• Concert Andreï Korobeinikov et Dmitri Makhtin (Sonates de Beethoven) à l’Opéra de Rouen

    Ce mardi douze février, je suis en corbeille à l’Opéra de Rouen, assez bien placé pour espérer voir les doigts du pianiste Andreï Korobeinikov. Celui-ci, avant de jouer, lit un texte en français, dans lequel il explique que le piano a un jeu mécanique, que le violon qui l’accompagnera lui donnera une voix humaine, et même une âme. Ce point de vue me semble parfaitement russe. Il va à l’encontre de celui de certains musicologues voulant que la musique se suffise à elle-même, qu’elle soit dégagée de l’émotion. Pour illustrer ou démentir ses propos, comme l’a finement remarqué l’une de mes voisines de derrière : « Que du Beethoven ! ».

    Andreï Korobeinikov rapporte dans les coulisses le siège de la tourneuse de page dont il n’a pas besoin. Il attaque sans partition la Sonate numéro vingt-huit. Personnellement, je trouve que le piano seul c’est délectable quand celui qui en joue est bourré de talent (sorti à dix-neuf ans du Conservatoire de Moscou avec le titre de Meilleur musicien de la décennie, il a aussi un diplôme d’avocat de l’Université Européenne de Droit de Moscou, obtenu à dix-sept ans, d’où peut-être sa plaidoirie pour le violon).

    Celui-ci arrive pour la suite, la Sonate numéro dix, ainsi que la tourneuse de page dont on a réinstallé le siège. Dmitri Makhtin est entré à six ans au Conservatoire pour enfants surdoués, il a été lui aussi moult fois récompensé. Le duo est parfaitement huilé et fort applaudi.

    « Quelle merveille ! Oh, comme c’est beau ! » entends-je à l’entracte. L’une de mes connaissances à qui je fais remarquer cette belle efficacité, me répond : « Les Russes, ça vous envahit la Pologne en deux jours. »

    A la reprise, c’est d’abord seul et sans partition qu’Andreï Korobeinikov joue la Sonate numéro huit suivie de l’Andante favori puis, en compagnie de Dmitri Makhtin, il interprète la Sonate numéro sept. Cela vaut de nombreux applaudissements aux deux musiciens qui saluent modestement puis bissent le mouvement le plus populaire de la dernière sonate. Ma vieille voisine de droite se lève pour sortir avant la fin des nouveaux applaudissements. Je la laisse passer en maugréant. Les deux musiciens n’en feront pas plus. Ils se saisissent de leur partition et la montre au public, moitié pour faire applaudir Ludwig van, moitié pour signifier que c’est bon, on a fait le job.

    Rentré, je me mets au lit afin de dormir suffisamment avant que le réveil ne sonne à cinq heures. Demain et jeudi, c’est Paris.

    *

    En voici une qui déclare publiquement qu’elle ne lira plus jamais mon Journal (la dame me juge politiquement incorrect). Et puis, elle n’est plus mon amie sur Effe Bé, na !

    Arrêter de me lire, cela semble plus difficile à tenir qu’à dire. Un qui s’y était engagé me croisant l’autre semaine ne put s’empêcher de m’adresser la parole : « Je ne savais pas que les Entretiens de Léautaud étaient disponibles en cédés. »

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