• Bon allez ce mercredi j’y vais, me dis-je en montant dans le train, songeant à l’exposition Kandinsky dont la file d’attente m’a découragé naguère. Arrivé à Paris, où il s’agit aussi de retrouver à seize heures celle qui me tient la main, je vaque à mes occupations habituelles, puis pique-nique tôt au pied de la tour Saint-Jacques. J’arrive à Beaubourg un peu après onze heures.

    Les files sont là, mais moins importantes que précédemment. Muni de mon passe annuel, je me mets du côté des entrées réservées. J’atteins assez vite la vague fouille des sacs. Je pose le mien à la consigne et grimpe au sixième par la chenille. L’encombrement des premières salles m’incite à visiter Kandinsky selon ma technique habituelle, à rebrousse-temps.

    Me voici presque seul devant les tableaux de la fin, peut-être les plus beaux (beaucoup venus du musée Guggenheim de New York), si souvent vus en reproduction. De là, je remonte doucement vers les origines, croisant au passage l’original du postère longtemps affiché par mes soins dans les classes maternelles où je suis passé, Lyrique, tableau de mil neuf cent onze, venu de Rotterdam, qui montre en quelques lignes un cheval au galop et son cavalier accroché.

    J’aboutis à la première salle, moins peuplée qu’à mon arrivée, constatant encore une fois comme les musées sont repaires de jolies filles. Celle qui est devant moi se retourne soudain et me salue :

    -Ah tiens, bonjour.

    C’est Laurence, une ancienne mienne voisine de venelle rouennaise. Elle me dit les banalités d’usage, que c’est bizarre de se retrouver là, que le monde est petit. Je lui réponds que cela montre que nous avons des intérêts communs, puis lui souhaite une bonne visite.

    Je me revois quand elle habitait là, un jour dans la ruelle, l’invitant à passer le soir même chez moi boire quelque chose (comme on dit). Elle accepte. Je lui dis qu’elle peut venir avec son petit garçon. Non, non, elle le donnera à garder à sa grand-mère.

    Ce soir-là, elle n’est jamais venue. Depuis, elle a déménagé et on se croise (rarement) de-ci de-là.

    Je refais, dans le sens chronologique cette fois, la visite de l’exposition Kandinsky. Avec lui, passant de strate temporelle en strate temporelle, j’évolue vers plus de lisibilité, plus de légèreté, me disant (ce n’est pas très malin) qu’à chaque époque de la vie de ce peintre, quand on en a vu un, on les as tous vus. Cela ne m’empêche pas de rester longuement devant chaque tableau.

    La foule n’est pas trop gênante, le chemin labyrinthique et aéré permet de s’isoler avec une œuvre, ce qui m’est d’autant plus bénéfique qu’aujourd’hui se trouvent à Beaubourg de nombreux éternueurs et éternueuses. Je les soupçonne d’être revenu(e)s du Mexique avec la grippe porcine.

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  • Comme il arrive qu’il ne pleuve pas à Rouen, je retrouve à chaque beau temps le chemin du Son du Cor, rue Eau-de Robec, où je m’installe en terrasse un peu après midi pour profiter du soleil avant que l’immeuble voisin ne le cache. J’y retrouve les mêmes que l’été dernier, les réservé(e)s à qui je dis vaguement bonjour et les envahissant(e)s que je snobe ouvertement. Je ne viens pas ici pour m’engluer dans les bavardages incohérents, juste pour lire et écrire, pour écouter et regarder aussi.

    Je constate que celui qui était encore étudiant en juin corrige désormais au stylo rouge des copies de mathématiques. Un autre, inséparable des deux accrochés aux mots fléchés de Paris Normandie, ne les salue plus, s’asseyant ostensiblement loin d’eux. La plupart des habitué(e)s cependant n’ont pas changé, attendant toujours quelque chose.

    En face, l’un des bâtiments à pans de bois est en grande rénovation. Du rez-de-chaussée et du premier étage ne restent qu’une partie du squelette. Celui-ci est étayé par de nombreuses poutrelles métalliques qui enjambent le factice Robec. L’une des serveuses me dit qu’il y en a pour un an de travaux, ce que j’ai du mal à croire.

