•             Ce mercredi seize novembre deux mille onze, le doigt du dieu des Sports s’est posé sur la ville de Rouen. La chance ! comme dit la bohémienne qui veut m’arnaquer en jetant une bague en faux or à mes pieds.

                Imagine que la Maire Valérie Fourneyron n’a même pas eu besoin de faire Paris Amsterdam à vélo ou Rouen Bois-Guillaume en petites foulées, la voici officiellement chargée des sports dans l’équipe de François Hollande après l’avoir été dans celle de Martine Aubry, un transfert comme on dit dans ce milieu.

                Elle sera donc Ministre des Sports, si toutefois Hollande ne joue pas les Poulidor. On compte sur Laurent Fabius, le nouveau commercial de chez Ferrero, pour le doper aux Kinder, car, deuxième bonne nouvelle, ce jour est aussi celui où le futur Palais des Sports de Rouen, orgueil du chef d’agglo, est baptisé Kindarena en échange de plein de fric publicitaire de l’entreprise chocolatière.

                Tu te demandes comment c’est possible ? Eh bien, tu prends la tête d’œuf de Laurent le Fabuleux, tu l’ouvres et tu trouves quoi ? Laurent le Ferrereux. Oui, c’est une surprise, mais rassure-toi, il est toujours aussi socialiste.

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                Rouen : une ville qui se prétend capitale de la Normandie mais n’en a pas les moyens. La Médiathèque transformée en hangar à archives départementales par le duo Fourneyron Fabius (après avoir échappé de peu à la destruction) et le Palais des Sports transformé en poule aux œufs d’or du chocolatier Ferrero par ce même Fabius.

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                -A quoi bon un Palais des Sports à Rouen ? me demande une mienne connaissance.

                -Tu sais bien que c’est indispensable en cas de coup d’état militaire, c’est toujours là qu’on rassemble les opposants avant de les torturer.

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  •             Le treize novembre au matin, journée printanière, je suis avec celle qui me tient la main au Clos Saint-Marc. Le tour du marché fait, nous gagnons le quai de la rive droite pour une promenade sous le soleil. Le Norman Arrow, catamaran transmanche, y hiberne, dans les tripes duquel s’agitent des ouvriers privés de repos dominical. Que nous à marcher sur le bitume rose, les autres courent ou patinent, sportives et sportifs qui s’abîment la santé. Les hommes ne manquent pas de se moucher avec leurs doigts et de cracher par terre.

                D’autres sportifs et sportives tapent dans une balle au scouache, grâce à qui nous prenons une boisson chaude au soleil après que l’aimable serveuse nous a installé une table en terrasse.

                De retour à la maison, nous constatons que le banc est au soleil et qu’il fait assez chaud pour manger dans le jardin. C’est l’occasion d’inaugurer le plateau orange soixante-dix qu’elle m’a offert lors du vide grenier de son quartier, l’occasion aussi pour moi de faire le bilan des dégâts causés par la voisine au carchère, pas de moquette inondée cette année mais une porte couverte de boue jusqu’aux deux tiers de sa hauteur.

                De quoi m’occuper elle repartie à Paris, mais avant cela c’est concert à l’Opéra de Rouen où l’on a sorti les tables et les chaises sur la terrasse. De là, je toise les manèges de la foire Saint-Romain en attendant l’ouverture de la salle.

                L’Ensemble Pygmalion, chœur et orchestre, donne Bach & prolongations. L’orchestre est triste comme on l’est souvent dans la musique baroque, mais le chœur plein de tonicité. S’en dégagent de belles voix féminines en solo. Plus que les œuvres des différents Bach, j’aime les prolongations contemporaines D’une profonde tristesse de Philippe Hersant et C’en est assez de Sven-David Sandström.

                Personne dans la salle ne juge que c’en soit assez. En come Bach, l’Ensemble Pygmalion dirigé par Raphaël Pichon, jeune chef dont l’œil frise quand il salue, joue et chante Gute Nacht.

                C’est tôt pour se coucher, il n’est que dix-huit heures, mais à Rouen, un dimanche de novembre, quand on a passé l’âge de se faire secouer dans les manèges, ce peut-être une bonne idée.

