• Si j’ai acheté, l’autre mercredi à Paris, les Archives de la présidence de la République de Valéry Giscard d’Estaing (co-édition Somogy/ Archives nationales), c’est qu’on y trouve des informations passionnantes sur la vie dudit, en voici un florilège :

    « Audience d’un groupe folklorique de la Guadeloupe. »

    « Déjeuner avec des habitants de Chamalières et remise de décorations à Claude Wolff, maire de Chamalières, et de sa secrétaire Mademoiselle  Besson. »

    « Arrivée du Tour de France aux Champs Elysées. »

    « Audience de Mademoiselle Polack, journaliste yougoslave. »

    « Déjeuner avec les directeurs de journaux de province. »

    « Visite de l’arboretum du domaine de Chèvreloup. »

    « Emission télévisée Face aux jeunes, Antenne 2. »

    « Dîner avec les militaires. »

    « Déplacement dans la Meuse. »

    « Visite à l’Ecole nationale des sapeurs-pompiers de Nainville-les-Roches. »

    « Déjeuner avec Bokassa 1er, empereur de Centrafrique. »

    « Messe à Saint-Louis-des-Invalides. »

    « Réception des Catherinettes. »

    « Réponse à la millionième lettre reçue. »

    Je passe sur les multiples chasses à Marly, à Chambord, à Rambouillet. Ça donne vraiment envie de faire Président de la République mais cela n’est rien en comparaison des activités de sa femme :

    « Inauguration par Anne-Aymone Giscard d’Estaing de la résidence Club au Vésinet. »

    « Déplacement d’Anne-Aymone Giscard d’Estaing dans les Vosges. »

    « Vente de charité de l’association de la 2nde division blindée porte de Versailles, en présence de Anne-Aymone Giscard d’Estaing. »

    « Déjeuner en l’honneur d’Anne-Aymone Giscard d’Estaing à l’hôtel « Continental » avec le club des « Femmes de valeur ». »

     « Visite de l’arche de Noël de la Maison de la radio par Anne-Aymone Giscard d’Estaing. »

    « Déjeuner en l’honneur d’Anne-Aymone Giscard d’Estaing à Chaumont-sur-Tharonne par l’association des restauratrices cuisinières. »

    Moi, je serais Marie-Ségolène Royal, je me remarierais avec François Hollande.

    *

    Une épouse prénommée Anne-Aymone, des filles prénommées Valérie-Anne et Jacinthe, mais hélas, des fils prénommés Henri et Louis. Avec celle qui m’aidait à porter le fardeau des archives de la présidence giscardienne le long du canal de l’Ourcq la semaine dernière, on les a rebaptisés les deux garçons Giscard (d’Estaing) : Renon-Cule et Tuber-Cule.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Il fait encore nuit ce dimanche matin quand, avec celle qui a la carte de la Normandie sur les genoux, je prends la route de La Chapelle-Réanville que je sais être près de Vernon. A la hauteur d’Amfreville-la-Mivoie, des appels de phare nous informent d’une présence policière un peu plus loin.

    Effectivement, deux des ronds-points sont chargés en képis occupés à faire souffler dans le ballon les sortant(e)s des boîtes de nuit (comme on disait autrefois). Je fais partie des non contrôlés(e). Bientôt, le ciel prend une couleur orangée.

    Au Goulet, une pancarte indiquant la bonne direction permet de ranger la carte routière. Le paysage est cent pour cent normand, vaches et moutons dans les prés, ruisseau sinuant, maisons de pierre, églises charmantes. On arrive à La Chapelle-Réanville. Je suis les deux voitures qui me précèdent pour trouver le vide grenier qui s’étale sur deux prés. Je me gare à distance respectable, près de l’église, snobant les parquignes boueux improvisés dans les champs.

