• Au matin du dimanche, nous quittons l’appartement au moment où une équipe de déménageurs latinos emportent les cartons de celui qui s’en va bientôt à Porto Rico et nous descendons jusqu’à Battery Park par le métro 1. Là, nous prenons l’immense et beau bateau orange qui emmène à Staten Island, le quartier le moins connu de NYC. A son bord, des touristes qui ne feront que l’aller et retour et des habitant(e)s du lieu qui semblent pressé(e)s de rentrer..

    La traversée est tranquille avec vue sur Manhattan s’éloignant et Liberty Island à bâbord. On met le pied à terre vers onze heures a.m. et on se rend vite compte qu’il n’y a pas grand-chose à faire sur cette île dortoir où se trouvait la plus grande décharge urbaine du vingtième siècle (laquelle fut rouverte en deux mille un pour y déposer les débris des Twin Towers).

    Grosse chaleur oblige, nous trouvons refuge près d’un ventilateur dans le seul restaurant breakfast lunch dinner visible, un endroit qui a dû connaître des jours meilleurs. Une gentille serveuse s’occupe de nous. Peu de clients en ce jour dominical : un père et son fils, une famille, des isolés au comptoir. Comme set de table, nous avons le trombinoscope des Présidents des Etats-Unis, ce qui nous permet de réviser l’histoire du pays en attendant l’arrivée des plats (quatre assassinés dont Lincoln et Kennedy, d’autres morts à la tâche, plusieurs démissionnés). Celle que j’accompagne a choisi un wrap hot and spicy chicken with red beans cajun avec des chips et moi un black and blue cheese burger cajun avec des pâtes froides et des french fries. C’est bon et suivi d’un café et d’un thé.

    Après le repas, nous nous promenons au bord de l’eau observant les gros bateaux, dont un porte-conteneurs, avec une belle vue sur la Liberté, Lower Manhattan et New Jersey. Il fait de plus en plus chaud, on fait des photos.

    Pour le retour, nous nous plaçons à tribord afin de profiter de la meilleure vue, d’où moult nouvelles photos, notamment à l’approche de Lower Manhattan avec ses deux tours en construction.

    Arrivés à Battery Park, on se balade le long de l’Hudson avec une pause salade de fruits, clafoutis, bouteille d’eau fraîche. On regarde les promeneurs du dimanche. Un homme passe portant une pancarte « Jesus ».

    Au retour à Convent Avenue, c’est la dînette Martini salade glace, puis on ressort pour faire le tour du New York City College pendant que tombe la nuit. Un jeune homme black nous voyant hésiter à un carrefour s’adresse à nous « Hey guys, are you ok ? », prêt à nous venir en aide en cas de besoin.

    Revenus dans l’appartement, elle me montre le livre trouvé chez un bouquiniste de la ville This is New York de Miroslav Sasek tandis que je dégoutte de sueur. Le ventilateur posé sur la table de la cuisine me rafraîchit enfin.

    *

    Le plus que centenaire Staten Island Ferry est gratuit et navigue vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

    *

    Une famille black pique-nique régulièrement sur le trottoir de Convent Avenue, immenses barbecues, musique à fond, table, fauteuils. C’est un salon à ciel ouvert. La Police n’y trouve rien à redire.

    *

    Embêtant d’avoir à écrire qu’une famille ou un jeune homme sont de peau noire, alors que pour les blancs la précision n’est pas de mise.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Après avoir longuement attendu que Ron, le colocataire en voie de déménagement, libère la douche pour prendre la nôtre, nous allons une nouvelle fois à la laundry. Les télés sont branchées sur les infos continues qui ressassent le Midtown Shooting de la veille. Un type licencié a tué son collègue en pleine rue du côté de l’Empire State Building. Les NYPD l’ont buté mais des passant(e)s ont reçu des balles. Il semble qu’il y ait eu des problèmes de coordination entre les services. On se réjouit de n’être pas passés par là au moment où les balles sifflaient.

