• Battan l’Otto, Blood Red Shoes, Beat Torrent et Popof aux Terrasses du Jeudi rouennaises

    Une soirée en deux temps pour l’ouverture des Terrasses du Jeudi, ce premier juillet, j’opte d’abord sans hésitation pour la chansonnette italienne de Battan l’Otto, pas du tout attiré par le chanteur Boule, ni par le hip-hop d’Art District, ni par le jazz manouche de Décembre 52, ni par le pop/rock de MoOt.

    Je traverse donc la Seine pour rejoindre le café de la Rotonde, place des Emmurées, où j’arrive un peu avant vingt heures. J’y trouve une table libre et bois un diabolo menthe en écoutant la chanteuse et ses deux musiciens. Je n’entends pas l’italien mais je vois bien qu’il s’agit d’amour, de vie quotidienne difficile et de révolution, notamment avec Bella Ciao et Avanti Popolo, plus une petite incursion en français « Dansons la Ravachole, vive le son de l’explosion ». C’est un bon début.

    A l’issue, je rejoins les quais de la Seine entre les ponts Boieldieu et Jeanne d’Arc et me poste sur celui du haut pour considérer celui du bas. Là se tient le gros concert de deuxième partie. La foule s’y amasse, surtout composée de celles et ceux qui en ont terminé avec l’école et les examens. Il faut pour cela franchir le barrage du vigile qui regarde dans les sacs. Des petits malins envoient un éclaireur sans sac sur le quai bas puis, du quai haut, jettent les sacs dans ses bras avant de franchir le filtrage à leur tour. Un pas malin se fait repérer quai haut avec une bouteille à la main que deux fiers Céhéresses l’obligent à vider dans le caniveau. L’alcool n’est pas bienvenu à l’apéro géant autorisé par le Préfet.

    De mon perchoir, j’ai bonne vue sur l’ensemble des spectatrices et spectateurs, sur la scène, sur le pont Boieldieu rehaussé de Camille, l’installation d’Arne Quinze, sur la Cathédrale, sur le coucher de soleil du côté de Canteleu. Une estrade entourée de grilles, accessible par un plan incliné, est destinée aux handicapé(e)s, une façon de réinventer la ségrégation en voulant faire bien. A côté, la Protection Civile a posé sur le sol des civières pour les futur(e)s blessé(e)s et évanouillé(e)s.

    La première à grimper sur scène est Valérie Fourneyron, Maire de Rouen : « Bonsoir, ouais ! Les Terrasses du Jeudi, ouais ! Le dixième anniversaire, ouais ! Rouen-sur-Mer, ouais ! Samedi soir, un Son et Lumière sur la construction là-bas, ouais ! Je vous laisse avec Blood Red Shoes, Beat Torrent et Popof, ouais ! » Ce n’est pas une bonne oratrice et puis avec les branlotin(e)s à quoi bon faire des phrases.

    Blood Red Shoes sont deux, une fille et un garçon. C’est la fille qui chante. Ça me plait assez. Je ne vois pas à quoi ressemblent l’une et l’autre car j’ai le soleil dans les yeux et je suis loin, n’ayant pas envie d’avoir mal aux oreilles. D’autres qui trouvent que c’est fort, ce sont les touristes du bateau de croisière amarré rive droite, finie la soirée tranquille sur le pont. Les installateurs de Camille se font remarquer en se perchant haut au moyen de leurs grues à cou de girafe. Deux canots de sécurité patrouillent sur la Seine attendant qu’on y tombe. Par le pont Jeanne-d’Arc arrive en flux continu de nouveaux adeptes des musiques actuelles. Aucun(e) handicapé(e) n’utilise la plate-forme pour handicapé(e)s.

     La nuit commence à tomber quand c’est le tour de Beat Torrent, deux garçons didjays qui savent répéter « Ça va Rouen ?  » et « Faites du bruit ». Devant des images qui bougent vite, ils font des trucs avec leurs mains. D’où je suis, loin, cela me rappelle Charlie Chaplin à la chaîne dans Les Temps Modernes. Je ne peux pas dire que je n’aime pas, ni que j’aime.

    Quand ils ont fini, une partie du public reflue. C’est peut-être qu’il commence à faire tard ou que la suite ne les intéresse pas. Cette suite s’appelle Popof, lequel fait dans la musique dite electro. Il n’y a quasiment rien à voir, que des projecteurs hystériques qui balaient la nuit. Je préfère regarder Vénus et en ai bientôt assez.

    Pour rentrer, je passe entre deux Céhéresses dont l’un joue avec son bâton et, le pont Boieldieu étant interdit, fais le détour par le pont Corneille. De chez moi, fenêtre ouverte, je n’entends que la basse boum-boumant du dénommé Popof. Les murs épais de la Cathédrale et de l’Archevêché sont une bénédiction.

    *

    Juin s’est achevé sans que Laurent Fabius n’annonce comme il était prévu le programme d’ouverture du Cent Six, la Salle des Musiques Actuelles de Rouen. Même un gars pas du bâtiment comme moi avait bien vu lors de la visite du chantier que ce ne serait pas prêt à la date arrêtée pour cela, c'est-à-dire en novembre.

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