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« La chaise est une haute idée du sol » (Jacques Perdrial)
Ce premier mai vers neuf heures et demie je me gare près du cimetière de Louviers, venu là rendre visite à mon frère Jacques, mort dans la nuit du deux au trois mai, seul dans son appartement de la rue du Collège à La Rochelle, il y a dix-sept ans.
Je grimpe jusqu’à l’orée de la forêt. Là se trouve sa tombe. Son nom est à peine visible. Je doute qu’il ait d’autres visites que celles du peu de famille. Il n’en sait rien, heureusement. Que dit-on à quelqu'un qui ne peut vous entendre ? Des choses inutiles. Avant de partir, je casse une branche fleurie de l’un des arbres et la plante dans la jardinière.
Sur la route vers Rouen me revient sa définition de la chaise qui figure dans l’un de ses recueils de poèmes. Comme chaque année, je les feuillette à nouveau. Dans celui intitulé Tous les chats qui sont blancs et qui ont les yeux bleus sont sourds, datant de mil neuf cent quatre-vingt-six, je choisis ce qui suit :
dans le jaune
le maître de maison
referme son livre
se dresse sur son lit
prend un fusil à son côté
vise la gouvernante
tire
éteint la gouvernante
repose le fusil
se rallonge
se tourne vers le mur
et s’endort dans le noir.
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Jamais je ne suis autant entré dans la Cathédrale de Rouen. C’est que la rue Saint-Romain est coupée en son extrémité par les travaux de finissage de l’Espace Monet-Cathédrale et ceux du jardin de consolation de Valérie Fourneyron. Les moins renseignés font le détour par la rue de la Croix de Fer, la rue Saint-Nicolas et la rue des Carmes, n’ayant pas idée du raccourci gothique dont je profite au risque de passer pour pieux.
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Pas question de perdre trois heures de ma vie à regarder un débat Hollande Sarkozy, je me contente du résumé du lendemain. Pas grand-chose à en retenir, hormis l’utilisation de l’anaphore par le futur Président de la République.
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Qu’on ne compte pas sur moi pour m’abstenir au second tour dimanche, ce serait voter pour Sarko le fat sot.