    Voici que s’installe près de moi la petite famille Bobo, retour de chez Leroy Merlin. Je change de place mais ce n’est pas suffisant. Les trois moutards ne tardent pas à se répandre, rappelés inutilement par maman. Bientôt les voilà privés de chocolat, puis papa menace de prendre de l’argent dans leur tirelire, avant que ne s’annonce une fessée possible, tout cela sans effet. Je poursuis comme je peux mon inactivité de lecteur.

    Lorsque la famille Bobo va bricoler ailleurs arrivent les ouvriers du chantier d’en face. Comparé aux cris des enfants, le bruit de la scie circulaire est douce chanson à mes oreilles.

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  • Ce ouiquennede, grâce à elle, qui m’en donne le courage et qui est capable de voir ce qui me va (comme on dit) ou pas, je fais le grand tri de mes pulls et chemises. Bientôt, le lit où elle se trouve est envahi de vêtements que je n’ai pas vus depuis longtemps. Elle les déplie et les replie, les classe en trois piles : oui, non, peut-être. Ce sont surtout les pulls qui trinquent. Comment ai-je pu acheter ça, lui dis-je (et me dis-je) à plusieurs reprises. J’en retrouve même un fabriqué en Yougoslavie.

    Tandis qu’elle m’aide à enfourner les rejetés dans de grands sacs, elle est prise d’éternuements, la faute aux acariens qui y nichent, me dit-elle. Je la plains, satisfait d’avoir de la place dans mon placard.

    Maintenant, quoi faire de ces vêtements (parmi lesquels certains que je n’ai quasiment jamais mis) ? Ce lundi, je passe à la Mairie. La dame de l’accueil ne sait pas me renseigner. Elle me donne un tout petit papier où figurent l’adresse et le téléphone de la Maison des Associations.

    J’appelle. On me donne des adresses d’associations situées trop loin, dans des communes voisines où je n’ai pas envie d’aller. Non, me dit-on, pas de bacs à vêtements en ville. Il y en a eu. Il n’y en a plus.

    Peut-être porterai-je ces sacs à Evreux quand j’irai voir ma fille, sur la place où elle habite se trouve une telle benne à vêtements, obligé de faire l’écocitoyen (comme dit en son jargon Valérie Fourneyron, maire) ailleurs qu’à Rouen, ville encore imparfaite.

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  • Je termine, en regrettant que cette lecture s’achève, la correspondance de cette femme exceptionnelle que fut Frida Kahlo, trente-deux années de missives ardentes, amoureuses, incendiaires, désespérées, euphoriques ou douloureuses, selon les jours.

    Beaucoup de lettres sont à retenir. A titre d’exemple, voici ce qu’elle écrit des surréalistes le seize février mil neuf cent trente-neuf à Nickolas Muray, l’un de ses amants (elle est à Paris où André Breton, qui a compris ce que vaut sa peinture, organise sa première exposition européenne) : Quand je suis arrivée, les tableaux étaient encore à la douane, parce que ce f. de p. de Breton n’avait pas pris la peine de les en sortir. Il n’a jamais reçu les photos que tu lui as envoyées il y a des lustres, ou du moins c’est ce qu‘il prétend ; la galerie n’était pas du tout prête pour l’exposition, d’ailleurs ça fait belle lurette que Breton n’a plus de galerie à lui. Bref, j’ai dû attendre pendant des jours et des jours comme une idiote, jusqu’à ce que je fasse connaissance de Marcel Duchamp (un peintre merveilleux), le seul qui ait les pieds sur terre parmi ce tas de fils de pute de surréalistes. Lui, il a tout de suite récupéré mes tableaux et essayé de trouver une galerie. Finalement, une galerie qui s’appelle « Pierre Colle » a accepté cette maudite exposition. Et voilà que maintenant Breton veut exposer à côté de mes tableaux, quatorze portraits du dix-neuvième siècle (mexicains), ainsi que trente-deux photos d’Alvarez Bravo et plein d’objets populaires qu’il a achetés sur les marchés du Mexique, un bric-à-brac de vieilleries, qu’est-ce que tu dis de ça ?

