• Vivement que l'école reprenne

                Vendredi fin d’après-midi, avant d’aller avec elle ramasser des cartons dans les rues de Rouen, je l’invite à boire quelque chose à la brasserie Paul, établissement que je fréquente peu. Il y a affluence, notamment d’enfants, sans doute en raison de la proximité du marché de Noël et de ses activités sportives pour moutard(e)s. Cela nous évite d’entendre le piano mécanique mais nous exaspère et nous incite à la moquerie.

                A côté de nous, une famille s’accroît brusquement. Deux femmes dans la trentaine, aux traits fatigués, sans doute sœurs, avec trois moutard(e)s, sont rejointes par un homme du même âge, mari de l’une et beau-frère de l’autre, accompagné de quatre autres moutard(e)s dont une grande. Un couple de gens âgés, submergé, leur cède sa table et prend la fuite. Après un grand mouvement de chaises, toute la famille est enfin posée.

                Il est quasiment dix-huit heures mais c’est l’heure du goûter avec crêpes dégoulinant de chocolat. Le calme relatif ne dure pas longtemps. La marmaille grouille bientôt entre les chaises. Au fur et à mesure que le bruit et l’agitation s’accroissent, les deux mères se tassent sur leurs chaises. Elles ne savent plus comment contenir leur descendance. Lui, comme le font si bien les mecs, regarde ailleurs. Je devine que tous les trois n’ont qu’une idée en tête : Vivement que l’école reprenne.

                Je songe aux propos du philosophe Marcel Gauchet, l’autre matin sur France Culture. Il parlait du rejet de l’école par certains enfants, de plus en plus nombreux. D’après lui, cela s’explique par l’attitude de leurs parents qui les y déposent le plus tôt possible pour les y reprendre le plus tard possible, une attitude que l’enfant interprète en ces termes :

                -Je t’aime bien mais tu m’emmerdes. Je préfère que ce soit d’autres que moi qui s’occupent de toi. J’ai autre chose à faire de plus intéressant.

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