    Cette lessive rondement menée et rangée dans la commode et le placard, nous descendons à pied la rue d’Amsterdam qui bientôt remonte. Il s’agit de découvrir Columbia University où ont étudié Jack Kerouac, J.D. Salinger, Paul Auster et Barack Obama sans oublier une tripotée de prix Nobel mais impossible d’entrer dans les locaux, nous dit une vigile. Nous poursuivons jusqu’à la Cathédrale Church of Saint John the Divine, énorme bâtiment bizantino-gothique en construction depuis mil huit cent quatre-vingt-douze. C’est la troisième plus grosse église du monde après Saint-Pierre-de-Rome et Yamoussoukro en Côte d’Ivoire. La fin des travaux est prévue pour deux mille cinquante mais on y trouve déjà des toilettes. Je crois bien que c’est la première fois que je fais pipi à l’intérieur d’une église.

    Il est l’heure de chercher un endroit où déjeuner. On le trouve un peu plus bas de la rue d’Amsterdam, une gargote latino où nous commandons, elle une salade du chef, moi du porc grillé avec des bananes flambées. Hormis nous deux, la clientèle ne se compose que de latinos. Beaucoup d’hommes seuls et quelques grosses femmes mangent au comptoir. Certain(e)s viennent chercher des repas à emporter. Un grand black en livre aussi. Nous terminons par un thé et un café.

    Après le repas, nous rejoignons à pied Riverside Park au bord de l’Hudson. Assis sur un banc d’où l’on voit en contrebas la rivière, on regarde le monde qui passe, cyclistes, coureurs à pied, etc. Des jolies filles se font bronzer en maillot de bain, des NYPD passent, des écureuils font leur apparition, pas farouches. Je fais des photos d’elle avec ces petites bêtes.

    Au retour, nous dirigeant vers Convent Avenue, nous passons devant Riverside Church, haute bâtisse inspirée de Chartres, sise dans Claremont Avenue. C’est jour d’enterrement et sonne le glas. Trois interminables limousines noires stationnent devant l’église, dont l’une pour le défunt. Nous faisons des photos de la famille noire en deuil puis des courses à la pharmacie du coin, une supérette où l’on trouve aussi des médicaments. Après un achat de vin et de Martini dans une boutique spécialisée, je passe à la banque puis nous nous séparons. Fatigué par la chaleur, je rentre directement à l’appartement et elle va à l’épicerie de proximité d’où elle revient avec un pot de glace.

    La soirée se passe à Convent Avenue avec une bouteille de sauvignon chilien bien bon.

    *

    Eglises, Cathédrale, construites à la manière européenne ancienne mais ratées, problèmes d’échelle, lourdeur. Fake. Riverside Church a le plus gros carillon du monde, soixante-quatorze cloches, dont l’une est la plus lourde du monde : vingt tonnes.

    *

    Sur une fenêtre de Claremont Avenue, au-dessus d’un climatiseur : « Baby sleeping inside. Please be quiet and no smoking. Thank you! »

    *

    « It’s the law, clean up after your dog” concision de l’anglo-américain.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • « Cher Michel, vous aviez l'oreille particulièrement tolérante ou l’œil ébloui par le charme de Vanessa ou encore, n'avons-nous pas assisté au même concert, mystère, mystère? », m’écrit l’un de mes fidèles lecteurs présent lui aussi au concert Vanessa Wagner Murcof à l’Opéra de Rouen ce lundi soir. « La majeure partie du temps la réunion des deux n'a fait qu’affadir les morceaux et transformer tout ça en musique pour salle d'attente pour dentiste en manque d'inspiration. », ajoute-t-il.

    Comme il s’y connaît en musique, il a sans doute raison. Il n’empêche que je n’avais pas mal aux dents ce soir-là.

    Mes propos, mes avis, sont toujours suspects dans ce domaine, comme dans tous les domaines artistiques. Il n’y a qu’en littérature que mon goût est sûr, ce qui ne m’empêche pas de prendre plaisir à des livres de seconde catégorie. Quand j’ai le temps de lire. Ce qui n’est pas le cas depuis mon retour d’Amérique. La rédaction de mon Journal de voyage m’en empêche.