    Six cents exposant(e)s sont annoncé(e)s, je pense qu’il y en a moins. C’est suffisant pour qu’elle fasse l’acquisition de deux sacs à main et que je devienne propriétaire d’une paire de chaussures. Je trouve aussi un cédé de Barbara intitulé En liberté sur Europe Un. Elle y interprète en mil neuf cent soixante-neuf des chansons choisies dans le répertoire français, parmi lesquelles des titres d’Aznavour, Ferré, Gainsbourg, Trenet et Brassens.

    -Cinquante centimes à cause du boîtier qui est cassé, me dit le vendeur.

    Je suis d’accord. L’homme m’offre un autre cédé sans intérêt afin que j’en récupère le boîtier.

    Avant de quitter le village, nous faisons quelques dizaines de mètres sur le chemin de découverte. On y trouve des mûres.

    *

    On sonne. Je regarde par la fenêtre.

    -Bonjour, c’est Century Vingt et Un, vous pouvez nous ouvrir pour que l’on distribue des papiers ?

    -Non.

    Certains jours il ne faut pas appuyer sur mon interphone.

    *

    Ce lundi matin, j’écoute sur France Culture le directeur Olivier Poivre (d’Arvor) qui bafouille les nouveaux programmes. La même chose, en désordre, et en un peu moins bien, ce me semble.

    *

    « Un monsieur de soixante-dix ans nous offre une bouteille de porto de dix ans d’âge », « Une dame de quatre-vingt-six ans écrit à sa banque », lis-je ici et là. Je demande : « Heu, en quoi l’âge du monsieur (de la dame) est-il important ? » On me répond à côté de la question. J’entends bien pourtant le sous-entendu.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Samedi après-midi, juste avant que n’arrive celle qui me rejoint le ouiquennede, j’apprends grâce au réseau social Effe Bé qu’il se passe quelque chose sur le toit du bâtiment en construction connu sous le nom d’Espace Monet Cathédrale. Une photo de Thomas Boivin montre, sur fond de Cathédrale, un piano déjà en place, où joue à quatre mains un couple de musiciens, et un autre en passe de le rejoindre, accroché à la grue. Je me renseigne.

    Pour fêter le centenaire de la création de l'œuvre de Stravinsky, Franck Saint-Cast tourne là-haut Le Sacre du printemps, version deux pianos, interprété par Ursula Von Lerber et Christian Erbslöh. Des extraits vidéo sont visibles sur le Net. La chorégraphie semble assurée par les ouvriers en bâtiment, avec rôle primordial au grutier.

    J’ouvre la fenêtre donnant sur la ruelle. Les notes rebondissent sur la maison d’en face. Quand celle que j’attends surgit, je lui demande si elle entend le piano.

    -Viens, lui dis-je, on va essayer de le trouver.

    -Tu sais où il est ? me demande-t-elle. Je lui dis que non, non.

    On s’approche, slalomant entre les touristes. Près de l’endroit où ça se passe, les notes de l’accordéon en poste devant le magasin Etam et des cloches de la Cathédrale sonnant quinze heures se mêlent aux notes de piano, délicieuse cacophonie qui complique le jeu.

    Elle ne trouve pas. Je lui dis les deux pianos sur le toit. Avant que je puisse dire non, elle ouvre la porte du chantier et m’entraîne à sa suite. J’ai bien du mal à la convaincre qu’on ne sera pas les bienvenus là-haut. Elle accepte finalement de faire demi-tour et c’est depuis le jardin qui nous suivons avec l’oreille la suite du tournage.

    *

    Fâcheuse innovation en vitrine de la bouquinerie rouennaise Le Rêve de l’Escalier : Big Sister, le livre de la photographe Hana Jakrlova, montrant des images d’une maison close de Prague, ouvrage publié par Images en Manœuvre Editions, est affublé d’« Interdit aux moins de seize ans ».

