• Mahler et Tchaïkovski à l'Opéra de Rouen

    Concert d’après-midi ce premier avril à l’Opéra de Rouen qui a ouvert sa terrasse en l’honneur du soleil revenu, il fait bon y attendre l’ouverture des portes de la salle et le spectacle est déjà assuré, sur la place où Corneille fait figure de statue, par des patineurs à roulettes vraiment doués et qui feraient bonne figure sur la scène dudit Opéra si un(e) chorégraphe bien inspiré(e) avait l’idée de les intégrer à l’un de ses spectacles.

    L’orchestre est au grand complet avec deux symphonies au programme : la numéro dix de Gustav Mahler et la numéro cinq de Piotr Ilyitch Tchaïkovski. Derrière moi, un spectateur chenu annonce que lui-même, s’il avait eu la responsabilité du programme, aurait commencé par Tchaïkovski et non par Mahler. Il n’y a pas que les branlotins qui disent des âneries.

    Un délice douloureux cette symphonie de Mahler, dirigée sobrement par un Oswald Sallaberger tout en retenue, « hantise de la mort prochaine et de la dissolution, du poids inéluctable de la fatalité sur l’humaine destinée » comme l’écrit Christophe Queval dans le programme.

    Second plaisir avec Tchaïkovski tout aussi tourmenté mais ainsi que l’écrivait le musicologue M-R Hofmann, chez ce compositeur : « Le premier mouvement est toujours d’un pessimisme accablant ; le deuxième d’une mélancolie sereine et même souriante ; le troisième est allègre ; le dernier déborde de verve, s’encanaille volontiers et devient une authentique kermesse populaire. »

    Quelques égarés, emportés par cette atmosphère de kermesse populaire, se mettent à applaudir pendant le silence ménagé par Tchaïkovski dans son quatrième mouvement. On peut être démuni de culture musicale (je le suis, chez moi, quand j’étais enfant, on ne connaissait que l’orchestre de Franck Pourcel ou celui de Paul Mauriat), mais il n’est pas difficile d’être attentif à l’attitude du chef d’orchestre, on peut aussi avoir lu le programme obligeamment distribué à l’entrée de la salle et savoir à quoi s’en tenir, ça évite de se faire tancer par ses voisins et surtout de nuire à l’intention du compositeur.

    Cette propension à applaudir comme des malades dès que la musique s’emballe est d’ailleurs bien inquiétante en soi, on trouve cela aussi dans les rassemblements politiques après la tirade d’un orateur surexcité et rien qu’à le voir à la télévision, cela m’effraie.

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