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                Quel est l’Opéra de province capable d’enchaîner en une saison Le Tour d’écrou de Benjamin Britten, Parsifal de Richard Wagner, La Veuve joyeuse de Franz Lehar, L’Opéra de quat’sous de Kurt Weill, Faust de Charles Gounod, Le Turc en Italie de Gioachino Rossini et La Bohême de Giacomo Puccini ? L’Opéra de Rouen bien sûr, mais c’était en quatre-vingt-quatorze quatre-vingt-quinze.

                (Programme trouvé dans la drouille du marché du Clos Saint-Marc)

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  •             Samedi midi, c’est au tour de celle qui vit à Paris de m’inviter au restaurant à l’occasion de son premier vrai salaire, un retour à La Petite Auberge, rue Martainville, où l’accueil est sans chichis et la cuisine bonne. C’est vite complet avec présence d’enfants en bas âge mais heureusement à bas bruit. Il est très bien, nous dit le serveur de La Cuvée du Père Tranquille, un bordeaux qui nous tente. Il a raison, c’est parfait pour accompagner sa crêpe au saumon et mes escargots au gingembre et aux morilles, son confit de canard aux pommes sarladaises et mon entrecôte au camembert, le plateau de fromages et sa salade verte, nos tiramisu et crème brûlée (moite moite). Le café est à un euro trente.

                Après, c’est la sieste quelque peu troublée par la voisine qui n’a rien de mieux à faire cette après-midi que de démousser le pavage du jardin au carchère, une opération aussi pénible qu’inutile, mêlant bruit et gaspillage d’eau.

                Le soir venu, celle qui m’accompagne est la première de la file d’attente des places de dernier quart d’heure à l’Opéra de Rouen. J’ai une place en corbeille mais je me risque au premier rang des chaises sur la fosse, impossible d’être plus près pour ce concert de musique de chambre consacré à Beethoven et Schoenberg.

                Quand elle me rejoint c’est munie d’une officielle place sur chaise. Je pose ma main sur sa cuisse quand entrent les musicien(ne)s. Oswald Sallaberger est du nombre. « Avec son petit violon » me dit-elle. Non, c’est juste qu’il est grand et costaud. De temps à autre, elle et moi on échange des sourires à voir comment il se démène, freinant du pied sur le trépied de son pupitre ou faisant le grand écart, jambe en avant jambe en arrière. On entend sa puissante respiration. A ses côtés, Jane Peters semble sobre, à peine si elle décolle de sa chaise à la poursuite de son archet pendant un temps fort. Les autres cordes accompagnent placidement cette transcription pour violon et quatuor de la Sonate « à Kreutzer » de Ludwig van Beethoven, œuvre qualifiée en son temps de terroriste par un journaliste et que refusera de jouer son dédicataire, nous apprend Yannick Simon, le musicologue auteur du texte de présentation. De gros applaudissements saluent l’issue.

                Après l’entracte, Oswald Sallaberger est encore là, au premier plan, me cachant malheureusement la blonde Hélène Bordeaux et son violon. La salle est dans le noir et le plateau dans la pénombre, uniquement éclairé par les loupiotes des pupitres. C’est pour La Nuit transfigurée d’Arnold Schonberg. Le violoncelliste Florent Audibert y prend un visage fantomatique des plus inquiétants. Le jour artificiel revenu, les applaudissements fusent et se répètent.

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                Partis mes voisins homosexuels, artistes de cabaret parisien, venant à Rouen de temps à autre pour s’aérer l’esprit. Je n’entendrai plus, à travers la mince cloison de ma chambre, leurs chansons sentimentalo-lacrymales.

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                Bien organisés par ailleurs, ce sont leurs parents qui se sont tapés le déménagement et le nettoyage de l’appartement.

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  •            Celle qui me rejoint le ouiquennede est déjà là jeudi soir grâce au onze novembre. Le vendredi matin, nous partons pour Fécamp. Je me gare au bord du port. Il fait quasiment beau mais le vent est frisquet. Une boisson chaude s’avère nécessaire, prise dans un café dont la serveuse a un visage qui m’est familier, ancienne Rouennaise peut-être. Celle qui m’accompagne trempe ses pieds bottés dans la mer puis, par une rue intérieure, nous rejoignons le Palais Bénédictine où, ai-je appris la veille, on expose Jace, artiste de rue, né au Havre, vivant à La Réunion.