    *

    De Léautaud dont jamais je ne me lasse, cet extrait d’Amours qu’on peut l’entendre lire dans son entretien avec Robert Mallet : L'amour, c'est le physique, c'est l'attrait charnel, c'est le plaisir reçu et donné, c'est la jouissance réciproque, c'est la réunion de deux êtres sexuellement faits l'un pour l'autre. Le reste, les hyperboles, les soupirs, les « élans de l'âme » sont des plaisanteries, des propos pour les niais, des rêveries de beaux esprits impuissants.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Ce mercredi donc, elle et moi nous dirigeons vers le quartier japonais de Paris. Elle me montre au passage la partie japonaise des Galeries Lafayette puis je découvre le restaurant Drouant devant lequel je suis passé tant de fois sans le voir, place Gaillon. Sur la façade sont peints les noms de certains des membres de l’Académie Goncourt, en noir les morts, en rouge les vivants ; autrefois : Jules Renard, Colette et Jean Giono ; aujourd’hui : Daniel Boulanger, Edmonde Charles-Roux et Robert Sabatier, une impression de dégringolade.

    Un peu plus loin, nous entrons chez Book-Off, côté japonais puis côté français, où j’ai l’intention de n’acquérir aucun ouvrage mais d’où je ressors avec le livre le plus étrange que j’aie jamais acheté Archives de la présidence de la République de Valéry Giscard d’Estaing, énorme objet de sept cent sept pages, valeur quarante-cinq euros, vendu un euro.

    -Je ne sais pas ce que je vais faire de ça, dis-je à la vendeuse, mais vous ça vous débarrasse.

    Elle nous suggère de l’utiliser pour faire un herbier. Mon Giscard à la main, nous prenons le passage Choiseul. Il a bien changé depuis le temps où Céline y était enfant, m’explique celle qui me tient l’autre main (elle lit Mort à crédit en ce moment). A la sortie, son téléphone sonne. C’est une bonne nouvelle. On veut bien d’elle dans une colocation.

    Arrivés rue Saint-Anne, nous entrons au restaurant Higuma, l’un de ceux du coin où l’on sert de la cuisine traditionnelle japonaise, et commandons des donburis (grands bols de riz sur lesquels reposent diverses garnitures), crevettes pour elle, bœuf et calamars pour moi. Tandis qu’on s’agite en cuisine à coup de wok enflammé, on nous sert deux soupes grasses que nous mangeons du bout des lèvres. Le personnel nous regarde alors bizarrement, au point qu’on se demande si on ne commet pas un impair. Ne sont-ce pas des sauces ? Une serveuse parlant français s’avance et nous dit que notre soupe est mal faite. On nous en apporte une autre avec plates excuses, pas meilleure que la première. Le plat est également décevant et gras, peu de viande et de produits de la mer, surtout du riz et des légumes. Quant au thé demandé, il est oublié, n’arrivant que bien plus tard. Les trois salles sont complètes, moitié européens moitié asiatiques, ambiance cantine. Je me concentre sur mes baguettes et suis content quand j’en ai fini, tandis qu’elle ne termine pas. Perplexes, nous considérons la file d’attente qui s’allonge sur le trottoir à l’entrée des différents restaurants japonais et prenons à Pyramides une rame de métro qui nous dépose au parc de la Villette

    Après un café et thé pris à la terrasse du Couique installé dans l’une des folies de Bernard Tschumi, nous nous allongeons sur la pelouse près du canal de l’Ourcq où nous profitons du soleil.

    Plus tard, nous allons au long du canal jusqu’à Pantin. Elle photographie les Grands Moulins transformés en immeubles de bureaux et la Grande Blanchisserie toujours en activité. A un moment, il faut songer à regagner la gare Saint-Lazare. Nous nous séparons, elle allant vers son futur logement, moi regagnant le mien à Rouen.

    *

    La crise de la quarantaine, on ne parle que d’elle. Pourtant, bien plus terrible est celle de la soixantaine (en ce qui me concerne).

    Partager via Gmail Yahoo!

  • A peine le train de sept heures vingt-cinq a-t-il quitté la gare de Rouen ce mercredi matin que le contrôleur se pointe et apprend à l’un de mes voisins que son billet, remis par son entreprise, est périmé.

    -Je vous laisse aller à Paris avec ce billet, lui dit-il, mais faites le nécessaire pour le retour.

