• En lisant l'Après-vivre de Serge Doubrovsky

               Je finis de lire la nuit en grande diagonale L’Après-vivre de Serge Doubrovsky, paru chez Grasset en mil neuf cent quatre-vingt-quatorze, roman (récit) qui se présente comme la suite du Livre brisé où l’écrivain racontait la mort de sa compagne d’overdose d’alcool, fin tragique dont il fut peut-être en partie responsable par le simple fait de raconter leur vie commune dans son futur livre et de le lui faire lire.

    Je n’aime guère les livres de Serge Doubrovsky (qui se présente comme l’inventeur de l’autofiction). Il m’énerve à geindre sans cesse et il m’incommode avec ses lourds effets de style : Moi, plus vieux. Pluvieux, dans les ténèbres mouillées, trempé, je n’ai plus la trempe. Pourtant je le lis, mais vite fait.

    Page deux cent quarante-sept de son Après-vivre, Doubrovsky raconte la séance de signature de son Livre brisé : Deux après-midi durant, j’ai rempli mes fonctions, faire fonctionner la machine à livres, dédicaçant l’un à X, l’autre à Y, que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam, mais qui occupent des positions stratégiques dans le journalisme, l’édition, tous les membres de tous les jurys des prix littéraires, des personnalités du Tout-Paris de la culture. J’y vais de mes hommages cordiaux, très cordiaux, les plus cordiaux, selon le destinataire, l’humeur.

    Mon exemplaire de L’Après-vivre provient du marché du Clos Saint-Marc où je l’ai acheté deux euros. Il bénéficie d’un envoi de Serge Doubrovsky (daté du vingt-deux mars quatre-vingt-quatorze) à Dominique Raffin « avec le plus cordial hommage de l’auteur ».

    Qui est Dominique Raffin ? Je n’en sais rien et Gougueule non plus.

    Jean Cocteau, un jour se promenant le long des quais à Paris y trouva dans une boîte de bouquiniste l’un de ses livres envoyé au critique André Rousseaux en ces termes « avec tous mes compliments ». Il l'acheta et le renvoya à l’indélicat : « A André Rousseaux avec mes compliments renouvelés ».

    Je tiens mon exemplaire de L’Après-vivre à la disposition de Serge Doubrovsky s’il veut faire de même.

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    Retour du soleil et de la température douce, je retrouve la terrasse du Son du Cor, rue Eau-de-Robec, où je termine la lecture de Metropolis de Jerome Charyn. Extrait : J’étais maigre et tout voûté. Mais dans ma tête argentée, je me voyais comme un gros avec une moustache de phoque : Flaubert. Je ne disposais cependant pas des rentes de Flaubert. J’aurais crevé de faim derrière ma moustache métaphysique si je n’avais pas réussi à enseigner à l’université.

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    Rien n’a changé au Son du Cor depuis l’an dernier, les mêmes sont à la même place et disent la même chose.

    L’un d’eux : « J’aimerais bien bouger mon cul, voir d’autres gens, voir d’autres têtes ».

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    Si, il y a un changement : le café a baissé de dix centimes, la raison est que dorénavant les prix en terrasse sont les mêmes qu’en salle. La clientèle entre et sort. On ne s’y retrouvait plus.

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    Je rentre à temps pour écouter Le mardi des auteurs, l’émission de Matthieu Garrigou-Lagrange sur France Culture. L’auteur de la semaine, c’est Vladimir Nabokov. L’émission est illustrée par des chansons de Christophe que j’écoute raconter sa vie, toujours sur France Cul, chaque soir de la semaine dans A voix nue.

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