    Le seul livre que j’aie réussi à lire est Kafka et les jeunes filles, un essai de Daniel Desmarquest publié en deux mille deux chez Pygmalion Gérard Watelet, trouvé dans la cave de la bouquinerie Le Livre Enchanté, rue des Bons-Enfants, où tout est à cinquante pour cent du prix d’occasion indiqué. C’est un ouvrage de première catégorie. Daniel Desmarquest sait écrire et ce qu’il raconte m’intéresse particulièrement, à preuve ceci :

    Ne serait-elle que la consolation du désespéré, la jeune fille serait déjà bénie. Dans le désert, elle est une oasis. A la violence d’écrire s’oppose le mirage de son corps. Dérisoire rempart. Si l’écrivain s’obstine à la traquer et s’accroche comme un noyé à celle qui croise son chemin, c’est qu’il la sait douée d’un pouvoir autrement décisif. Ce qu’il puise dans ses yeux, sur ses lèvres, sur sa peau, n’est pas seulement une promesse de bonheur. La liaison de l’écrivain et de la jeune fille est plus audacieuse, et quasi incestueuse : ces deux-là se ressemblent, qui sont l’un et l’autre en transition. D’où une fascination réciproque.

    Du temps, j’en prends aussi pour papillonner sur Internet pendant que j’écris, ainsi ce mardi après-midi trouvant ceci qui me consterne sur le site Grand Rouen (faute d’accord incluse) :

                « Une plantation de cannabis partie en fumée à Rouen ?

                Un incendie, rue Eau-de-Robec, à Rouen a nécessité vers 14H30 le 27 novembre l’intervention de nombreux pompiers. Deux adultes et deux enfants ont été légèrement intoxiqués.

                Les témoignages du voisinage laissent entendre que l’incendie aurait dégagé d’étranges odeurs dans le quartier. Des pistes que l’enquête de police devraient confirmer… »

                Suit la copie d’écran du touite avec faute d’orthographe d’un voisin « La maison de mon voisin le cultivateur de canabis a cramé, ma rue est pleine de pompiers, de flics et de journalistes. »

                Se faire le relais d’une telle « information », la traiter sans recul critique et même inviter la Police à faire son travail, c’est une curieuse conception du journalisme.

                « sympa le mec qui balance son voisin sur twitter... » commente Laure Leforestier. Il n’y a pas que le voisin.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • C’est au plus près de Vanessa Wagner que je suis ce lundi soir à l’Opéra de Rouen, assis sur la chaise idéalement placée pour voir au mieux le jeu de ses doigts sur les touches du Steinway, je n’ai pas loupé mon coup, étant entré le premier dans la salle à l’ouverture des portes.

    Cinq micros plongent dans les tripes du piano. C’est que la talentueuse pianiste n’est pas seule sur scène. Derrière une table voilée de noir se tient Murcof, musicien d’electro mexicain, dont j’ignorais encore le nom hier (s’il est un domaine de la musique où mes connaissances sont lacunaires, c’est l’electro).

    Pendant une heure quinze, sous des jeux de lumières maîtrisés, tandis que volutes partent en fumée, Vanessa Wagner et Murcof génèrent un univers musical envoûtant, planant aurait-on dit dans les années soixante-dix, passant par Debussy, Glass, Adams, Satie, Glass again, Cage, Ligeti, Ravel, Dutilleux et Dusapin. Je regrette que ne soit pas avec moi celle qui travaille à Paris, notamment pendant la Gnossienne numéro trois et Metamorphosis II puis IV, et maudis celles et ceux qui toussent et celui qui se trémousse derrière moi sur une chaise qui grince.

    La salle aux trois quarts pleine applaudit généreusement, mais de rappel point.

    *

    Revoici le copié collé marché de Noël rouennais sur le parvis de la Cathédrale avec cette année des cabanes un peu plus solides que celles de l’an dernier et, placé contre l’édifice gothique, un grand camion de la Maison Milot, laideur assurée.

    En attendant l’ouverture, ce marché est entièrement entouré de barrières. Plus moyen de traverser le parvis en diagonale pour aller à la Poste, à l’Opéra ou ailleurs, obligé de longer le magasin Hache et Aime de l’Espace Monet-Cathédrale.

    Difficile d’ailleurs d’aller et venir dans ce coin, le passage Maurice-Lenfant étant lui aussi interdit par les barrières qui l’ont privatisé. Le chantier se termine bientôt. Personne ne semble s’être aperçu que les arbres de la rue des Carmes, entre le nouveau bâtiment et Le Printemps, précautionneusement protégés pendant la démolition du Palais des Congrès, ont été coupés à la racine.