                Je demande à la caissière pourquoi il faut désormais payer deux euros pour voir les expositions du Palais Bénédictine autrefois gratuites, n’obtenant qu’une réponse floue. Elle est à peine prête, court mettre de la lumière dans les salles d’exposition, ne peut nous donner de ticket. Nous découvrons les œuvres de Jace, toiles et voiles, inspirées des univers de la bande dessinée et du jeu vidéo. Son personnage récurrent est le Gouzou, simple et rond avec une tête d’œuf sans expression. Cela nous plaît et nous apprécions d’être seuls sur place.

                Ce que nous préférons, ce sont les voiles peintes, celles des pirogues des pêcheurs semi nomades Vezo de Madagascar. Une quinzaine sont ici présentées, l’une d’elles avec sa pirogue. Un film nous les montre en action dans ce qui semble un paradis terrestre. Cela fait rêver.

                Il est temps de songer à un restaurant. L’envie de manger une choucroute de la mer nous fait choisir L’Hebdo et l’on fait bien. La souriante patronne nous offre la table en angle, vue sur la mer et les falaises d’en face. Le décor est à la gloire de la musique pop. La petite salle est vite complètement occupée. Huîtres variées, choucroute de la mer copieuse et fraîche, tarte Tatin de la maison, tout cela est délicieux et agrémenté de muscadet en pichet et de chansons de Bob Dylan en fond sonore. Nous sortons gais et contents.

                Une promenade est bienvenue qui nous mène dans le port d’où nous chasse le vent froid puis dans l’église assez quelconque. Je suis vigilant sur la route du retour et fait le détour d’Allouville-Bellefosse. Le chêne est toujours vaillant. Nous y grimpons, entrons dans la chapelle supérieure puis dans celle d’en bas, des lieux rien que pour nous deux.

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                Autre anniversaire de onze novembre : celui de l’arrestation des prétendus terroristes de Tarnac. Aujourd’hui, ce sont eux qui portent plainte contre les policiers pour falsification de procès-verbal.

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                Colocation, covoiturage, cotravaillage (coworking en anglais), le capitalisme est en crise, il réinvente le communisme.

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  • Quoi raconter pour les cinq ans de ce Journal démarré le onze novembre deux mille six ? me demandais-je depuis quelque temps. L’un de mes amis (comme on dit) du réseau social Effe Bé (c’est lui qui l’a voulu), nommé Saladin Sane, me donna la réponse.

    A la suite d’un différent entre nous, relatif au penseur belge Orlando de Rudder (qu’il admire, moi pas),soudainement sincère il m’écrivit ceci :

                « Votre esprit est lourd, en accord avec le style : jugements définitifs et sans nuances, bien-pensance molle, énumération dépressive du micro-événement, sans la moindre chair... Sur google vous êtes le premier écrivain rouennais référencé : Flaubert n'a qu'à bien se tenir... Votre blog est la bénédiction des insomniaques : qui oserait découvrir Rouen à vous lire? Et pourtant vous allez fréquemment de vos mesquineries, que souvent je me retiens de relever tant la cible est facile / pitié des imbéciles... On cherche encore vos arguments, un développement quelconque qui nous ferait dire : Alléluia! Il y a quelque chose qui bouge sous ce crâne... ».

                Saladin Sane n’est pas le premier à me reprocher d’apparaître en tête de la liste de ce stupide Gougueule quand on tape « écrivain rouen ». Je ne l’ai pas cherché. Il y a juste cinq ans, la maison Overblog m’a demandé de lui fournir une adresse mail pour ouvrir ce blog. Mon adresse principale étant déjà utilisée, je lui en ai donné une autre (ecrivainrouen@yahoo.fr) qui ne me sert qu’aux transactions commerciales sur le ouaibe, sans réfléchir aux conséquences. Maintenant, cela m’ennuie d’être assigné à résidence et, accessoirement, de passer avant Gustave, qui chaque fois qu’il en avait l’occasion faisait la louange de sa ville natale. Ainsi dans cette lettre à Ernest Chevalier, écrite le deux septembre mil huit cent quarante-trois :

