• Concert La Musique des Camps, « le Négatif du rire » par Hélios Azoulay et l’Ensemble de Musique Incidentale à la salle Sainte-Croix-des-Pelletiers

                Une nouvelle fois au soir du huit mai, deux jours après l’entrée des néonazis au Parlement grec, Hélios Azoulay et son Ensemble de Musique Incidentale proposent des œuvres composées par des musicien(ne)s enfermé(e)s dans les camps nazis. Cette année, c’est sous le titre La Musique des Camps, « le Négatif du rire ». Cela se passe à la salle Sainte-Croix-des-Pelletiers. Sur scène : un piano, des pupitres, de vieilles chaises, un désordre de cables électriques qui semblent avoir été trouvés dans un débarras. Je suis installé au premier rang, ce qui m’obligera à lever haut la tête lorsque seront projetées des images sur l’écran descendu du plafond. Derrière moi, une dame s’inquiète de ce qui va être montré, elle ne sait pas si elle pourra le supporter, son père est mort à Birkenau.

                Rien d’horrible dans les images qui suivent l’une des chansons de Zara Leander dont le répertoire était diffusé à toute occasion dans les camps, explique Hélios Azoulay, volubile comme toujours. Ce sont deux scènes d’un film de propagande nazie dont le sujet est la vie au camp de concentration, la première où l’on voit que les prisonniers sont de vrais travailleurs bien traités, la seconde qui montre comme on s’y occupait parfaitement des enfants juifs.

                Florient Azoulay donne lecture du poème d’un enfant juif polonais de treize ans, très beau texte que je ne peux malheureusement pas citer, n’en ayant pas la copie, puis place est donnée à la musique : une fugue pour piano de Zikmund Schul ; une danse pour violon, alto et violoncelle d’Hans Krása ; la suite Terezin pour piano de Karl Berman ; deux impromptus pour piano, trois pièces faciles pour quatuor à cordes et un duo pour violon et violoncelle d’Emile Goué, dont le fils est dans la salle ; trois mélodies d’Ilse Wener chantées a capella par Marielle Rubens et aussi N° 78707 pour récitant et quatuor à cordes, une composition d’Hélios Azoulay. Cette œuvre lui a été inspirée par le journal de captivité de celui qui portait ce matricule, un homme toujours vivant qui ne veut pas apparaître sous son nom, passé par les camps de Buchenwald et d’Annen après avoir été torturé dans le donjon de Rouen. Florient Azoulay est le récitant. Il dit le courage de survivre au travers de recettes de cuisine, de bons plans pour acheter des marchandises moins chères, de la liste des œuvres musicales dont on se souvient et de l’envie de manger une bouchée à la reine.

                Pour finir, c’est la très joyeuse sérénade pour violon et piano de Robert Dauber, dont on sait peu, hormis qu’il est mort de la typhoïde à Dachau à l’âge de vingt-deux ans. Elle est reprise en bis, puis Hélios et Florient Azoulay, Marielle Rubens et les membres de l’Ensemble de Musique Incidentale (Clara Abou, Maja Bogdanovic, Karine Ostyn-Page, Pablo Schatzman et Laurent Wagschal) saluent. Il me semble que c’est Valérie Fourneyron, Députée Maire, venue avec son adjoint Bruno Bertheuil, qui est à l’origine de l’ovation debout. Tout le monde se lève donc et je suis obligé de faire de même.

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                Hélios Azoulay s’adressant aux quelques-uns qui ont applaudi entre deux mouvements : « Je vous ai senti gênés, il ne faut pas, si l’enthousiasme vous vient à ce moment-là, pourquoi ne pas le manifester. »

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                L’Histoire ne se répète pas mais les mêmes causes produisent les mêmes effets. Que va-t-il se passer en Grèce? Une guerre civile? Un coup d’Etat militaire?

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                Romain Gary dans La nuit sera calme cité par Hélios Azoulay sur le programme de la soirée : Je note en dictant que la secrétaire, Martine, qui transcrit ces lignes nous demande comment ça s’écrit, Auschwitz, elle n’en a jamais entendu parler, il faudra sans doute recommencer par souci d’orthographe…

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