• Corps à corps à la Maison des Arts de Grand-Quevilly

                Jeudi onze heures du matin, je traverse la Seine d’un pas prudent. Sur le trottoir du pont Corneille s’étale le verglas. Je me rends au marché de la place des Emmurées. Là, peu de brocanteurs et déjà en train de remballer. Inutile d’y chercher le livre. J’achète Libération et file à la station de métro Joffre-Mutualité.

                Une rame arrive. Elle est à l’intérieur. C’est que l’on a rendez-vous. Elle m’attrape au passage.

                Descente à Petit-Quevilly, station François Truffaut et entrée au Bon Accueil, restaurant chinois en libre buffet. Un repas à volonté cuisiné par une sorte de Vulcain asiatique nous attend. On en profite bien avec du vin blanc. Sur l’addition : Apéritifs offerts, c’est vraiment le bon accueil.

                Il s’agit maintenant d’aller à pied de Petit-Cul à Grand-Cul en suivant la ligne de métro. Nous marchons parmi les barres d’immeuble et les pavillons accolés. Elle compte les pères Noël accrochés aux murs, balcons et gouttières. Je l’aide et c’est comme cela qu’on arrive à Grand-Quevilly. La Maison des Arts n’ouvre qu’à quinze heures trente. Allons prendre un café au bar des Provinces.

                Là aussi l’accueil est sympathique. La propriétaire vient nous serrer la main comme à de vieilles connaissances et nous offre un calendrier (La Clusaz en hiver, ça nous rappelle nos vacances l’été dernier).

                Je bois mon café et le sien puis elle dessine des bêtises et je feuillette Libération : accrochés à des grues, trois pendus iraniens, trafiquants de drogue condamnés à mort.

                -Tu as vu comme ils ressemblent aux pères Noël, lui dis-je. Combien en as-tu compté déjà?

                -Trente-trois.

                Allez c’est l’heure, visitons cette exposition intitulée Corps à corps.

               Burlesques, érotiques, abîmés, renversés, fragmentés, souffrants, nus, dégradés ou vêtus, ces corps sont l’œuvre d’une douzaine d’artistes bien connus ou moins connus. Il s’agit d’estampes et ce sont surtout Roland Topor et ses dessins des Neuf grâces et de Lady Mille-pattes, Pol Bury et ses Ramollissements de la Vénus de Milo, Izabella Gustowska et sa série de photographies Les traits relatifs à la ressemblance, Jiri Kolar et ses rencontres de boîtes de conserve avec la peinture d’Ingres Les trois sources et Zoran Music et ses terribles images de charniers Nous ne sommes pas les derniers qui nous retiennent.

                Pas trop longtemps, car il est bon rentrer à la maison pour un autre corps à corps.

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