• A la Lesbian and Gay Pride de Rouen

    Le temps est encore pire que le matin, ce samedi, à l’heure où avec celle qui me tient la main j’attends que le défilé de la Lesbian and Gay Pride de Rouen veuille bien franchir le pont Corneille. Nous sommes à l’abri du vent en bas de la rue de la Rép. Près de nous cinq branlotin(e)s avec des appareils photo luxueux, assis sur le trottoir, attendent aussi. Au carrefour, trois policiers municipaux font de même. C’est long. Devait partir de Saint-Sever à quatorze heures, ce monde gay lesbi trans bi hétéro, mais est encore plus en retard que l’an dernier.

    Enfin, après je ne sais combien de quarts d’heure, finissent par apparaître les drapeaux dans le vent, moins nombreux que l’année précédente. Faut dire que cette manifestation a failli ne pas être. Elle ne s’est faite, en dernière minute, que par l’initiative de deux filles et d’un garçon qui se sont dit : C’est pas possible qu’il n’y ait rien à Rouen.

    Nous prenons place dans le cortège. Elle aimerait bien récupérer un autocollant arc-en-ciel mais il n’y a plus, semble-t-il. Il ne manque pas en revanche de drapeaux du Parti Communiste. J’en aperçois également un du Parti Socialiste et un du Parti de Gauche. Je lui fais remarquer que la Lesbian and Gay Pride est l’un des endroits où l’on peut constater qu’il y a parfois une différence entre la gauche et la droite, cette dernière n’y étant pas.

    Celle qui m’accompagne irait bien derrière le deuxième char mais ça bouge trop pour moi. Nous restons au cul du premier où le son est mauvais, pas trop près des politiques. Elle cherche des jolies filles et n’en trouve pas beaucoup.

    Le cortège, tranquillement encadré par quelques policiers municipaux, arrive devant la Mairie. On tourne à gauche et par la rue du Canuet nous rejoignons la rue de la Jeanne. Sur les trottoirs, autochtones et touristes nous considèrent sans montrer le fond de leur pensée. Tout à coup, la quinze ans qui marche devant nous devient toute rouge puis met un doigt sur sa bouche, implorant du regard un garçon assis devant le Palais de Justice, son frère sans doute (ne le dis pas à maman que tu m’as vue ici).

    Au carrefour avec la rue du Gros, le cortège est coupé en deux par le petit train des touristes puis un garçon travesti dit au micro de quel monde il rêve et comme on n’entend pas ce qu’il dit ça m’arrange. En revanche, je ne peux qu’ouïr la fille qui ensuite hurle :

    -On fait un sitigne, tout le monde s’assoit.

    Pas envie d’obéir, je reste debout, celle qui est avec moi aussi, ainsi que quelques fainéant(e)s de jeunes.

    -Tout le monde assis, beugle l’apprentie dictatrice, sans plus de succès.

    Nous repartons dans le froid, empruntant la voie de Teor vers la Cathédrale et là, à notre surprise et à celle des policiers, le défilé vient s’écraser contre le mur en bas de la place de la Calende, endroit désert où souffle un vent d’enfer.

    -D’habitude, ils montent sur le parvis, dit l’un des policiers à son collègue.

    Oui, cette année c’est plutôt raté, nous disons-nous alors que tombent les premières gouttes de pluie. Nous filons, utilisant la Cathédrale comme raccourci.

    *

    Un peu plus tard, nous sommes à l’Ecole des Beaux-Arts où elle photographie l’installation (peintures et miroirs cassés) de Lori Hersberger. Je demande à la gardienne si les touristes entrent ici. Elle me répond que non, sauf deux qui croyant à un acte de vandalisme se sont précipités à l’intérieur  pour lui demander si tout allait bien.

    *

    A propos de reflet, je me demande quel est le miroir de l’autre, l’équipe de foute de la France ou le gouvernement de la France ? Difficile de savoir qui copie sur qui.

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