels par leur libraire. »

    Le second, publié en mil neuf cent quatre-vingt-dix par Albin Michel, achetable par n’importe qui, quel que soit son âge, en l'absence de tout intérêt scientifique ou artistique, sans être le moins du monde connu de son libraire, est Japon intime, recueil de dessins de Toshio Saeki.

    Lequel est présenté en quatrième de couverture comme le digne descendant des maîtres anciens de l’estampe, fous de dessins cruels, grotesques et lubriques. De l’écolière possédée par l’esprit-renard au vieillard à la tête de phallus en passant par la nonne vicieuse, il y en a pour tous les fantasmes.

    Jean-Luc Fromental précise dans sa préface qu’après l’euphorie des années soixante qui avait placé Toshio Saeki sur le devant de la scène, « le retour du bâton puritain, qui frappe au Japon comme ailleurs, l’a rejeté dans l’ombre. »

    Les livres refermés, c’est sous la couette qui se poursuit notre dimanche japonais.

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