    *

    Un qui s’est fait raccourcir également, c’est le gars Rollon, amputé de son gros doigt par des vandales. L’extrême droite régionaliste est venue protester à ses pieds. Il était pourtant bien quand il avait un bras en moins, avant qu’un défenseur du petit patrimoine ne lui en greffe un nouveau, un peu trop blanc.

    *

    Rouen, rue Saint-Romain : la Maison Citéos remplace les lampadaires rustiques par d’autres d’un modèle disagne. Je demande à l’ouvrier au sol s’il est prévu de changer ceux de ma ruelle. Il transmet la question à l’ouvrier de la nacelle. « Pas tout de suite, un jour peut-être ». Je vais donc pouvoir continuer à vivre dans une rue du Moyen Age.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Dimanche après-midi, je suis assis en quatrième rangée à l’Opéra de Rouen pour l’opéra O Mensch ! de Pascal Dusapin que propose Automne en Normandie. La salle n’est qu’à demi occupée.

    Sur scène sont la pianiste Vanessa Wagner et le baryton Georg Nigl pour lequel Dusapin a mis en musique des poèmes de Friedrich Nietzsche. Cela va de O Mensch ! Gib acht ! (O Homme ! Prends garde !) à Still ! (Silence !). Georg Nigl double son talent de chanteur d’un talent de comédien (il fut acteur au Burgtheater de Vienne). La mise en lumière de Sébastien Michaud est minimaliste. C’est austère et beau. Je ne regrette qu’une chose : de ne pouvoir lire les surtitres en français (les écrans trop hauts semblent faits pour qui est en corbeille, dont le staff de la Maison).

    *

    Un chanteur seul sur scène avec une musicienne, pourquoi appeler ça un opéra ? me dis-je sur le chemin qui me ramène chez moi. Le dictionnaire me donne la réponse : « Opéra : œuvre dramatique mise en musique et dont les paroles sont chantées ».

    *

    Vendredi dernier, profitant de la fascination des médias pour la querelle des deux héritiers de ce fat sot de Sarkozy, ce falot de Hollande demande à Valls de faire cogner sur les occupant(e)s du terrain retenu pour la construction de l’inutile Ayraultport à Notre-Dame-des-Landes. Résultat : le lendemain, trois mille cinq cents manifestant(e)s (eux traités au canon à eau) défilent dans les rues de Nantes en criant « Ayrault salaud, Valls facho ». J’aurais aimé en être.

    Ce Valls déclarant : « Il est hors de question de laisser un kyste s'organiser », alors qu’il est lui-même Tumeur de l’Intérieur.

    Les Socialistes sont assurés de ne plus jamais avoir ma voix dans l’urne (déjà avec la chasse aux Roms et la multiplication des reconduites à la frontière de Sans Papiers, c’était foutu pour eux).

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Celle que j’accompagne a le vendredi libre en compensation du travail jusqu’à pas d’heure le quinze août. Nous partons pour Brooklyn où je veux l’inviter au Tom’s Restaurant, rue de Washington. Nous avons la chance d’y obtenir sans attente une table dans la salle principale. L’ambiance, la déco kitsch, la clientèle mélangée et élégante, la cuisine (steaks Salisbury, frites françaises), les signatures de célébrités au mur, la photo d’Obama qui nous regarde manger, tout lui plaît autant qu’à moi, c’est parfait un café et un thé pour finir.

    Elle veut ensuite me faire connaître le cimetière de Green-Wood qu’elle a déjà visité et où (je l’ai appris par Le Guide du Routard) Basquiat est enterré. On ne sait pas comment le rejoindre à pied. On se renseigne à la Brooklyn Library et nous voici partis. On longe Prospect Park, c’est long et il fait très chaud. On tourne à droite, le cimetière est en vue mais quand on y arrive, c’est à une porte qui n’ouvre que le samedi. Il nous faut donc faire presque tout le tour pour trouver une porte ouverte. C’est interminable. On touche le but épuisés, moi de plus ronchonnant. Dès franchie l’immense arche de style gothique, je m’écroule sous un arbre, cependant qu’elle a le courage d’aller acheter de quoi se rafraîchir à la station service en face.

