• Un samedi à Dieppe la non endormie

    Pas question de rester à Rouen ce ouiquennede, elle comme moi nous avons besoin de prendre l’air et pour ça, au matin de ce samedi, nous prenons la route de Dieppe sous un ciel prometteur (comme on dit). Après un crochet par Pourville-sur-Mer, je me gare en haut de la falaise, côté château, d’où l’on a si belle vue sur la ville et la mer.

    Après la descente, nous abordons Dieppe par son marché. Il est tôt mais la foule est déjà aux achats. Nous entrons au Tout Va Bien pour une boisson chaude. La maison s’est considérablement agrandie depuis la dernière fois par l’achat des deux commerces voisins. Il en résulte pour l’intérieur du bâtiment trois styles différents et deux marches à descendre ou à monter. Avant onze heures, le café est à un euro mais inutile d’espérer un verre d’eau du mal aimable serveur.

    Sortis de là, nous humons les poissons et les crustacés du marché des pêcheurs locaux près du village de tentes installé pour l’arrivée de la course en solitaire du Figaro, puis sous le soleil, après avoir retenu une table en terrasse au Galion, gagnons le bord de la terre où stationnent les véhicules militaires des nostalgiques de la Deuxième Guerre Mondiale commémorant le débarquement raté des Canadiens en quarante-deux. Plutôt que de mettre le pied sur la plage, nous préférons nous asseoir sur un banc d’où nous observons le défilé des familles. Le chorte à fleurs est de sortie. Tous les personnages de Duane Hanson sont là et quelques autres aussi qui valent la photo que nous ne faisons pas.

    A midi, avant que tous les restaurants du bord de port soient pris d’assaut, nous sommes de retour au Galion et les seuls à avoir droit au menu à onze euros quatre-vingt-dix non servi le samedi (la pancarte encore présente sur le trottoir lors de la réservation nous l’a autorisé) : salade de haddock et de hareng mariné, lieu et saumon, pour dessert un tiramisu qui n’en a que le nom et du vin blanc en pichet plutôt cher, pas de quoi se plaindre en définitive. Ce n’est pas l’avis d’une femme sortant de cette auberge. Elle déclare à celles et ceux qui attendent leur tour sur le trottoir que c’est dégueulasse.

    Nous allons prendre le café de l’autre côté, dans le quartier du Pollet, au Mieux Ici Qu’En Face, lequel n’usurpe pas son nom, observant de la terrasse le mouvement des bateaux dans le port dont l’arrivée du ferry d’Angleterre. Encouragés par le beau temps, nous grimpons sur la falaise d’où nous parviennent les cris des mouettes dans le ciel et des perruches dans la nacelle du plus haut manège de la fête foraine. L’église Notre-Dame-de-Bonsecours nous ouvre ses portes. Elle sert de mémorial à ceux qui ont péri en mer « Vous qui entrez ici… pensez à ceux dont les noms sont gravés sur ces murs ». Ce que nous faisons, elle et moi, avant de redescendre et de nous désaltérer de nouveau à la terrasse du Mieux Ici Qu’En Face tandis que le pont tournant laisse passer un cargo bleu.

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    Les soucis du commerce rouennais : rue du Père Adam la Galerie Etre n’est plus et le Jardin d’Eglantine est fané définitivement.

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    Ce que j’entends dans les rues : « Chaleur en avril mai, pluie depuis le quinze juillet, on n’y comprend rien ».

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    Les mendiant(e)s en ville, celles et ceux qui apparaissent, celles et ceux qui disparaissent, parfois un(e) revenant(e), comme l’un que je voyais autrefois rue de la Champmeslé, réapparu rue Ganterie. Sur son carton « Je sors de prison, aidez moi ». Ça a le mérite de la franchise et ça explique son absence.

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