• Un premier mai au vide grenier d’Hondouville (Eure)

    Pas envie de mettre le pied dans le défilé plan plan du premier mai à Rouen, je prends la route aux aurores. Une demi-heure plus tard, je me gare à l’entrée du village d’Hondouville dans l’Eure, évitant le pré fangeux transformé en parquigne le temps du vide grenier.

    Il n’est pas aussi important qu’il pourrait l’être, la faute au mauvais temps persistant. Le ciel est gris, la dernière averse date de la nuit. Le soleil est annoncé pour l’après-midi mais le Normand est prudent. Une partie des vendeurs et des vendeuses sont installés dans l’une des rues tandis que d’autres sont dans un pré humide et boueux derrière l’école. Ici l’on a voté à plus de cinquante-quatre pour cent pour Sarko Le Pen au premier tour de la présidentielle, comme dans pas mal de trous perdus. Celui-ci je le connais depuis longtemps. J’y ai fait mes débuts d’instituteur en classe à double niveau grande section de maternelle cours préparatoire, avec trente-deux élèves sans femme de service dans un minuscule local aujourd’hui désaffecté. Mes ancien(ne)s élèves ont dans les quarante-cinq ans. Je ne risque pas de les reconnaître.

    Peut-être est-ce l’un deux qui interpelle une vendeuse :

    -Alors Marie-Laure, tu vends tes petites culottes ?

    -Non, pas cette année, répond l’interpellée (pas de Marie-Laure dans mes élèves d’autrefois).

    Un autre vendeur tient le rôle du sadique :

    -Des petits soldats, ah non j’en ai plus, j’en avais, mais ils sont vendus, pas chers en plus, y a même pas cinq minutes.

    On trouve un type de ce genre dans chaque vide grenier.

    Ce que je ne trouve pas, c’est quoi que ce soit qui m’intéresse. Quand je repars, l’une des voitures garées dans le pré tente de se dégager de la boue. Plus elle patine, plus elle s’enfonce. Je n’ai pas ce souci. Par un raccourci que je connais, je quitte le village et me dirige vers le cimetière de Louviers.

    *

    Plus intéressant que les habituelles manifs françaises de premier mai, le rassemblement Occupy Wall Street que rejoint après son travail (le premier mai n’est évidemment pas férié aux Etats-Unis) celle qui m’écrit ensuite ceci :

    « Les dix ou vingt mille personnes qui y étaient ont largement moins de quarante ans pour la plupart. Plutôt mon âge. Des vrais de vrai hippies, des anarchistes qui couvrent la moitié de leur visage, des gens avec des bouts de carton avec marqué plein plein de trucs différents (depuis : "he fucked all of us" au-dessus d'une photo de Bush, jusqu'à "it cures" sur une feuille de cannabis en passant par des gens déguisés en statue de la Liberté anorexique ou Captain America avec des béquilles), toutes les langues aussi. Il y avait presque autant de flics que de manifestants, y compris en hélicoptère. Du coup, certains déplient des bâches de plusieurs dizaines de mètres au-dessus de leur tête avec des trucs marqués dessus pour que ça se voit bien d'en haut. »

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