    (…)

    Bon, il y quelques jours, une fois que tout était plus ou moins réglé, comme je te l’ai expliqué, j’ai appris par Breton que l’associé de Pierre Colle, un vieux bâtard et fils de pute, avait vu mes tableaux et considéré qu’il ne pourrait en exposer que deux, parce que les autres sont trop « choquants » pour le public !! J’aurais voulu tuer ce gars et le bouffer ensuite, mais je suis tellement malade  et fatiguée de toute cette affaire que j’ai décidé de tout envoyer au diable et de me tirer de ce foutu Paris avant de perdre la boule. Tu n’as pas idée du genre de salauds que sont ces gens. Ils me donnent envie de vomir. Je ne peux plus supporter ces maudits « intellectuels » de mes deux. C’est vraiment au-dessus de mes forces. Je préfèrerais m’asseoir par terre pour vendre des tortillas au marché de Toluca plutôt que de devoir m’associer à ces putains d’ « artistes » parisiens. Ils passent des heures à réchauffer leurs précieuses fesses aux tables des « cafés », parlent sans discontinuer de la « culture », de « l’art », de la « révolution » et ainsi de suite, en se prenant pour les dieux du monde, en rêvant de choses plus absurdes les unes que les autres et en infectant l’atmosphère avec des théories et encore des théories qui ne deviennent jamais réalité.

    Ce livre ne va pas tout de suite rejoindre ma bibliothèque, je l’emporte avec moi mercredi à Paris afin de le prêter à celle que je retrouve là-bas. La lecture des lettres de Frida Kahlo va lui faire du bien, d’où j’extrais cette ultime phrase : Je buvais pour noyer ma peine, mais cette garce a appris à nager.

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  • Temps incertain, samedi matin quand je prends, sans elle qui doit rejoindre sa famille, la route du Houlme où se tient un vide-grenier. Je trouve une place pour ma voiture dans la rue principale puis parcours les premières allées sous mon grand parapluie noir avant que cela s’arrange. C’est un endroit agréable que cette ville ouvrière où coule le Cailly, les vendeurs et vendeuses sont souriant(e)s et prompt(e)s à baisser les prix.

    Je rentre avec une étagère pour le rangement de mes livres de cuisine, une cafetière et quelques livres, deux romans : Après le tremblement de terre de Murakami Haruki (en poche chez Dix/Dix-huit), Retour en terre de Jim Harrison (chez Christian Bourgois) et La beauté m’insupporte (chez Payot), essai de Pierre Sansot (dont je possède déjà Eloge de la lenteur), enfin et surtout Le Musée des Supplices de Roland Villeneuve, grand ouvrage illustré paru en mil neuf cent soixante et onze aux Editions du Manoir à Paris.

    Il me semble que ces Editions du Manoir sont les mêmes que celles qui ont eu pignon rue aux Ours à Rouen dans les années quatre-vingt, passant graduellement de l’édition à la vente de livres et de disques soldés, avant de faire faillite, remplacées par un soldeur chinois, qui a dû lui aussi fermer boutique. Plusieurs des livres de ma bibliothèque proviennent de ce lieu que j’ai souvent fréquenté, peut-être même l’un de mes deux autres livres illustrés de Roland Villeneuve : Le Musée du Fétichisme et Le Musée de la Bestialité (parus autrefois chez Henri Veyrier).

    Quand elle me rejoint à trois heures, elle s’enquiert de mes trouvailles et bizarrement éprouve l’envie de feuilleter avec moi ce douloureux Musée des Supplices. Pour nous remettre, nous allons faire un tour de ville, évitant l’hypercentre commercial. Je découvre ainsi, par une affiche collée dans une rue peu passante, qu’à quatorze heures se tenait, place de la Cathédrale, à l’appel de Greenpeace, un rassemblement antinucléaire. Trop tard, lui dis-je, dépité.

    Temps prometteur, dimanche matin, quand elle et moi prenons la route des Damps où se tient un vide-grenier. Je me gare sur l’herbe au bord de l’Eure face à l’inquiétante papeterie M-Real sise sur l’autre rive à Alizay. Là aussi le sourire et les petits prix nous accueillent.