    Nos glaces à l’eau consommées, on se présente au check-point. Un gardien ou un garde nous donne un plan. Basquiat ne figure pas parmi les célébrités enterrées là (Bernstein, Tiffany et des militaires). Un ordinateur à la disposition des visiteurs voulant trouver la tombe de leurs proches nous indique qu’il est tout en haut. Nous grimpons dans la chaleur épaisse. On arrive au secteur 176, lot 44 603, vaste lot où l’on cherche en vain. Aux quelques visiteurs à qui on demande, le nom de Basquiat ne dit rien. Nous sommes fatigués. Elle s’assoit sur un banc. J’aperçois un homme qui fait des photos. Je vais lui demander et miracle il connaît JM Basquiat et sait à peu près où est sa tombe.

    Je la trouve et appelle celle qui n’était pas loin de renoncer, une petite pierre tombale dans une longue ligne où sont surtout des Italien(ne)s, entre celles des familles De Lorenzo et Russo. Quelques offrandes, dont une roue à vent multicolore, l’ornent. Nous y ajoutons les sucettes qui nous ont été offertes par Tom’s Restaurant. « Jean-Michel Basquiat Artist Dec 1960 Aug 1988 » est-il simplement écrit.

    On fait quelques photos puis on prend le temps de visiter le reste du cimetière en redescendant vers la sortie, six cent mille tombes sur près de deux kilomètres carrés, éloignées les unes des autres dans une atmosphère paisible, avec des inscriptions familières (Mother, Father and co) et parfois des offrandes kitsch. Ici sont enterrées les familles Paillard, Dalton, Kinder et Asleep mais bien vivants sont les écureuils, les hérons et les gardes armés qui patrouillent en voiture.

    Exténués, nous prenons le métro D et rentrons à Convent Avenue pour un apéro grignotage : raisins congelés sans pépins, bol de gingembre brûlant, puis elle s’occupe un peu de l’organisation du voyage de septembre.

    *

    « Ne deviens pas une statistique », c’est la mise en garde de la MTA (Metropolitan Transportation Authority) à qui aurait envie de pénétrer dans le train alors que les portes se referment. Suit le nombre de morts enregistré chaque année parmi les adeptes de cette pratique.

    *

    Autre conseil, que l’on ne trouve pas seulement dans le métro : « If you see something, say something. ». Il suffit d’appeler 1-888-NYC-SAFE.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Cette fois, je ne loupe pas le MoMA (Museum of Modern Art) que j’atteins avec le bus M3. Un pass famille doit me permettre d’entrer gratuitement, que celle qui ne peut être avec moi pour cause de labeur a obtenu d’un vieux black qu’elle a dessiné. Au guichet, ce pass défraîchi refuse d’être lu par le décodeur. Il a manifestement déjà été utilisé. L’employée ne cherche pas à comprendre, elle me laisse entrer et même me le redonne.

    Je prends l’escalator, ai le plaisir de trouver en haut des marches au niveau 4 La Rue de Balthus et m’y attarde un peu puis monte au niveau 5, où sont les chef-d’œuvres de la peinture des dix-neuvième et vingtième siècles : Nuit étoilée, Nymphéas, etc. Beaucoup de monde évidemment, dont des Français que j’essaie de ne pas entendre. Je trouve là aussi, à mon contentement, deux James Ensor et deux Frida Kahlo. Dans des couloirs, où peu les voient, sont des toiles de George Grosz, Otto Dix, Edward Hopper (New York Movie, qui ne sera donc pas à Paris) et le tableau remarqué par celle qui est passée là avant moi, dont elle m’avait envoyé une reproduction en carte postale, Christina’s World d’Andrew Wyath : une femme allongée de dos fait face à une maison hopperienne, impression de malaise garantie, surtout quand on prend conscience des bras maigres de cette femme.