    Ce n’est sans doute pas ce contrôleur qui a obligé les deux jeunes gens sans billet à descendre à Val-de-Reuil la semaine dernière, lesquels ont voulu rejoindre Rouen à pied en suivant les voies, l’un d’eux se faisant tuer par un train dans le tunnel de Oissel.

    A l’arrivée à Saint-Lazare, celle que je rejoins me surprend en surgissant par derrière et, main dans la main, nous remontons la rue d’Amsterdam. Place de Clichy, nous tournons à droite et longeons la frontière de Pigalle jusqu’à La Fourmi où il s’agit de prendre une boisson chaude que nous apporte une serveuse totalement mal aimable. En face, un clochard a pris Le Divan du Monde au mot en s’allongeant sur ses marches. Il est bientôt invité à aller dormir ailleurs par l’un des hommes du lieu.

    Elle me raconte sa dernière journée de stagiaire bénévole chez le Tampographe Sardon et m’offre trois tampons confectionnés par ses soins : « Crève salope », « J’en ai rien à foutre » et « Ce livre a été volé dans la bibliothèque de : ». Le premier pourrait servir à tamponner la tronche du contrôleur précité, mais quand même pas celle de l’antipathique serveuse de La Fourmi qui ne nous dit pas au revoir.

    Nous remontons la rue des Martyrs, apprenant au passage que Michou et ses Michettes sont en vacances, et arrivons devant le Théâtre de l’Atelier où, avec celle qui me tenait alors la main, je vis Michel Bouquet dans Le Roi se meurt de Ionesco, entrons ensuite dans l’imposante église Saint-Jean de Montmartre (première église en béton armé, m’apprend-elle). Nous nous y embrassons après qu’elle m’a confié le rôle tenu par ce lieu dans notre histoire.

    Je suis fatigué, la faute à des cinéastes venus tourner une scène nocturne à une heure du matin dans ma ruelle, pas le courage de monter jusqu’en haut de Montmartre. Nous redescendons par la rue Lepic, direction le quartier de l’Opéra avec l’envie d’y déjeuner dans un véritable restaurant japonais.

    *

    Graffiti parisien : « La meilleure des retraites c’est la mort ».

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Jamais une journée de beau temps sans orage ou averse le lendemain, c’est le cas ce dimanche matin, le sol est mouillé et la nuit laisse deviner un ciel noir mais elle et moi avons trop envie de quitter Rouen pour renoncer au vide grenier de Muids dans l’Eure.

    Nous y sommes au lever du jour. Peu à peu, l’énorme nuage laisse place au ciel bleu. La température monte. Le sac qu’elle a acheté se remplit des pots de confiture que j’achète. Il semble que dans ce plaisant village les dames aiment faire cuire des fruits avec du sucre. Un homme aussi en propose qui nous fait deviner à quoi est celle que nous goûtons.

    Celle qui m’accompagne propose la pomme de terre. Elle a gagné. L’homme lui offre le pot de confiture de Bintje. Il a flashé sur toi, lui dis-je. Elle prétend qu’il n’en est rien mais quand elle repasse par là seule, le séducteur lui propose de partir pour dix jours de vacances avec lui à Gênes. Nous quittons Muids car il commence à y faire trop chaud.

    Il est à peine neuf heures. Après la traversée de la Seine, je tourne à droite. Nous passons Portejoie et je m’arrête derrière la minuscule mairie de Tournedos. Ce village est moins connu que le précédent. Sa promenade au long de la Seine est bien cachée par les bourgeois(e)s résident(e)s secondaires qui l’habitent. En connaisseur, je passe, et elle ensuite, par-dessus la chaîne qui semble en interdire l’entrée. Quel meilleur endroit pour n’être que deux à se promener entre fleuve et jardins fleuris.

    Avant de rentrer, nous faisons une dernière escale à Poses, passons la Seine à pied par le barrage, avec l’intention de boire un verre à la Guinguette de Dédé mais celle-ci est fermée. Nous nous rabattons sur le bistrot du village cependant que les nuages réapparaissent.

