• Aux vide greniers de Saint-Saire et de Dieppe (avec déjeuner à L’Espérance)

    Dimanche tôt, le soleil pas encore levé, je suis sur la route qui mène à Neufchâtel-en-Bray. Arrivé là, je demande à un vieil autochtone promenant ses bras derrière son dos la route de Saint-Saire. C’est à droite au feu. Je me gare à l’entrée du village près d’un ruisseau et d’une ancienne voie de chemin de fer reconvertie en piste cyclable.

    Jamais venu à Saint-Saire, je découvre un joli endroit. Après être passé devant l’ancienne gare devenue restaurant à l’air attrayant, j’entre dans le pré où est installée une partie des exposant(e)s du vide grenier puis remonte les rues bordées de maisons assez cossues où sont la plupart des vendeurs et vendeuses, nombreux, plus de trois cents dit-on, dommage qu’il y ait si peu de livres.

    Tandis qu’une montgolfière traverse paisiblement le ciel bleu, je refais le circuit de ce vide grenier des mieux organisés. Des toilettes sont ouvertes en divers endroits, même au bout de la route, plus loin que le cimetière, comme le constate avec surprise une dame du coin « y’a des cabinets là-haut, y zont mis un cabanon ». Une autre dame se désole de ne pas trouver ce qu’elle cherche dans toute cette marchandise « j’aurais dû venir plus tôt, je savais pas que ça ouvrait si tôt. »

    Arrivé au bout de l’autre route, je fais demi-tour et passe devant une voiture contre laquelle sont appuyés deux hommes juste au moment où son toit ouvrant explose à la stupéfaction générale. Le verre en petits débris choit sur les sièges. Les deux hommes regardent le ciel comme si Dieu venait de jeter un caillou. On finit par accuser le soleil « pourtant il fait pas encore chaud ». J’enlève néanmoins ma veste un peu plus loin et rejoins ma voiture sans avoir trouvé le livre de mes rêves.

    Direction Dieppe où se tient un autre vide grenier sur la vaste pelouse bordant la plage. La route est belle et tranquille, que je ne connais pas. Je passe devant le château de Ménières-en-Bray où se cache un Lycée Agricole puis devant une très belle ferme à vendre, atteins Dieppe par une entrée de ville salie de panneaux publicitaires. Je me gare sur le port devant le restaurant L’Espérance, demande à l’aimable serveuse que j’y aperçois si c’est gratuit le dimanche, le stationnement. Ça l’est. Je rejoins le bord de mer. Le vide grenier est emprisonné derrière des barrières métalliques. Quand j’en ai trouvé l’entrée, je parcours ses allées encombrées de baguenaudeuses et de baguenaudeurs. On lit ici mais pas les livres de mon goût.

    N’ayant pas envie de revoir Rouen trop vite, je choisis L’Espérance pour déjeuner, où l’on m’installe dans une deuxième salle située à l’arrière. Ici le personnel est cordial et les moules marinières avec frites de la maison sont à six euros quatre-vingts, le quart de sauvignon à deux euros quatre-vingts. La clientèle est nombreuse et semble droit venue de la Somme ou du Pas-de-Calais.

    -Tu vas prendre un dessert ? demande une dame à mise en pli à son mari à trop grande chemise à carreaux façon torchon.

    Il lui dit que non.

    -Quand on mange des moules frites, on n’a plus faim, ajoute-t-il.

    Elle se le tient pour dit. Pour ma part, je commande une coupe normande (quatre euros quatre-vingt-dix). Le café, je le prends un peu plus tard au Pollet, après avoir passé le pont basculant et le pont tournant, à la terrasse du Mieux ici qu’en face, qui mérite son nom, où il ne coûte qu’un euro vingt. Le patron est cordial, la vue sur le port, il ne manque que celle avec qui j’étais ici la dernière fois que j’y suis venu.

    *

    Saint-Saire a son inconnu célèbre (ou son célèbre inconnu). Il est au cimetière. Une plaque à l’entrée chante sa gloire : « Le Docteur François Merry Delabost né en 1836 à Saint-Saire, il fut médecin-chef des prisons de Rouen. C’est en 1872 qu’il inventa la douche afin que les prisonniers aient une meilleure hygiène. Il mourut en 1918, après une carrière exceptionnelle et fut inhumé dans le cimetière de Saint-Saire. »

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