    Je monte au niveau 6 où sont les expositions temporaires : une rétrospective Alighiero Boetti où je ne m’attarde pas et Century of the Child : Growing by Design, 1900-2000 où je passe plus de temps que prévu. On y montre le meilleur du mobilier, du jouet et du livre pour enfant et il y a de quoi voir. Quelques peintures sont aux murs dont deux me retiennent : Espoir de Gustav Klimt, montrant une femme enceinte, et The Blue Dolls d’Alton Piekens, où des enfants inquiétants brûlent leurs poupées. Me plaît aussi l’installation Goth Lolita ensemble with matching Angry doll de M. Nosto (Japon). Dans la salle consacrée à l’enfance dans les régimes totalitaires, je repère une affiche en français datant de mil neuf cent quarante. Elle est signée du Suisse Hans Thöni « Pour une jeunesse saine, pour un peuple fort, les Sports d’hiver ! ». Ailleurs, un court film noir et blanc de mil neuf cent vingt et un montre des nymphettes court vêtues dans des exercices gymniques Looks very Jolly, doesn’t It ? Il s’agit, indique le cartouche, de l’Open Air Summer School de Margaret Morris à Pourville (sud de la France). Je vois bien les falaises et l’erreur, ainsi que les nymphettes du même genre qui visitent cette exposition.

    Je repasse par le niveau 5, où se trouve maintenant trop de monde, puis descends au 4 qui va de mil neuf cent quarante à mil neuf cent quatre-vingt. Nouvelles gloires : Pollock, Rothko, Warhol, Lichtenstein, Rauschenberg et les autres, une salle Joseph Beuys et une autre qui m’intéresse davantage consacrée à Marcel Broodthaers, artiste belge sur lequel je me promets de faire une recherche en rentrant. J’aime bien aussi The Bus Driver, sculpture installation de George Segal.

    Commençant à fatiguer, je descends au 3 « Architecture, Design, Photographies, Dessins », où dans un vieux téléphone noir j’écoute un poème au hasard parmi « a lot of Dial-a-poem », c’est un de Gary Snyder dit par lui-même je pense.

    Je descends au 2 où est exposé l’art contemporain de mil neuf cent quatre-vingt à nos jours, trop épuisé pour bien en profiter. Je m’attarde quand même devant Keith Haring, Jeff Koons, Takashi Murakami et termine par Dieter Roth solo scenes, cent vingt huit vidéos de lui-même dans les actes de la vie quotidienne, montrées sur trois murs, cela filmé dans la dernière année de sa vie.

    Je sors de là lessivé à 2.30 p.m. et pars à la recherche d’un restaurant, retrouvant par hasard l’un où j’ai déjà mangé : le Galaxy sur la 9eme Avenue (burger frites, coca, café, douze dollars). Ensuite, je gagne le bord de l’eau, près de l’Intrepid Sea Air Museum au pier 84 (Musée de l’Armée sis dans un porte-avion), et à l’ombre sur un ponton, je trouve une table publique où mettre en forme mes notes. Une jeune femme black vient s’y asseoir aussi, un peu mal en point, pas loin de s’endormir. A la table voisine, un père bricole pour son fils un modèle réduit d’avion de guerre acheté au Musée. Une jolie blonde se fait photographier par sa copine. Un pauvre black récupère les bouteilles en plastique dans les poubelles. Un hélicoptère à double hélice survole la scène. La jeune femme black s’en va, l’avion modèle réduit est terminé, la jolie fille s’assoit sur les genoux de sa copine grosse et laide pour regarder les photos. D’un café voisin provient Here comes the sun que joue et chante un musicien chargé d’égayer la clientèle. Le ciel est orageux. Il fait chaud dans les rues de Manhattan et frais là où je suis. A 6.30 p.m. je dois la rejoindre, libérée du travail, à la 23th Street, sortie de métro C et E devant chez Gap.

    Je prends donc un E qui me mène au bon endroit. En attendant l’heure du rendez-vous, je bois un Coca Regular chez Dunkin’ Donuts où il faut demander la clé pour aller aux toilettes. A six heures trente pile, je la vois qui me cherche des yeux, inquiète, finissant par m’apercevoir. Arrive Nic, l’une de ses amies américaines. Liz, sa colocataire, doit nous rejoindre un peu plus loin. Il s’agit d’aller voir si à Chelsea en août les galeries d’art font vernissage. Eh non ! Liz survient, une part de pizza à la main. On décide d’aller boire un verre quelque part. Un café au pied de la High Line nous permet une table en terrasse. On commande une bouteille de merlot de Californie, des frites de patates douces et des frites de courgettes. Les trois filles discutent de choses et d’autres et je fais de la figuration muette.