    Les premières gouttes tombent au moment où nous arrivons à Rouen. Je la dépose chez ses parents. Rentré chez moi, j’écoute les infos. L’actualité bruit de la prochaine chute de Kadhafi et du prochain abandon des charges contre Strauss-Kahn.

    *

    Donc, Dominique Strauss-Kahn est aussi innocent que l’était Michael Jackson. Et Martine Aubry de se réjouir sur France Info : « C'est du bonheur, un soulagement (...) On attendait tous qu'il puisse sortir enfin de ce cauchemar ».

    Je sais désormais qu’en aucun cas je ne voterai pour elle aux Présidentielles.

    *

    Me voici pour une fois d’accord avec la communiste Marie-George Buffet : « le refus de faire juger l'affaire dans laquelle l'ancien directeur du FMI est accusé de viol est une mauvaise nouvelle pour la justice et une mauvaise nouvelle aussi pour les femmes. »

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Pas question de rester à Rouen ce ouiquennede, elle comme moi nous avons besoin de prendre l’air et pour ça, au matin de ce samedi, nous prenons la route de Dieppe sous un ciel prometteur (comme on dit). Après un crochet par Pourville-sur-Mer, je me gare en haut de la falaise, côté château, d’où l’on a si belle vue sur la ville et la mer.

    Après la descente, nous abordons Dieppe par son marché. Il est tôt mais la foule est déjà aux achats. Nous entrons au Tout Va Bien pour une boisson chaude. La maison s’est considérablement agrandie depuis la dernière fois par l’achat des deux commerces voisins. Il en résulte pour l’intérieur du bâtiment trois styles différents et deux marches à descendre ou à monter. Avant onze heures, le café est à un euro mais inutile d’espérer un verre d’eau du mal aimable serveur.

    Sortis de là, nous humons les poissons et les crustacés du marché des pêcheurs locaux près du village de tentes installé pour l’arrivée de la course en solitaire du Figaro, puis sous le soleil, après avoir retenu une table en terrasse au Galion, gagnons le bord de la terre où stationnent les véhicules militaires des nostalgiques de la Deuxième Guerre Mondiale commémorant le débarquement raté des Canadiens en quarante-deux. Plutôt que de mettre le pied sur la plage, nous préférons nous asseoir sur un banc d’où nous observons le défilé des familles. Le chorte à fleurs est de sortie. Tous les personnages de Duane Hanson sont là et quelques autres aussi qui valent la photo que nous ne faisons pas.

    A midi, avant que tous les restaurants du bord de port soient pris d’assaut, nous sommes de retour au Galion et les seuls à avoir droit au menu à onze euros quatre-vingt-dix non servi le samedi (la pancarte encore présente sur le trottoir lors de la réservation nous l’a autorisé) : salade de haddock et de hareng mariné, lieu et saumon, pour dessert un tiramisu qui n’en a que le nom et du vin blanc en pichet plutôt cher, pas de quoi se plaindre en définitive. Ce n’est pas l’avis d’une femme sortant de cette auberge. Elle déclare à celles et ceux qui attendent leur tour sur le trottoir que c’est dégueulasse.

    Nous allons prendre le café de l’autre côté, dans le quartier du Pollet, au Mieux Ici Qu’En Face, lequel n’usurpe pas son nom, observant de la terrasse le mouvement des bateaux dans le port dont l’arrivée du ferry d’Angleterre. Encouragés par le beau temps, nous grimpons sur la falaise d’où nous parviennent les cris des mouettes dans le ciel et des perruches dans la nacelle du plus haut manège de la fête foraine. L’église Notre-Dame-de-Bonsecours nous ouvre ses portes. Elle sert de mémorial à ceux qui ont péri en mer « Vous qui entrez ici… pensez à ceux dont les noms sont gravés sur ces murs ». Ce que nous faisons, elle et moi, avant de redescendre et de nous désaltérer de nouveau à la terrasse du Mieux Ici Qu’En Face tandis que le pont tournant laisse passer un cargo bleu.