                Rouen, ancienne capitale de la Normandie, chef-lieu du département de la Seine-Inférieure, ville importante par ses manufactures, patrie de Duguernay, de Carbonnier, de Corneille, de Jouvenet, de Hégouay portier du collège, de Fontenelle, de Géricault, de Crépet père et fils. Il s'y fait un grand commerce de cotons filés. Elle a de belles églises et des habitants stupides, je l'exècre, je la hais, j'attire sur elle toutes les imprécations du ciel parce qu'elle m'a vu naître. Malheur aux murs qui m'ont abrité ! aux bourgeois qui m'ont connu moutard et aux pavés où j'ai commencé à me durcir les talons !

    *

                A propos de Flaubert et de Fesse Bouc, un zozo vient d’ouvrir un compte au nom de l’écrivain. Ce n’est pas parce que Gustave disait « Madame Bovary, c’est moi » que Gustave c’est toi, vil usurpateur.

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  • Mercredi soir, je suis en corbeille à l’Opéra de Rouen où il reste pas mal de fauteuils libres pour l’oximorique Héros ordinaires, chorégraphie de Sylvain Groud sur une musique de Vincent Manac’h, dansée et chantée par la Compagnie Sylvain Groud, un spectacle du festival Automne en Normandie.

    Héros ordinaires s’inspire des croisements de quidams dans les lieux publics. Ça y ressemble en effet. Ce n’est pas de la danse, plutôt ce qu’on appelait de l’expression corporelle dans les années soixante-dix, me dis-je, songeant à ces stages d’enseignants où je devais participer à ce genre d’activité. Là, je me contente de regarder. Durée estimée : une heure dix, ai-je lu sur le dépliant programme.

    A un moment, Sylvain Groud lui-même traverse le plateau de toute sa souplesse. Un emprunt à Yma Sumac met un peu d’énergie, vite perdue. Un duo qui n’en finit pas me donne à espérer qu’on n’est pas loin de la fin. Hélas, ce n’est pas le cas. Une heure dix, c’est long. Je préférerais être gare Saint-Lazare à regarder le ballet des anonymes dans la Salle des Pas Perdus en attendant un train qui ne s’affiche pas. Partir serait une solution, mais il me faudrait déranger mes voisin(e)s. Cela finit par finir, à mon soulagement, et à celui de celles et ceux que j’entends. Les applaudissements sont faibles et s’arrêtent au premier baisser de rideau. Autour de moi, on se félicite d’avoir réussi à ne pas s’endormir. Ce soir, les héros ordinaires étaient dans la salle.

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    Red Waters, Héros ordinaires, deux spectacles labellisés Automne en Normandie, deux spectacles décevants. Celui de deux mille onze ne ressemble pas aux automnes précédents.

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    Au Socrate, pour un café verre d’eau en lisant Mes prix littéraires de Thomas Bernhard (Folio). Pas loin de moi, deux jeunes mères à bébés. L’une raconte son accouchement à l’autre, ce qu’heureusement je n’entends pas vraiment. Me parvient la conclusion : « Après, je me suis sentie vidée ». Je crois qu’elle parlait de sa fatigue.

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  • Je termine, lecture de jour, les Confessions d’un jeune Anglais de George Moore, écrivain anglais francophone surtout connu par le portrait que fit de lui Edouard Manet, dans la mauvaise édition Christian Bourgois (un fac-similé mal imprimé de l’édition mil neuf cent trente-cinq de Stock), un livre désherbé de la Médiathèque François-Truffaut du Petit-Quevilly.

    Moore, content de lui-même, écrit d’une manière ampoulée. Ce qu’il raconte ne m’intéresse pas, sauf quand il écrit ceci : Je suis efféminé, maladif, pervers ; mais, avant tout, pervers. Presque tout ce qui est pervers m’intéresse, me fascine. et cela : Je criais ave à tout ceci : luxure, cruauté, esclavage ; j’aurais voulu, dans le Colysée, baisser le pouce pour qu’une centaine de gladiateurs mourussent ; me détacher de mon âme chrétienne et me laver avec leur sang. Las, George Moore n’est pas à la hauteur de ses phantasmes. Sa vie est ennuyeuse.

    Comme est ennuyeuse celle de Michel Leiris dont je termine, lecture de nuit en grande diagonale, le Journal qu’il tint de mil neuf cent vingt-deux à mil neuf cent quatre-vingt-neuf, publié chez Gallimard.

    Qu’en retenir ? Sa narration de la Libération de Paris, qu’il croit vivre en acteur alors qu’il n’en est que spectateur, et de sa tentative de suicide, acte raté transformé en objet d’observation.

    Pour le reste, parmi d’innombrables récits de rêves, les platitudes succèdent aux platitudes. Rien à noter sauf peut-être ça, du huit février mil neuf cent quarante-deux : Caractère véritablement incestueux du mariage, qui tend à transformer les relations amoureuses en relations familiales.

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    Michel Leiris, un écrivain surestimé, comme Henri Michaux, René Char, Julien Gracq, des monuments d’ennui. Il en est d’autres qui ne me viennent pas à l’esprit au moment où j’écris.

    *

    De George Moore, quand même, cette remarque bien vue sur la traduction : Regardez les traductions de Villon par Swinburne. Ce sont de beaux poèmes composés par Swinburne, mais c’est tout ; il fait dire à Villon une « bouche superbe de baiser ». Villon ne pouvait écrire cela, à moins d’avoir lu Swinburne.

    *

    Il paraît que la mise en place de la charia en Egypte et la victoire des islamistes modérés (oxymore) aux élections en Tunisie sont de mauvaises nouvelles pour les féministes. Non, ce sont de mauvaises nouvelles pour les femmes.

    Dans le même genre d’abus de langage, j’entends à propos de la crise économique et financière que tel ou tel vient de faire des déclarations alarmistes. Non, ces déclarations sont alarmantes.

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  • Première fois cette saison que je grimpe à pied la côte de Darnétal. Il brouillasse. Je passe sous la voie rapide. L’entrée du tunnel de la Grand Mare est une grande bouche bleue. Je n’ai plus qu’à me laisser descendre dans le trou au fond duquel on trouve le Kalif. C’est lundi et c’est gratuit pour les adhérent(e)s, au programme Nathaniel Isaac Smog, un groupe pop folk d’Amiens Le jeune homme à l’ordinateur me dit que ma cotisation est valable jusqu’en janvier.

    Un petit coup de fumigène, mise en marche des multiples caméras, les quatre Amiénois prennent place devant un public restreint parmi lequel pas mal d’ami(e)s à eux et une grand-mère pour qui est requis l’un des rares sièges. Je suis debout contre mon pilier habituel. J’écoute ça avec des bouchons dans les oreilles. La voix du chanteur est le point fort, qui monte dans les hauteurs, planante. Il se donne du mal pour essayer de faire bouger le public, lequel reste amorphe « Avancez, venez près de la scène, ne soyez pas timide ». Oui mais quand on avance, il n’y a plus personne derrière.

    *

    En général, ça se passe comme ça. La mère commande un thé pour elle, un sirop et une crêpe pour l’enfant. La crêpe arrive. L’enfant a envie de faire pipi. A son retour, il ne veut plus de sa crêpe. La mère la mange avec bonne conscience et son thé.

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  • Viens de lire Prélude au désastre de Violet Trefusis, ouvrage publié chez Salvy, dont le titre fait référence à la deuxième Guerre Mondiale mais n’en est pas moins d’actualité. Violet, citoyenne britannique, fille de la maîtresse préférée du roi Edouard le Septième, est l’auteure de plusieurs romans écrits en français (Broderie anglaise, Les Causes perdues) mais elle est surtout connue par sa liaison mouvementée avec Vita Sackville-West (leur correspondance est publiée chez Stock tout comme le témoignage du fils de Vita, Nigel Nicolson, Portrait d’un mariage, deux livres lus dans le passé).

    Ce Prélude au désastre, écrit pendant la débâcle, comprend le récit de l’exode de l’auteure (Nous passâmes le première nuit dans un hôtel d’Evreux, dormant à même le plancher) puis évoque les années d’avant-guerre, sa vie à Guermantes (sur le conseil de Marcel Proust), sa rencontre avec Mussolini et le souvenir de ses ami(e)s dont Colette, Cocteau, Poulenc.

    Elle écrit bien, Violet Trefusis, ainsi : Dans le village, Monsieur et Madame Devaux étaient considérés comme un ménage modèle. Ils avaient quantité de filles aux cheveux d’étoupe, dont l’âge s’échelonnait de cinq à douze ans, et dont le seul luxe apparent était le bleu de leurs yeux, un bleu turquoise que toutes avaient en commun ; lorsqu’on les voyait réunies, compte tenu des différences de taille, on aurait dit un collier mal enfilé.

    et en raconte parfois de bien bonnes : En réalité, l’appétit romain pour le scandale est tel qu’une Anglaise vivant à Rome me dit un jour : « Je crois que je vais devoir me séparer de mon canari… -« Pourquoi cela ? » -« Eh bien, voyez-vous, ils n’ont jamais tout à fait oublié cette histoire de Léda… »

    même à son insu : Elle évoquait le somptueux sonnet de Hérédia :

                Indolente et superbe, une dame à l’écart,

                Se tournant à demi dans un flot de brocart

                Sourit au négrillon qui lui porte la queue.

    *

    En bonus, chez Violet Trefusis, cette citation de Max Jacob : Je déteste la campagne, tout y est trop vrai.

    *

    Retour mouvementé à Paris pour celle qui me rejoint le ouiquennede. La locomotive du quatorze heures cinquante-sept tombe en panne deux kilomètres après Rouen. Une heure et demie d’attente, puis retour à Rouen par un autre train. Attente du prochain pour Paris, arrivée en soirée dans la capitale, toute une après-midi perdue. Pendant ce temps, nos zélu(e)s se gargarisent de la future ligne ferroviaire rapide entre la Normandie et Paris, laquelle, vue la catastrophe à venir, n’est pas prête de voir le jour.

    *

    Bien fou François Hollande qui veut être le pilote du navire lorsque celui-ci s’éventrera sur les rochers. Il serait plus sage d’abandonner la course au pouvoir, de laisser à l’actuel capitaine la responsabilité du naufrage.

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  • Sûr qu’il ne se passe pas grand-chose au Musée des Beaux-Arts pour qu’on en arrive à organiser une soirée de vernissage autour d’un tableau fraîchement restauré et sûr qu’il n’y pas grand-chose à faire ce vendredi soir à Rouen pour que l’on se retrouve aussi nombreux sous la verrière, encore qu’il y ait là surtout du notable qui doit se faire voir.

    L’objet de la restauration, La Vierge entre les vierges, chef-d’œuvre de Gérard David, devient l’objet de longs discours. Madame l’Adjointe à la Culture remercie tout ce qui est remerciable dont la banque Céhicé qui a mis de l’argent dans l’affaire (écouter une socialiste faire l’éloge d’une banque est un plaisir en soi). Monsieur le Directeur des Musées fait de même. Monsieur le Banquier se félicite d’être aussi généreux avec la Culture « dans la conjoncture actuelle ». Monsieur le Conservateur chargé de cette restauration fait l’historique du tableau qui a un passé agité.

    Son avenir tranquille me permettra de le voir un autre jour. De restauration ce soir je ne m’intéresse qu’à celle proposée aux buffets pris d’assaut, songeant, à voir l’ardeur avec laquelle chacun(e) attrape son bout de gras, que ce serait une bonne idée d’organiser une fois par mois au Musée des Beaux-Arts un évènement à propos de rien, juste écouter des discours ennuyeux et après se saouler au champagne.

    *

    Madame l’Adjointe à la Culture, son œil qui brille quand elle évoque la prochaine édition du festival Normandie Impressionniste en deux mille treize. Un festival inauguré par le président François Hollande, c’est ça qui serait bien.

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    « Et s’il n’y avait plus de libraires ? » se demande Télérama sur sa couverture. Au verso, une publicité pour le Kindle d’Amazon donne la réponse.

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