    Quand les serveurs nous font comprendre qu’il est temps de laisser la place, on va se balader sur la High Line que l’on parcourt de bout en bout, la nuit étant tombée. Ces deux filles sont sympathiques bien qu’un peu superficielles et Liz a un rire que je croyais jusqu’alors réservé aux bandes dessinées Hi hi hi hi hi.

    Nous nous séparons dans une station de métro avec une bise à la française. Pour nous, c’est retour à Convent Avenue.

    *

    Le MoMA : un beau bâtiment à l’architecture sobre avec plongée visuelle sur les étages inférieurs et les rues voisines (grandes vitres descendant jusqu’au sol).

    *

    Christina’s World d’Andrew Wyath évoque sa voisine handicapée qui ne se déplaçait qu’en rampant. Le peintre a demandé à sa jeune femme de poser mais lui a fait les bras amaigris de la voisine, apprendrai-je plus tard.

    *

    A toujours devoir se taire, ou à juste bredouiller quelques mots d’anglais, on passe vite pour un idiot.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Suivre un être humain de la conception à l’extinction, c’est l’idée qu’a eue Laurent Dehors pour honorer la commande que lui a faite l’Opéra de Rouen dans le cadre d’Orchestres en Fête.

    Ce jeudi soir, c’est donc une création mondiale au thème peu original, Les Sons de la vie, qu’interprète l’Orchestre de l’Opéra mélangé avec le Big Band Tous Dehors ou plutôt que jouent les musicien(ne)s de jazz avec l’aide ponctuelle de certain(e)s musicien(ne)s de l’Orchestre, les autres faisant de la figuration.

    Laurent Dehors fait son numéro d’extraverti, ce qui assurément plaît à une grande partie du public. Personnellement, je reste en dehors : trop de notes aigues, trop d’esbroufe, trop de tirage à soi de la musique.

    Prévoyant de n’être pas plus à la fête pour la suite qui se passe dans le foyer public où « le célèbre groupe rouennais Papanosh vous invite à danser sur sa musique aux notes déjantées », je disparais dès le bis exécuté par une sortie de secours.

    *

    Début des années soixante-dix, les Socialistes, contre l’inutile extension du camp militaire, sont aux côtés des occupant(e)s du Larzac.

    Quarante ans plus tard, les Socialistes, pour la construction de l’inutile Ayraultport, envoient la Police matraquer les occupant(e)s de Notre-Dame-des-Landes.

    Ce qu’ils appellent le changement.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • Hyper Maintenant, l’exposition de la promotion deux mille douze du département Art de l’Ecole Supérieure d’Art et de Design Le Havre/ Rouen, c’est l’expo de fin d’études des beauzarteux et beauzarteuses de Rouen, treize comme tous les ans. Cela se passe dans la Grande Galerie de l’Aître Saint-Maclou et j’y suis ce mercredi à dix-sept heures trente pour le vernissage, faisant le tour des œuvres, à peu près semblables à celles de l’an dernier et des années précédentes, les profs sont toujours les mêmes.

    Le directeur aussi, François Lasgi, qui vient me dire que des dessins de lui achetés par le Frac (Fonds Régional d’Art Contemporain) en mil neuf cent quatre-vingt-cinq ou quatre-vingt-quinze (je ne sais plus) sont actuellement exposés là-bas et qu’il aimerait que j’aille les voir. Il sera déçu.

    Entre les deux salles, une œuvre est posée sur le sol, mosaïque de terre peinte, que certain(e)s sautent et d’autres piétinent, la cassant peu à peu, au contentement de son auteure qui la photographie régulièrement. La seule que je connaisse dans les treize ne me dit pas bonjour, elle est avec papa maman.

    Je vais chercher un verre de vin blanc mais suis chassé des salles d’exposition. On ne boit que dehors. Ce que je fais en écoutant le dialogue entre l’une des étudiantes et un garçon qui vient de faire sa connaissance :

    -T’es spécialiste dans quelque chose ou tu touches un peu à tout ? lui demande-t-il sans malice.