    *

    Les soucis du commerce rouennais : rue du Père Adam la Galerie Etre n’est plus et le Jardin d’Eglantine est fané définitivement.

    *

    Ce que j’entends dans les rues : « Chaleur en avril mai, pluie depuis le quinze juillet, on n’y comprend rien ».

    *

    Les mendiant(e)s en ville, celles et ceux qui apparaissent, celles et ceux qui disparaissent, parfois un(e) revenant(e), comme l’un que je voyais autrefois rue de la Champmeslé, réapparu rue Ganterie. Sur son carton « Je sors de prison, aidez moi ». Ça a le mérite de la franchise et ça explique son absence.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Vendredi, c’est à dix heures que celle qui me tient la main arrive à Rouen. Elle me parle de ses difficultés à trouver un logement dans la capitale. Elle a de quoi être dégoûtée et angoissée. Allons faire un tour.

    Nous passons par la bouquinerie du Rêve de l’Escalier où, tandis que je furète, elle se plonge dans un livre consacré aux gnomes, puis par les voies sans boutiques nous rejoignons la rue Verte. Le restaurant Sushi Tokyo vient de rouvrir et nous entendons profiter de la formule à volonté. Comme boisson, un pichet de vin blanc fera l’affaire. Il aide au maniement des baguettes. Pendant un bon moment, nous nous concentrons sur les sushis, les sashimis et les makis en disant un peu de mal des autres client(e)s, à peine gêné par l’écran plat qui nous montre en boucle l’orage mortel du festival Pukkelpop. Pour finir, nous choisissons les boules de coco et la glace rhum raisin.

    Après une pause bien méritée à la maison, nous sommes en fin d’après-midi devant une boisson fraîche en terrasse au Grand Saint-Marc, sur la place du même nom. L’endroit est fort animé, notamment par un joueur de guitare flamenco et ses amis. Je le croise parfois rue Saint-Romain où il offre son répertoire contre quelques pièces. Il a une bonne tête, de nature à attirer la sympathie. Ce jour, c’est une femme bien allumée, une quadragénaire éméchée, qui s’installe près de lui, le genre de personne à qui je ne permettrais jamais de s’asseoir à ma table.

    Avec celle qui m’accompagne, je joue au jeu de Poutine. Après « Poutine pianiste », « Poutine chanteur », « Poutine plongeur sous-marin », « Poutine à la pêche », « Poutine archéologue », « Poutine conduisant une Formule Un », « Poutine en haut du mur d’escalade », nous lui en trouvons des futurs exploits au ridicule Premier Ministre de la Russie.

    Elle en est à « Poutine arrête l’incendie aux portes de Moscou » lorsque je lui décoche « Le visage de Poutine apparaît sur le Saint Suaire ».

    *

    Les nôtres de politicien(ne)s ne sont pas moins ridicules mais moins drôles. Vues à la télévision, les Vertes Eva Joly et Cécile Duflot se congratulant devant une foule en délire.

    Elles n’arrivent pas à cacher qu’elles ne s’aiment pas.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Jamais je n’ai trouvé la ville de Rouen aussi ennuyeuse qu’en ce mois d’août deux mille onze. La trêve la rend tellement morte qu’on peut y faire des travaux dans tous les coins (ligne de métro, quai rive gauche, voie de Teor et cætera) sans que ça ne gêne personne. N’errent dans les rues que touristes pressés (côté parc d’attraction médiéval) et acheteurs compulsifs (côté plus grand centre commercial à ciel ouvert de Normandie). C’est dire que j’attends la rentrée avec impatience (chose que je n’aurais évidemment pas écrite lorsque je travaillais).

    Celle et ceux qui vont revenir de vacances retrouveront la ville dans l’état où ils l’ont laissée. L’immeuble en construction pompeusement baptisé Espace Monet Cathédrale est juste un peu plus haut qu’avant l’été. Quant aux jardins de la Cour d’Albane, créés par la municipalité en guise de consolation, ils attendent le retour des ouvriers (la fin des travaux étant prévue pour juillet deux mille onze, il va falloir se dépêcher).