    Elle fait siens un cédé de Souchon et une paire de gants. J’achète un pot de confitures ananas whisky à une dame loquace, huit rouleaux de bâtonnets d’encens de chez Nature et Découvertes à trois jolies jeunes filles et, à une vendeuse moins attrayante, les Lettres à Anna de Marina Tsvetaeva (dont j’ai trouvé les confessions la semaine dernière à Bonsecours), ouvrage paru aux Editions des Syrtes.

    De retour à Rouen, nous passons par le marché du Clos Saint-Marc où le sympathique Thierry nous annonce qu’au premier soleil assuré, il s’installe avec tous ses livres, de quoi me tenter encore. Je sais, je sais, j’achète trop de livres. Il en est même une dans le quartier qui me soupçonne de tenir une librairie clandestine.

    Qu’elle se rassure, s’il me faut un jour reprendre un travail, je préfère me faire tortionnaire, à condition que la rémunération soit revue à la hausse, car les tarifs que donne Roland Villeneuve ne permettent pas de vivre, exemple : en mil trois cent vingt-trois, soixante-quinze sols pour faire bouillir un faux-monnayeur (y compris l’achat de la chaudière), soit en monnaie de mil neuf cent soixante et onze : cent trente-sept francs vingt-huit.

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  • Pour la quatrième fois en quatre jours, je suis ce vendredi matin à la porte de la maison Orange, rue Guillaume-le-Conquérant, attendant que le rideau métallique se lève. C’est que mon nouveau téléphone qui doit me permettre d’appeler gratuitement les fixes n’est pas en mesure de le faire. Je demande à celui qui m’accueille si c’est normal, s’il y a un délai, et si oui de combien de jours.

    Il va se renseigner auprès de ses collègues, revient en me disant qu’il faut peut-être un certain temps avant que cette nouvelle ligne soit opérationnelle, combien de jours il ne sait pas.

    -Vous n’allez pas pouvoir me demander si vous avez bien répondu à toutes mes questions, lui dis-je.

    Il m’explique qu’ici c’est la boutique, que pour le fonctionnement il faut appeler le service clients.

    -C’est comme chez l’épicier, ajoute-t-il, il vous vend une boîte de cassoulet, mais il ne peut pas vous dire ce qu’il y a dedans.

    Ce n’est donc pas moi qui le compare à un épicier. Dans une semaine ou deux, si c’est toujours pareil, j’appellerai le service clients d’Orange où l’on me dira :

    -Bonjour, que puis-je faire pour vous?

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  • Changement d’ordinateur oblige, plusieurs fois que je pousse la porte de la maison Orange, d’abord pour remplacer un ancien modem devenu inopérant par une Livebox (comme ils appellent ça), puis pour rendre le décodeur télé fourgué d’office avec ce boîtier, puis pour acheter un téléphone compatible, aussi pour établir une réclamation suite à l'infructueuse intervention facturée soixante-dix-neuf euros par le service clients deux semaines avant que la machine précédente ne rende l’âme (si je puis dire).

    Comme il est serein le personnel de la maison Orange, filles et garçons, jeunes et moins jeunes, toutes et tous du même modèle au même discours.

    « Bonjour, que puis-je pour vous ? », c’est la formule obligée quand tu arrives, prononcée avec un grand sourire et les yeux dans tes yeux. Après, elle ou lui ne te quitte plus, te serrant de près, toujours te regardant d’une manière extatique. Des attitudes que je connais bien, ce sont celles des membres de toutes les églises. Tu signes, tu paies, sous un sourire radieux. Il te reste à entendre la formule obligée avant que tu ne partes : « Ai-je bien répondu à toutes vos questions ? ».

    T’as intérêt à dire oui.

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  • Comment à moindre prix charger un peu plus ma bibliothèque, rien de plus simple, j’explore le vendredi dès dix heures les cartons de la vente de charité du Secours Populaire à la Halle aux Toiles (organisation quelque peu bureaucratique et embrouille avec un acheteur caractériel) puis je parcours le dimanche aux aurores, en compagnie de celle qui m’a rejoint, les allées du vide-grenier de Bonsecours (pèlerinage au tombeau de José-Maria de Heredia et aux moutons de Jeanne-d’Arc) puis celles de celui de la place de la Calende à Rouen (concentration de vendeuses et vendeurs fort sympathiques).

