• Au vide grenier d'Appeville-dit-Annebault

    Samedi matin, seul, je renonce au vide grenier du Manoir (Eure), il pleut. Dimanche matin, avec celle qui me tient la main, nouveau renoncement, pas possible d’aller à Clères (Seine-Maritime) sous une telle pluie. Après un rapide tour de marché, nous choisissons de visiter les estaminets du Clos Saint-Marc, passant du café thé croissants au kir sans cacahuètes, car « à moins le quart, on change de bar ». Lundi, c’est encore Pâques et cela va mieux côté ciel.

    Dès potron-minet, nous sommes sur la route et arrivons suffisamment tôt à Appeville-dit-Annebault, près de Montfort-sur-Risle (Eure), pour trouver une place dans le parquigne à l’entrée du village. On nous promet là quatre cent cinquante exposant(e)s.

    Il y en a sans doute moins et pas de la première qualité, beaucoup de cochonneries à vendre chez les particuliers et les professionnel(le)s. On semble pauvres dans le coin. Cela se voit dans l’habillement et s’entend dans les conversations. Que de haine dans la bouche des locaux, me fait remarquer celle qui m’accompagne. On n’entend que femmes ou hommes disant du mal d’autrui « Untel ce connard », « Unetelle cette salope ». Je cherche des livres et elle cherche une tasse pour boire son thé à l’école, facile de trouver la tasse.

    Je repère quand même un livre, une monographie consacrée au photographe François Kollar, sous-titrée Le choix de l'esthétique, due à Françoise Denoiyelle et publiée en mil neuf cent quatre-vingt-quinze à La Manufacture, que je suis heureux de faire mienne pour un euro cinquante.

    Elle craquerait bien pour un numéro de Charlie Hebdo de la bonne époque : La Sainte Vierge violée par les Rois Mages (« Ils étaient trois dont un Noir » pleurniche la mère de Jesus), deux euros, mais c’est tout ce qui lui reste dans le porte-monnaie.

    Nous allons voir l’église entourée d’un cimetière assez désolé, notons pour une autre fois le restaurant routier qui vient d’ouvrir dans le village, puis elle me suggère de passer par Le Bec-Hellouin avant de rentrer.

    Aussitôt dit, aussitôt fait, (comme dit madame Michu). Nous arrivons dans un village guère animé (où sont les Pâques que j’ai connues quand je vivais ici) et jouissons de l’envolée des cloches louées posées sur le sol près du magasin de l’Abbaye que nous allons écouter de près pour en prendre plein les oreilles, puis jetons un œil (comme on dit) à l’intérieur de l’église où l’on se prépare à la messe, pas d’espoir que mon ami moine soit disponible, étant requis comme tous pour la cérémonie.

    Quand nous sortons de l’Abbaye y arrivent les religieuses du Monastère Sainte-Françoise-Romaine dans leur bus.

    -J’ai déjà vu des cars de Céhéresses, me dit-elle, mais un car de bonnes sœurs, ça c’est la première fois.

    *

    Dimanche matin au Clos Saint-Marc, une courageuse bouquiniste s’installe malgré la pluie.

    -Passe-moi la caisse d’amour, mon cœur, dit-elle à sa fille.

    -La caisse d’amour ?

    -Ben oui, me répond-elle, les livres Harlequin.

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