• La compagnie Pokemon Crew à l'Opéra de Rouen

                Mardi soir, des centaines d’étourneaux transforment les arbres du parvis de la Cathédrale de Rouen en une installation sonore hitchcockienne. Bizarrement tous se taisent soudain. Je ne pense pas que ce soit dû à mon passage. La nuit tombe. Je me dirige vers l’Opéra.

                Je ne suis pas très bien placé ce soir. C’est comme ça parfois quand tu es abonné. Tu demandes l’orchestre, on te donne le balcon, tu demandes le balcon (c’est mieux pour la danse) on te donne l’orchestre, c’est là que je suis, avec devant moi une grande blonde. Je ne vois donc pas très bien les Pokemon Crew, huit garçons venus de Lyon.

                Leur histoire est une histoire comme en aiment celles et ceux qui aiment ce qu’on appelle les belles histoires. Des branlotins qui hipent hopent sous les arcades de l’Opéra National de Lyon, sont invités un jour à s’exercer dans une salle à l’intérieur, puis à se montrer sur scène.

                Les voilà maintenant une troupe reconnue dans ce domaine et plus généralement dans celui de la danse contemporaine. Leur spectacle s'intitule C’est ça la vie !? Il raconte leur belle histoire avec l’aide de la vidéo. Certains passages de cette vidéo sont un peu épais, ainsi celui ayant trait à leurs origines. Déployés sur scène des drapeaux tunisien, marocain, français (et autres pas connus de moi) se transforment en un immense bleu blanc rouge sur l’écran. De quoi réconforter les indigné(e)s du sifflage de Marseillaise dans les stades de foute. Je ne sais pourquoi ces jeunes gens aux parents venus d’ailleurs sont ainsi condamnés (par eux-mêmes peut-être) à toujours en passer par cette case. Me gave aussi leur prêchi-prêcha de présentation écrite « La jeunesse se doit d’avoir un idéal, le nôtre sonne comme un slogan : unis pour avancer ! ».

                « La jeunesse », « devoir », « idéal », « slogan », « union », « avancer », tout cela est assez terrifiant. Que vienne vite le temps du hip hop sans discours (et avec des filles aussi).

                Chez les Pokemon Crew, que des mecs qui chacun à leur tour font leur numéro pour ensuite se fondre et disparaître dans le groupe, de quoi énerver l’individualiste que je suis.

                Cela dit, ils dansent bien les huit garçons (sur une musique due à Christophe Tudel qui sort des poncifs du genre). Ils ont été champions de France, et du monde, et d’Europe (comme de vulgaires sportifs) et l’un d’eux, Lilou, est le créateur de « la remontée clash fusionnée avec des variantes en pass pass » (je dis bravo).

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