• Comme une lettre à la Poste

                Ils n’en veulent plus de mes livres les bouquinistes rouennais, trop de stock me disent-ils. Certains ne pensent d’ailleurs plus qu’à une chose : vendre leurs fonds à un plus téméraire ou à un plus naïf qu’eux et se consacrer au public plus dépensier de la cartophilie ou de la bibliophilie.

                Me voici donc condamné à la vente directe, ce qui ne peut que nuire à leur profession, une annonce sur ma porte pour les livres en édition de poche et une vitrine sur Internet pour ceux en édition grand format.

                Cela me vaut d’être à la Poste principale pour affranchir un envoi en direction d’un acheteur de Grenoble. Il s’agit de Traduit du silence de Joë Bousquet dans un bel emballage fait par mes soins sur lequel j’ai collé une étiquette « Lettre » pour que cela me coûte moins cher.

                Des deux pèse-lettres à affranchissement automatique, l’un est marqué en panne et l’autre indique qu’il n’accepte pas le paiement par pièces. Jamais vu ces deux appareils simultanément en état de marche, les deux en panne c’est bien ma veine.

                Suis contraint de me mettre dans la file d’attente heureusement pas très longue. Quand mon tour arrive, la guichetière s’offusque :

                -Ce n’est pas une lettre, c’est un colis.

                -Si, lui dis-je, c’est une grooossse lettre.

                Elle n’insiste pas. Vraiment de quoi se mêle cette employée ? Ce genre de remarque déplaisante et mesquine, jamais une machine ne se le permet avec moi. C’est pourquoi je préfère leur fréquentation à celle des humains.

    Partager via Gmail Yahoo!