    -J’ai mon univers, lui répond-elle.

    Pour comprendre qui a fait quoi dans cette exposition, il faut mettre la main sur l’un des rares plans sous pochette plastique. C’est ainsi que je sais que la seule œuvre qui retienne mon attention, une installation montrant une série de rats obèses en terre cuite face à un mur au pied duquel est répandue une profusion de graines de colza, s’appelle Abondances transitoire (écrit ainsi) et est de Wenceslas Dantz.

    Personne n’est là pour faire des discours cette année. Ces jeunes gens n’entendront donc pas dire que maintenant ce sont des artistes.

    Partager via Gmail Yahoo!

  • C’est dans l’une des vieilles rames du métro prochainement vendues à une ville de Turquie que je rejoins Le Grand-Quevilly ce mardi soir. Le Poème Harmonique et L’Arcal y donnent Caligula au Théâtre Charles-Dullin pour l’Opéra de Rouen dans le cadre du festival Automne en Normandie.

    Caligula est un opéra baroque en trois actes de Giovanni Maria Pagliardi, mis en scène par Vincent Dumestre, la providence des marchands de bougies, interprété par les chanteurs et chanteuses de L’Arcal, les musiciennes et musiciens du Poème Harmonique et les marionnettistes de la compagnie Figli d’Arte.

    En avance évidemment, j’attends qu’il soit l’heure de se précipiter sur la meilleure place possible. Autour de moi, des femmes bavardes dont l’une bouge autant qu’une marionnette mais on ne voit pas les tiges ni qui la manipule.

    Je m’installe au centre de la quatrième rangée, dominant la fosse où se tient la musique ; sur scène des panneaux peints et une rangée de bougies. Devant moi, des membres d’une chorale discutent. L’un d’eux : « Le nouveau curé que j’ai à la montagne à côté de Morzine, il est vraiment noir et alors il parle avec l’accent africain, on a du mal à le comprendre dans ses homélies. »

    Ici, ça commence comme une célébration religieuse par le solennel allumage des bougies et pour comprendre l’italien, il y a le surtitrage en français, mais l’histoire est alambiquée. Je ne suis pas, j’écoute chanter. Le jeu des marionnettes à tiges palermitaines est sommaire, rudimentaire même. Les rixes font un bruit de casserole. Pour animer un peu passent un tigre bondissant et un papillon au bout d’une tige. Caligula meurt et ressuscite.

    A l’issue, les fondu(e)s des marionnettes et les fondu(e)s de la musique baroque sont content(e)s. Les bougies, elles aussi, sont fondues.

    Par chance, je suis à l’arrêt du métro deux minutes avant son passage (le suivant dans trente minutes). C’est une rame nouveau modèle qui me reconduit à Rouen. Première fois que j’y voyage, assez moche, avec des sièges trop rouges et un écran qui fait la promotion des événements en cours dans l’agglo élargie.

    *

    Ma petite voiture, que j’utilise le moins possible, trouve place dans l’île Lacroix puisque les rues de l’hypercentre de Rouen sont piétonnières et que je n’ai pas les moyens d’avoir un garage. Ça énerve certains habitants de cette île qui jugent qu’eux seuls ont le droit de s’y garer. Robert, Maire, envisage donc de rendre payant le stationnement à cet endroit afin que les voitures tampons, comme on les appelle en Mairie, dont la mienne, aillent stationner à l’entrée de la ville dans les parquignes relais gratuits. C’est bizarre ce raisonnement. Robert, Maire, semble croire que les voitures garées longtemps au même endroit viennent de l’extérieur de la ville.

    La mienne restera dans l’île Lacroix, même s’il me faut payer cet impôt supplémentaire. Les habitants de l’île, qui paieront eux aussi, n’auront pas davantage de places pour se garer, moins même, puisque les trottoirs et autres endroits interdits où ils stationnent actuellement, profitant de l’inaction de la Police Municipale, leur seront désormais interdits (quand le stationnement est payant les Municipaux passent).

    Robert, Maire, comment se déplace-t-il et où se gare-t-il ?

    Partager via Gmail Yahoo!





    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires