• Je suis dans la queue de l’appareil près d’un hublot et n’ai pas de souci de voisinage. Nul n’est assis à ma droite, ce qui me permet de déplier les jambes. Certain(e)s veulent venir aux places libres mais l’équipage le refuse, question d’équilibre de l’appareil. J’approuve intérieurement. Je suis tranquille au fond et n’ai pas envie que l’avion s’écrase. Je vois déjà le titre de Paris Normandie : « Un Rouennais parmi les victimes ».

    L’un des rares Américains présents est un grand black qui se cache sous son écharpe au moment du décollage. Pour ma part, je regarde la myriade de lumières. Une collation est servie avant l’extinction des feux : mini sandwich, fromage, tomate et jus d’orange. Je dors un peu de temps à autre. Le vol se déroule paisiblement avec ses zones de turbulence. Les hôtesses et stewards d’XL Airways font leur petite vente en duty free. Puis c’est l’heure du petit-déjeuner (6 a.m. à New York, midi à Paris) : café, jus d’orange, semblant d’omelette, pommes sautées, salade de fruits, pain, beurre, confiture, yoghourt crémeux à l’américaine.

    J’observe les nuages, petits moutons bientôt remplacés par un épais tapis. C’est la descente sur Paris. Je mâche trois chewing-gums, vision des méandres de la Seine, du land art des agriculteurs, de paisibles villages, léger mal d’oreille droite. L’atterrissage se fait en douceur. Nous attendons peu avant de sortir de l’avion.

    Ce n’est pas le cas ensuite. Une longue file constituée des passagers de plusieurs avions stagne devant les locaux de la Police de l’Air et des Frontières : un seul Pafeux pour s’occuper de tous les passeports de l’Union Européenne, deux ou trois pour s’occuper des vrais étrangers et un autre affecté à des privilégiés qui n’ont pas à attendre. Quelqu’un demande qui sont ces prioritaires, signe que l’on est plus aux USA. Ce sont les voyageurs de la classe affaire. La Police travaille ici en priorité pour les riches. Mon attente est agrémentée par la dispute d'une femme de quarante ans avec sa mère de soixante sous le regard de sa fille de vingt (la vieille a prétendu voyager seule pour obtenir une meilleure place dans l’avion, sa fille est épouvantablement vexée).

    Je finis par arriver devant le Pafeux qui sue. Il tape mon numéro, vérifie que je ne suis pas un voyou et me dit d’y aller. Je récupère assez vite ma valise, vais à pied jusqu’au RER, obtiens un billet de la quatrième machine que je sollicite, grimpe dans celui qui attend, un direct jusqu’à Paris.

    Après une attente d’une heure à Saint-Lazare, un train me ramène à Rouen que je retrouve dans un état proche de celui où je l’avais laissée. On y dépave la rue de la Jeanne mais ce n’est pas par crainte d’une proche révolution.

    *

    Difficulté de parler de la vie new-yorkaise avec celles et ceux que je croise les jours suivants. Très vite, on en arrive de leur part à un : « Ah oui, j’ai vu ça dans une série. », ce qui clôt la conversation.

    *

    J’achève ce long récit, ce jeudi quatre avril deux mille treize, précisément à l’heure où l’avion de celle repartie pour deux mois à NYC se pose à Paris.

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  • Lever à 7 a.m., après une nuit perturbée par le bruit au-dessus de nos têtes, c’est le jour du retour en France. Après le petit-déjeuner, nous quittons le trou à rats du 14 St Marks Place dont nous jetons la clé dans la boîte à lettres sans avoir jamais croisé nos vils logeurs.

    En arrivant à la gare maritime, un chien se précipite sur nous, suivi d’un homme pas vraiment en uniforme. C’est un renifleur chercheur de drogues. Pas de problème, nos bagages sont « safe ». Sur le ferry, mélancoliques, nous avons l’ultime vision de New York City : Manhattan, la statue verte. Par la 1, nous rejoignons Christopher Street puis la A nous mène à Penn Station où nous devrons nous séparer.

    Il est l’heure de déjeuner. Je repère une terrasse de premier étage particulièrement bien située à cette intersection de la 8ème Avenue et de la 34ème Rue. C’est celle de Lucy’s Cantina Royale, un restaurant mexicain qui ouvre juste à l’instant. Nous laissons nos valises sous l’escalier et montons. Une serveuse nous installe en bordure de terrasse au-dessus des caméras de surveillance de la NYPD et des touristes promenés en bus à étage. La vue est belle sur les bâtiments d’en face. Certains sont surmontés des châteaux d’eau qu’elle aime particulièrement. J’en fais des photos, et aussi des hommes suspendus dans une nacelle, occupés à peindre ce dimanche une immense fresque publicitaire pour Johnnie Walker. Elle choisit une salade de la casa et je prends un burrito au porc, cela avec de l’eau au goût new-yorkais, puis, pour prolonger le moment, nous commandons un flan avec du caramel au fond.

    Quand nous sortons, il est encore tôt mais c’est mieux de se quitter maintenant. Je la regarde qui descend avec l’ascenseur dans les entrailles de Penn Station où un train la mènera à Newark Airport. Je rejoins le bord de l’Hudson où à peine suis-je assis sur un banc qu’une averse m’oblige à ouvrir mon parapluie. Le soleil revenu, je renonce à attendre ici dans la crainte d’une nouvelle. Je retourne donc à Penn Station, longeant les files d’attente des voyageurs de Megabus en partance pour toutes les villes visitées avec celle qui n’est plus avec moi. Je prends la A, direction Far Rockaway, et en descends avec pas mal de traîneurs de valises stressés à Howard Beach. Là, j’achète à la machine un ticket pour l’Airtrain qui mène à JFK Airport et descends au Terminal 4. Il est 4.00 p.m., j’ai bien du temps à attendre avant mon envol de 11.55.

    A 6 p.m. je songe à elle qui doit décoller de Newark, direction Lisbonne puis Paris où elle n’arrivera qu’à dix heures demain matin.

    Vers 7 p.m. je dîne, avec l’aide d’Au Bon Pain, d’une pâtisserie danoise aux fruits indéfinissables accompagnée de jus d’orange puis prends un café, cela près de la porte des arrivées, où il y a une cinquantaine de jours, je faisais l’arrivant. Une grande famille d’Arabes, dont des femmes en tenue de fête, attend quelqu’un(e) avec des fleurs et des ballons. Cette personne n’arrive pas. Toutes et tous repartent tristement avec fleurs et ballons. Derrière la vitre, la file des taxis jaunes est toujours là, ma première et dernière vision de la vie new-yorkaise.

    Deux heures plus tard, je monte au niveau 4 où se fait l’embarquement. Je retire mon billet chez XL Airways, confie ma valise aux bagagistes puis subis la fouille américaine après avoir fait sonner le portique bien que débarrassé de sac, montre, clés, porte-monnaie, veste et chaussures.

    J’achète plus de trois dollars une petite bouteille d’eau mauvaise fabriquée par Coca Cola et m’assois dans la salle A 5 pour attendre l’embarquement du vol SE 071, observant la foule qui se laisse séduire par les produits en duty free (la consommation redonne de la dignité aux êtres sans chaussures et sans ceintures d’il y a peu).

    Ce ne sont pratiquement que des Français à cette porte A5, dont les plus ridicules portent un sweet NYPD ou un tee-shirt Abercrombie & Fitch. Avec un peu de retard, nous sommes autorisés à embarquer. Dans un angle de la descente vers l’avion, les stewards d’XL Airways vendent des cartouches de Marlboro détaxées. Une blonde sur le retour s’inquiète de la place qu’elle aura dans l’avion. Elle craint un mauvais voisinage. « En ce moment, je suis en introspection avec moi-même » dit-elle à l’un qu’elle drague et qu’elle aimerait pour voisin. Je croise les doigts pour ne pas me trouver à côté d’elle.

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  • Arno à Rouen, à ne pas manquer, me dis-je, peut-être est-ce la dernière fois pour lui ou pour moi. Un habitué du Cent Six me l’a précisé, « il y aura des places assises parce que le public d’Arno est âgé ».

    Je pars à sept heures moins le quart de chez moi, à pied et avec un parapluie. De la pluie (voire de la neige) est annoncée. Je ne suis pas le premier à l’arrivée. Une vingtaine de spectateurs de tous les âges me précèdent. D’autres sont vite derrière moi à qui j’apprends que l’ouverture des portes ce sera à vingt heures et pas avant. Ils pestent, c’est qu’il fait froid, toujours le vent sibérien.

    C’est complet, affiche-t-on avant d’ouvrir les portes. Nous entrons sans être palpés par les vigiles comme c’était le cas autrefois. Je trouve une place au milieu du troisième rang des gradins installés derrière la console technique et constate que quatre-vingts pour cent des arrivants choisissent la place assise quel que soit leur âge. Les places debout seront pour celles et ceux qui ne sont pas venus assez tôt.

    Un peu avant neuf heures, bien que ce ne fut indiqué nulle part, une première partie entre en scène, un trio nommé Amara ou Arama ou quelque chose comme ça, trois guitares dont l’une tenue par un chanteur pas loin de l’âge d’Arno. Il chante les grands espaces et comme on dit à côté de moi à l’issue : « C’est pas mal ».

    Vient le tour d’Arno et de ses quatre musiciens. C’est rock cette année, le son à fond. L’avantage, c’est qu’on n’entend pas son voisinage pendant les morceaux mais ce n’est pas à mon goût d’être submergé par la musique sans pouvoir souvent comprendre ce qui se chante. Les debout ne bougent pas, ils doivent en prendre encore plus dans les oreilles et dans les tripes.

    Je ne sais ce qu’Arno met dans son thé au lait mais cela a l’air très efficace, il ne s’assoit pas souvent sur sa chaise, raconte de façon confuse les mêmes histoires que les années précédentes ou des nouvelles qui y ressemblent, tournant en peu en rond dans son propos. Le seul moment où il me fait sourire, c’est quand, s’étonnant des manifestations anti mariage gay en France, il déclare : « Chez nous en Belgique, ça fait vingt ans que le boulanger a le droit de se marier avec le charcutier ».

    Il termine à fond avec quelques-uns de ses succès du passé dont le putain putain nous sommes quand même tous des Européens, un titre qui sonne de plus en plus ironiquement ou tristement au fur que le temps passe.

    Je rentre par le même quai bas, sous une petite pluie qui ne m’oblige pas à ouvrir mon parapluie. Il est onze heures quarante-cinq. Dans les rues traînent des types seuls qui ont l’air de préparer un mauvais coup.

    *

    Rue Quatre-Vingt-Neuf se demande ce jeudi pourquoi le menteur évadé fiscal Cahuzac a fait carrière politique à gauche alors que son parcours personnel aurait dû lui faire choisir la droite. Je ne trouve pas ça étonnant. Il a choisi l’endroit où il pourrait le mieux faire carrière. Ce n’est pas nouveau. Mitterrand aussi était de droite et a choisi la gauche pour faire carrière car à droite la place était prise par De Gaulle. Puis Chirac qui aurait pu être de gauche (ne vendait-il pas L’Humanité Dimanche sur les marchés), voyant la place prise par Mitterrand, dut être de droite.

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  • Eh bien, on dort plutôt efficacement sur un matelas posé sur le sol quand on a vécu la veille une journée de voyage des plus éprouvantes, nous disons-nous au réveil à 8.15 a.m. Je prends une douche courbé. Celle que j’ai suivie jusqu’ici la prend debout. Nous petit-déjeunons avec l’aide de confitures et de beurre récupérés dans les restaurants canadiens.

    Elle me suggère, pour notre dernière journée en Amérique, d’aller à Greenwich Village, ce que nous faisons avec le bateau orange puis la ligne 1 du métro. Descendus à Christopher Street, nous retrouvons le Waverly Restaurant où nous déjeunons excellemment, servis par de sympathiques Sergents Garcia. Chicken Salad Melt pour elle, Waverly Melt Deluxe pour moi, dont nous faisons moitié moitié, avec des French Fries et un cruchon de merlot de Californie, thé et café (More Coffee ? Yes).

    Nous nous baladons ensuite dans les rues arborées du Village. J’achète deux tasses souvenir pour ma fille, puis nous nous dirigeons vers l’Hudson River. Assis au bord de l’eau, face à New Jersey, nous regardons passer les bateaux et les jolies filles. Elle prend en note l’interminable journée d’hier puis nous suivons le rivage en direction de Lower Downtown, faisant moult photos, regrettant d’avoir à quitter NYC.

    Au bout de Manhattan, nous nous asseyons sur un mini banc pour profiter une dernière fois des beautés de la grande et haute ville puis nous rejoignons la gare maritime. Le ferry nous ramène à Staten Island. Du bateau, côté tribord, nous disons au revoir à New York by night.

    Débarqués, nous remontons vers notre somptueux logis, achetant en chemin deux muffins pour le lendemain puis accélérant le pas car un énorme nuage noir menace l’île triste d’une drache, un thé en arrivant, Internet et au lit.

    *

    Parmi nos photos du jour, plusieurs du One World Trade Center en construction. Il culminera à cinq cent quarante et un mètres. Un point d'observation sera aménagé en deux mille quinze à la hauteur de trois cent quatre-vingt mètres pour les futurs visiteurs du bâtiment. En serons-nous ? Elle certainement, moi je ne peux savoir.

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  • Jour férié, jour vide greniers, ce lundi premier avril de Pâques, l’éclairage public étant maintenant à l’heure d’été, je rejoins l’île Lacroix et prends la route, direction Appeville-dit-Annebault, près de Monfort-sur-Risle, comptant sur ma mémoire pour en retrouver le chemin et j’ai tort. A Bourg-Achard, je vais tout droit alors qu’il aurait fallu tourner à gauche, m’infligeant une dizaine de kilomètres en trop.

    C’est ici qu’il y a deux ans, j’ai laissé passer un tableau d’Utrillo, original ou copie. Je raconterais une telle histoire cette année, on y verrait un poisson d’avril. Il fait froid, il fait beau, on parle toujours de la météo : « En deux mille trois, c’était comme ça et après on a eu une canicule. » Du côté des vendeurs, on se plaint également des organisateurs municipaux : « Ils nous ont traités comme des chiens quand on est arrivé, plus on s’efforçait de parler calmement, plus ils nous hurlaient dessus ». Je fais le tour deux fois des nombreux exposants, pour rien.

    L’après-midi, c’est avec le bus Vingt (après avoir consulté sa fiche horaire car ce jour c’est un bus toutes les heures) que je rejoins le parquigne du Super U de Bihorel où un organisateur privé fait son petit déballage. Le plateau est balayé par un vent sibérien et le soleil n’y peut rien. J’achète une balance Terraillon à une vieille dame et plus qu’à attendre le bus du retour, un bon quart d’heure à poireauter devant la piscine. Comme à l’aller, je ne glisse par ma carte dans le composteur : quand le Lundi de Pâques tombe un premier avril, les transports en commun rouennais sont gratuits.

    *

    Nous sommes en avril, rue de la République les conteneurs à enterrer (destinés à recueillir les ordures rouennaises) ne le sont toujours pas, mais les pancartes annonçant qu’ils le seraient en février ou en mars sont toujours là.

    *

    Un Ministre du Budget socialiste qui planque son gros tas de billets sans doute mal acquis en Suisse puis à Singapour, jure pendant des mois qu’il n’en est rien, préside pendant ce temps des forums contre la fraude fiscale, et doit finalement avouer ce mardi qu’il n’est qu’un menteur et un voleur, la France vient de faire un grand pas vers la catastrophe.

    J’en vois certains, prompts l’autre semaine à se réjouir de la mise en examen de Sarkozy pour avoir capté l’argent de la vieille Bettencourt, faire cette fois profil bas et bouche cousue. Comment font-ils pour vivre avec un demi cerveau ?

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  • Assis en corbeille un peu avant seize heures à l’Opéra de Rouen ce dimanche de Pâques, je constate que donner un opéra ce jour-là, c’est l’assurance d’une salle incomplètement occupée, bien qu’y aient pris place en sus des vrai(e)s spectateurs et spectatrices, au titre d’invité(e)s, des représentant(e)s de la mouvance socialo-culturelle.

    Wozzeck d’Alban Berg est au programme, d’après Woyzeck de Georg Büchner, pièce inachevée pour cause de décès, dans une mise en scène de Mireille Larroche qui place l’action dans une banlieue interlope d’aujourd’hui revisitée par l’expressionnisme des années trente. Une camionnette transformée en habitation de peu, où vivent Marie et son enfant, entre en scène côté jardin. Quand elle en sortira côté cour, Marie sera morte tuée par le couteau de Wozzeck, drame de la misère et de la jalousie, fait divers. La musique est atonale et prenante, mais pas assez pour empêcher le couple de sexagénaires à ma gauche, lorsque le rideau peint est tiré pour permettre un rapide changement de décor, de discuter sur les notes de Berg. Un « chut » exaspéré de ma part les calme définitivement. Peu s’en faut ensuite que je m’endorme. Est-ce l’enfant toujours présent sur scène qui me lasse ? Il est en tout cas pratique pour occuper l’espace et capter l’attention lorsque les chanteuses et chanteurs n’y ont rien à faire ou en sont absents.

    L’équipe technique (parfois visible pendant) est la première applaudie (volonté de la metteuse en scène je suppose) puis les interprètes puis le chef Pierre Roullier (et les musicien(ne)s invisibles) puis Mireille Larroche et une autre femme (dont j’ignore le nom et la fonction).

    Il est presque dix-huit heures quand je referme la porte de la maison derrière moi.

    *

    Un bon moment que les travaux du jardin sont terminés, un peu bâclés vers la fin ce me semble. La pelouse a sévèrement morflé, piétinée par les ouvriers. De plus, ces derniers ont laissé sur l’herbe pavés et briques retirés. Combien de temps faudra-t-il avant que quelqu'un se mêle de les faire disparaître ?

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  • Cette nuit de samedi à dimanche, c’est le passage à l’heure d’été bien qu’on soit encore en hiver côté température. Une heure de sommeil en moins et je me lève au nouveau six heures. L’éclairage public de ma ruelle est automatisé. Il s’éteint comme la veille à six heures trente, mais une heure plus tôt. Il fait donc nuit noire quand je quitte la maison. J’ai du mal à trouver le trou de la serrure. La rue Saint-Romain est également sans éclairage, la rue de la Rép est avec, le pont Corneille aussi. Je retrouve l’obscurité dans l’île Lacroix, n’ayant à disposition qu’une moitié de lune pour discerner ma voiture. Elle est couverte de givre. Je gratte son pare-brise avec une vieille carte téléphonique puis elle consent à démarrer.

    Le vide grenier du jour n’est pas tout près, à Autheuil-Authouillet, village de la vallée d’Eure où est morte Simone Signoret, où elle vécut avec Yves Montand. Arrivé, je me heurte au barrage des organisateurs, fais demi-tour, me gare devant la Mairie d’Ecardenville et fais le chemin à pied, un petit kilomètre avant d’entendre la musique populaire.

    Tout le monde se plaint des Pâques aux tisons. Ça commence à bien faire. Et puis le changement d’heure en plus. On a hâte qu’il arrive le soleil. Il arrive mais ne suffit pas à réchauffer. Je fais assez rapidement l’aller et le retour de la rue Yves-Montand. Je ne sais à quoi on s’occupe dans ce pays mais pas à la lecture, semble-t-il. Mon sac reste vide de livres intéressants. Bizarre comme certains veulent acheter ce qui n’est pas à vendre, parfois les chaises des vendeurs, surtout leurs thermos.

    -Oh bah non, c’est pas à vendre, c’est notre café qu’est là-dedans, on en a besoin.

    J’en aurais besoin aussi mais pas au point d’entrer en boire un à l’Auberge Fleurie. Je retourne à Ecardenville et prends la route du retour. Nul embouteillage à l’entrée de Rouen, c’est Pâques, chacun(e) cherche des œufs à la campagne.

    *

    Justine et ses deux amants (propos de café avec sa copine) :

    -Gaétan, il est plutôt fêtard et Florian, il est plus pépère, plus posé.

    -Bah, qu’est-ce que tu vas faire ?

    -J’aime bien les deux, c’est ça le problème. Sur Facebook, je suis en couple avec Gaétan, Florian y veut m’ajouter comme amie. J’lui ai dit, j’veux pas. Personne sait que j’ai deux personnes.

    *

    Vieux couple en fin de repas au même endroit, elle et lui faisant les mots croisés des sets de table publicitaires, chacun le sien, sans échanger un mot.

    *

    Jeune couple en début de repas au même endroit, lui la saoulant d’explications sur la banque. Elle, Pauline, étudiante en droit (troisième année). Il a choisi un plat de poisson parce que c’est Vendredi Saint, elle un steak haché avec un œuf à cheval. Elle se lève pour aller chercher le poivre et le sel. Il en profite pour lui piquer un peu de viande.

    -T’as vraiment choisi le truc qui fait grossir toi, lui dit-il.

    -J’ai le droit de manger c’que je veux, lui répond-elle.

    Bientôt elle lui reproche d’être laid quand il mange, de ne pas savoir se tenir à table. Dans sa famille à elle, le repas c’est culturel.

    -Y a qu’à moi que tu trouves tous les défauts, lui dit-il.

    Ils vont prendre le café en terrasse.

    *

    -Kelly, tu viens là. Kelly, tu vas avoir une fessée, tu viens là (femme à chien, même endroit).

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