• Exposition Roy Lichtenstein au Centre Pompidou

    Ce samedi, vers neuf heures et demie, après avoir marché dans un Paris semi désert, je bois un café au comptoir du Petit Marcel, rue Rambuteau, en parcourant Libération dont la lecture est aimablement offerte par l’établissement (à mon côté, une femme dans les cinquante ans lit Le Parisien en tenant le rôle de la Parisienne à la langue bien pendue) puis, un quart d’heure trop tôt, je me présente devant l’entrée réservée aux possesseurs d’un laissez-passer au Centre Pompidou. Par privilège, il donne le droit de visiter l’exposition Roy Lichtenstein un heure avant l’ouverture officielle, ce que j’explique comme je peux à une sympathique famille italienne, père mère et deux grands fils, qui devra patienter plus que moi. Il fait frais sur la plazza où un clochard replie sa tente Quechua installée pour la nuit sur le socle du mobile géant de Calder.

    S’il est une expression adaptée à ma situation et à celle des quelques-un(e)s qui m’ont rejoint, c’est « Tout vient à point, qui sait attendre » à condition de mettre point au pluriel, me dis-je, songeant à la marque de fabrique de Roy Lichtenstein, celui qui est souvent cité en deuxième quand il est question du Pop Art américain.

    A l’heure dite, les portes s’ouvrent et la chenille nous emmène au sixième étage. Ayant laissé les autres dans les premières salles, j’ai le plaisir d’être seul devant la plupart des œuvres dont trois Rouen Cathedrals venues du San Francisco Museum of Modern Art. « C’est un moyen industriel de faire de l’impressionnisme –ou quelque chose d’assez semblable– par l’intermédiaire d’une technique mécanique. Et pourtant je prends probablement dix fois plus de temps à faire mes Cathédrales ou mes Meules de foin que Monet à les peindre. (…) Ils sont différents de Monet bien sûr, mais ils reprennent quand même le cliché impressionniste de ne pas pouvoir voir l’image de près –plus on s’éloigne mieux on la voit. »  explique Roy Lichtenstein via le cartel qui les jouxte. Dans cette salle figurent également ses relectures de Picasso, Mondrian, Léger, etc. Les dix salles du parcours chronologique et thématique sont disposées de chaque côté d’un double couloir à ouvertures multiples où sont montrées les œuvres en volume de l’artiste. Il est agréable d’y sinuer et de revenir sur ses pas jusqu’au Look Mickey des débuts, réalisé d’après une image de livre pour enfants. Je ne sais pas dire si j’aime les peintures de Roy Lichtenstein, elles m’intéressent, ces explosions inoffensives, ces filles blondes qui pleurent, ces miroirs reflétant le vide, ces nus dénués d’érotisme, ces paysages zen de la fin où il est facile de trouver Charlie.

    Il est onze heure quand je redescends croisant en chemin la famille italienne qui m’interpelle d’un « C’est bon ! ». Le métro m’emmène au Péhemmu chinois de mes habitudes près de la Bastille où je déjeune d’un steak haché accompagné de pommes sautées à la place des frites proposées, autre privilège que m’a consenti l’aimable serveuse. Cette famille menant l’établissement comme des autochtones, gérant le bar, la restauration à la française, les jeux de hasard, la vente des cigarettes et la conversation avec Dédé ou Robert, m’étonne à chaque fois, impossible d’imaginer une famille française tenant une boutique traditionnelle à Beijing.

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    La plupart des œuvres de Roy Lichtenstein montrées à Paris proviennent de collections particulières et ne doivent pas être photographiées, ce qui se fait donc dans le dos des gardiens.

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