    J’en suis au point où je ne lis plus guère de romans. Ce doit être lié à l’âge. M’intéressent surtout maintenant les écrits intimes : autobiographies, carnets, mémoires, journaux et correspondances. Mes achats du ouiquennede le confirment : un volume des Lettres à Sartre de Simone de Beauvoir (Gallimard), Les lettres d’Hélène écrites par une anonyme à sa cousine Berthe et recueillies par Dominique Halévy (Hermé), Vivre dans le feu recueil des confessions de Marina Tsvetaeva (Biblio), L’autobiographie de Mark Rutherford (Cahiers Rouges Grasset) et La maladie humaine récit de Fernando Camon (Gallimard).

    Dans ce dernier livre, je trouve une photo en noir et blanc. Elle montre une jeune femme blonde de profil devant un rideau, cachant (volontairement ou non) son visage derrière sa main, créole à l’oreille et queue de cheval, vêtue d’un manteau. Sur le rideau, une ombre épaisse (ou une tache) semble matérialiser un nuage sortant de son cerveau en ébullition.

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  • Vendredi dernier, assis au premier balcon de l’Opéra de Rouen, je parcours le livret programme du concert Haydn, Bach, Pécou. Une placeuse s’approche, indiquant à la personne qui la suit que ce sera juste après le monsieur. Je lève les yeux et découvre en celle qui s’assoit à ma gauche l’une mes voisines, elle aussi abonnée. On se dit bonjour, aussi gênés l’un que l’autre d’être côte à côte, comme en couple. D’autant plus que les places chaque côté de nous restent libres. Je me décale donc d’une case quand l’orchestre entre en scène, ce qu’elle doit prendre pour une muflerie.

    Oswald Sallaberger est à la baguette. Pour fêter le deux centième anniversaire de la mort de Joseph Haydn, la soirée commence avec sa Symphonie numéro quatre-vingt-douze en sol mineur, dite Oxford, œuvre que je trouve assez poussive.

    La suite est plus réjouissante. Jane Peters est au violon et Jérôme Laborde au hautbois pour la version en ré mineur du Concerto pour violon et hautbois de Johann Sebastian Bach. De grands applaudissements nous valent une reprise du dernier mouvement et c’est l’entracte qui permet aux allergiques à la musique contemporaine de s’esquiver discrètement.

    Tant pis pour eux, Voix marines de Thierry Pécou est une évocation tout à fait réussie de la Bretagne, où je ne puis être cette année en avril avec elle, retenue à Paris par un proche Bétéhesse. Pour cette œuvre, l’ensemble Zellig s’ajoute à l’orchestre de l’Opéra et Ivan Morane fait le récitant, disant avec talent la version française du poème éponyme d’Olivia McCannon.

    Une musique imagée et percutante, un texte évocateur, me voici du côté d’Audierne et de Penmarch. D’autres quittent le navire avant la fin de l’œuvre ou, à l’issue, disent des bêtises :

    -La viole de gambe, c’est un truc breton ?

    -Mais non, c’est un vieux machin.

    Thierry Pécou, chemise colorée, salue modestement.

    Comme le vieux loup de mer, toujours titubant sur ses pieds marins, qui pianotait dans sa bouteille une chanson bobinette, je rentre chez moi couvert d’embruns.

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  • Jeudi seize avril à l’Opéra, les invités cravatés du groupe Heu Esse Cé de Rouen se regroupent en bas, tandis qu’à l’étage les branlotin(e)s de collège pique-niquent assis(e)s par terre. Les uns et les autres attendent les Ballets de Marseille qui donnent Métamorphoses d’après Ovide, moi itou.

    La scénographie est des frères disagneurs brésiliens Humberto et Fernando Campana, ronds et carré suspendus, la chorégraphie de Frédéric Flamand, c’est joli à voir sans rien de transcendant, bien sage. Je m’aperçois en écrivant ceci plusieurs jours après que je n’en ai guère de souvenir, si ce n’est du tableau final où les danseuses se font un peu dépouiller par les danseurs.

    Je le constate une fois de plus : ma mémoire chancelle. « Le temps fait-il notre malheur? » demande Raphaël Enthoven dont j’écoute l’émission Les nouveaux chemins de la connaissance sur France Culture en découvrant mon nouvel ordinateur. A cette question, je réponds oui.

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