• A Paris, le temps d'un après-midi avec elle, de Saint-Michel à Saint-Michel

    Celle pour qui je fais le voyage à Paris ce mercredi me rejoint à midi place Saint-Michel. Elle en a plein le dos de ses révisions de Bétéhesse et peu s’en faut qu’elle ne marche pliée en deux. Je ne peux malheureusement pas lui faire le massage nécessaire.

    Dès que nous sommes installés à la terrasse du restaurant Tokyotori, rue Monsieur-le-Prince, elle tente de diminuer la douleur à l’aide d’une pilule médicamenteuse et du vin blanc qui accompagne notre menu sushi sashimi maki. Un petit verre de saké offert par la maison et nous rejoignons la libraire Gibert où trois livres soldés m’intéressent, publiés chez Hazan dans la collection Hypercontemporain, des monographies consacrées à Jeef Koons, Marlene Dumas et Maurizio Cattelan.

    L’achat fait, nous gagnons le jardin du Luxembourg. Un couple d’une soixantaine d’années longe les grilles. L’homme porte sur son dos une pancarte invitant ses contemporains à se rapprocher d’un nommé Jésus. Ignorant son conseil, nous nous asseyons au soleil, dans deux fauteuils métalliques.

    Derrière nous, une chanson en italien se fait entendre et nous amène à nous retourner de conserve. Un photographe est là, qui appuie sur son déclencheur.

    -Je suis le chanteur photographe de l’amour à Paris, nous dit-il. Merci pour la photo.

    Le chanteur photographe vient nous serrer la main, nous remet sa carte et nous promet, s’il devient riche grâce à notre photo, la moitié du pactole. Il s’appelle Giuseppe Botta et nous l’entendons chanter pendant un moment à la recherche d’autres amoureux.

    Après qu’elle a fumé je ne sais combien de cigarettes, je lui propose de sortir du côté de la rue de Fleurus. Chez un libraire d’ancien, je demande à quel numéro vivait Gertrude Stein. C’est au vingt-sept, un bel immeuble bourgeois dont nous apercevons le jardin à travers les portes. Un des habitants arrive, qui nous demande si nous voulons visiter. Nous entrons avec lui. C’est là que vivait Gertrude Stein, nous dit-il en montrant l’appartement du rez-de-chaussée derrière le jardin.

    Son mal de dos, la chaleur orageuse qui m’indispose, nous invitent à un nouvel arrêt, rue de l’Université, près de la faculté de Médecine, au café du Caducée.

    Tandis qu’elle révise ses cours d’Histoire de l’art, je lis Vivre dans le feu, qui regroupe extraits des carnets et lettres de l’exaltée Marina Tsvetaeva. Je retiens ceci …rien n’apprendra jamais aux Russes à économiser l’argent. Le jour où on le touche - pique-niques, ripaille, une semaine plus tard – air songeur. et cela Je viendrai pour deux semaines environ. Je pense que c’est un délai suffisant pour se fâcher avec tous ses anciens amis et s’en faire de nouveaux.

    Elle me récite ensuite tout ce qu’elle vient de mémoriser sur Buckminster Fuller et ses dômes géodésiques et on y va.

    Sur le quai de Seine, alors que nous sommes assis sur un banc de pierre, l’orage s’annonce. Quelques gouttes que l’on affronte sous le parapluie, puis l’averse que nous devons fuir. Réfugiés sous une avancée de pierre au pied du pont Saint-Michel, nous assistons, à sa grande joie, au déchaînement climatique, tandis qu’impassiblement passent les bateaux-mouches et le temps, ce qui l’oblige à regagner sa chambre chez la très vieille dame.

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