    *

    Autre victime de l’été France Culture dont les programmes ne sont que rediffusions et, le matin, des tunnels de trois heures sur des sujets qui m’indiffèrent (guerre d’Algérie, Marlene Dietrich, Fidel Castro, Hemingway), ce qui me fait redécouvrir France Musique sauf en cas de bonne surprise, comme ce matin à six heures une Mythologie de poche de la radio consacrée à André Frédérique, le poète pharmacien en faillite « oublié avant d’être connu » dont on ne découvrit le corps que deux jours après son suicide à l’âge de quarante-deux ans (suicide dû à deux femmes d’après l’homme de radio José Artur : sa mère morte l’année précédente et une certaine Evelyne de dix-huit ans l’ayant quitté).

    *

    Ce jeudi matin, rentrant du marché des livres de la place des Emmurées, je croise à l’entrée du pont Corneille un jeune homme à vélo qui chante à tue-tête l’Hexagone de Renaud : La France et un pays de flics/ A tous les coins de rue y en a cent/ Pour faire régner l’ordre public/ Ils assassinent impunément puis devant l’Office de Tourisme un chauffeur de taxi quinquagénaire qui en attendant son client fait de la corde à sauter, à chacun ses plaisirs.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • L’achat du numéro spécial Sexe des Inrockuptibles est l’une de mes vilaines manies estivales. J’y cède cette année avec moins d’enthousiasme que les années passées. C’est que j’ai déjà lu la plupart des articles via Internet.

    La couverture des Inrocks montre une main tirant sagement sur la culotte d’une femme dont on ne voit que le dos. L’intérieur est un peu plus chaud, sans excès. Je lis ce numéro dans le jardin de la copropriété ce mardi après-midi sous le soleil revenu sans m’attirer les foudres de qui que ce soit, appréciant particulièrement l’article intitulé Le sexe d’à côté. Il est question de la vie sexuelle de son voisinage, vue ou entendue. Pour le voyeur que je suis, cela ne peut se passer que de l’autre côté de la ruelle et bien longtemps qu’il ne s’y donne plus rien à voir. La prochaine rentrée universitaire remédiera peut-être à cette lacune.

    *

    Auparavant, je lis L’œil de vieux de Tiziano Scarpa (Editions Christian Bourgois) au Son du Cor, ouvrage sous-titré Bref essai sur l’avant-dernière histoire d’amour vécue par la femme à laquelle je désirerais m’unir par un lien affectif durable. Mon exemplaire a appartenu à la Médiathèque du Grand-Quevilly. Il est marqué « Pilon le 21 mai 2009 ». Cet essai commence ainsi : Depuis sept mois, elle signe Maria Grazia Graticule mais son vrai nom est Carolina Groppo. En tant que Maria Grazia Graticule on la paie pour dessiner des organes génitaux masculins et féminins sur les traductions en italien des mangas…

    *

    Cette pratique n’est pas française. Mes mangas érotiques souffrent de l’absence de ce que dessine Maria Grazia. Une fois, j’ai proposé à celle avec qui je suis uni par un lien affectif durable de dessiner ce manque. Elle n’a pas donné suite.

    *

    L’œil de vieux m’intéresse beaucoup au début, moins au milieu, et plus du tout vers la fin. J’en sauve ceci : Une bibliothèque universitaire est un lieu où s’exaltent au plus haut point les sous-entendus sexuels, justement parce qu’elle tend idéalement à l’abolition de la catégorie du corporel, réduisant les usagers à de purs esprits.

    *

    Sur le site de Paris Normandie ce mercredi : « Internet est un moyen de communication devenu incontournable et indispensable à un grand nombre de personnes. La Ville de Dieppe se modernise et suit l'évolution des nouvelles technologies, elle... » La suite est réservée aux abonné(e)s. On regrette de ne pas en être.

    Partager via Gmail Yahoo!





    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires